Au moment où la contre-offensive
ukrainienne s’enlise définitivement, l’OTAN et l’UE perdent la bataille
géopolitique. Nous voici à bientôt 550 jours de conflit. Et les lignes
de forces de la bataille en cours apparaissent de plus en plus
clairement.
A Zaporojie, rien de nouveau...
Le Général Mark Milley, chef d’État-major américain des armées, a bien essayé de faire croire à une percée majeure ukrainienne à Rabotino, sur la partie sud de la ligne de front.. En réalité, voilà la carte des opérations :
La nouveauté de ces dix derniers jours : l’armée ukrainienne (à contingents OTANiens déguisés en “volontaires” mais de plus en plus visibles) concentre ses efforts sur Rabotino et Verbovoïe, pour essayer de réussir au moins une percée. Les troupes kiéviennes se sont emparées de la plaine. Mais les troupes russes tiennent toujours les collines environnantes. L’aviation russe continue à bombarder massivement les troupes ukrainiennes. Les Russes ont aussi la supériorité dans le duel d’artillerie.
Bien entendu, les Ukrainiens ont intensifié les coups de boutoir. Mais l’armée russe continue à défendre une ligne qui est très en avant de la première ligne de fortifications. Les observateurs disent que Rabotino s’est transformé en zone grise.
Par ailleurs, on a eu, comme chaque semaine, des tentatives de frappes de drones spectaculaires (comme à Pskov, sur un aéroport militaire secondaire pour la bataille d’Ukraine). Et des tirs de missiles russes quotidiens, sur l’ensemble du pays, en particulier sur les centres de commandement.
Des analyses à ne pas manquer
Tout d’abord, je vous recommande de toujours jeter un œil, pour connaître le point de vue américain dominant, sur le site de l’Institute for the Study of War. Les informations données, actuellement, ne divergent pas de celles de nos sources mais les cartes sont faites pour soutenir la thèse de Washington sur la percée ukrainienne :
Pour comprendre les ressorts et le très probable échec de la contre-offensive ukrainienne, il faut lire le dernier papier de Big Serge. Cela faisait un moment qu’il n’avait pas consacré une analyse approfondie à la Guerre d’Ukraine. L’auteur montre comment l’Ukraine effectue une tentative désespérée de sortir de la guerre de position – sans en avoir les moyens (et ceci malgré l’équipement considérable mis à la disposition de Kiev par l’OTAN).
Le colonel Macgregor a donné un entretien approfondi à Tucker Carlson, dans lequel il insiste sur le fait que l’armée russe ne cesse d’apprendre de ses erreurs sur le champ de bataille tandis que les États-Unis vivent sur des conceptions militaires qui remontent à la guerre d’Irak. Macgregor insiste sur le fait que, selon lui, l’armée américaine d’aujourd’hui serait incapable d’affronter l’armée russe :
Je recommande aussi les analyses détaillées sur la conduite de la guerre proposées par le blog de Simplicius. L’auteur insiste sur la capacité de l’industrie de la défense russe à fonctionner à plein régime.
La guerre en Ukraine appendice d’un affrontement géopolitique mondiale que l’Occident est en train de perdre
M.K. Bhadrakumar revient sur l’affrontement géopolitique mondial, que les Occidentaux sont en train de perdre.
Si, jusqu’à l’année dernière, le jeu occidental consistait à se moquer des BRICS comme d’un club sans importance, le pendule est passé à l’autre extrême. Les raisons ne sont pas difficiles à trouver.
Au niveau le plus évident, le monde occidental est très sensible au fait que les efforts massifs déployés au cours des 18 derniers mois pour imposer des sanctions contre la Russie ont non seulement échoué, mais sont devenus un véritable boomerang. Et ce, à un moment où la peur morbide des États-Unis d’être dépassés par la Chine a atteint son paroxysme, enterrant l’hégémonie mondiale de l’Occident depuis les “découvertes géographiques” du XVe siècle.
Ces dernières années ont été marquées par un renforcement constant du partenariat Russie-Chine, qui a atteint un caractère “sans limites”, contrairement au calcul occidental selon lequel les contradictions historiques entre les deux géants voisins excluaient virtuellement une telle possibilité. En réalité, le partenariat Russie-Chine se profile comme quelque chose de plus grand qu’une alliance formelle dans sa tolérance sans faille de la poursuite optimale des intérêts nationaux de chaque protagoniste tout en soutenant simultanément les intérêts fondamentaux des deux parties.
Indian Punchline, 28 août 2023
Le diplomate indien insiste sur les débats au sein des BRICS, assumés, très loin de ce qu’est devenue, par exemple, l’Union Européenne :
Le ministre russe des affaires étrangères, Sergueï Lavrov, a révélé aux médias qu’à huis clos, le sommet de Johannesburg avait donné lieu à “une discussion assez animée” [lire des opinions divergentes], mais qu’il était parvenu à un consensus sur les “critères et procédures” de l’expansion des BRICS, qu’il a décrits comme suit :
“Le poids, la proéminence et l’importance des candidats, ainsi que leur réputation internationale, ont été les principaux facteurs pour nous [les membres des BRICS]. Nous sommes tous d’avis que nous devons recruter dans nos rangs des pays qui partagent les mêmes idées et qui croient en un ordre mondial multipolaire et à la nécessité de plus de démocratie et de justice dans les relations internationales. Nous avons besoin de ceux qui défendent un rôle plus important pour le Sud dans la gouvernance mondiale. Les six pays dont l’adhésion a été annoncée aujourd’hui répondent pleinement à ces critères”.
Indian Punchline, ibid.
Et il en tire des conclusions pour son propre pays :
“On ne peut guère parler d’une orientation anti-occidentale – à l’exception de la Russie et maintenant, peut-être, de l’Iran, aucun des participants actuels et probablement futurs des [BRICS] ne souhaite ouvertement s’opposer à l’Occident. Toutefois, cela reflète l’ère qui s’annonce, où la politique de la plupart des États consiste à choisir constamment des partenaires pour résoudre leurs problèmes, et où il peut y avoir différentes contreparties pour différents problèmes”.
C’est la raison pour laquelle l’Inde, qui protège soigneusement sa ligne de “multi-alignement” – c’est-à-dire la coopération avec tout le monde – est également satisfaite d’un BRICS large et hétérogène. Delhi est moins intéressé par le renforcement des sentiments antagonistes au sein de la communauté des BRICS.
Indian Punchline, ibid.
Mais ce qui domine, pour un observateur non occidental :
Fondamentalement, il s’agit aujourd’hui de s’attaquer au phénomène du pétrodollar, pilier du système bancaire occidental et au cœur même du processus de “dédollarisation” visé par les BRICS. Il suffit de dire que le rideau tombe sur l’accord faustien du début des années 1970 qui a remplacé l’or par le dollar américain et garanti que le pétrole serait échangé en dollars, ce qui, à son tour, a obligé tous les pays à conserver leurs réserves en dollars, et s’est finalement transformé en principal mécanisme de l’hégémonie mondiale des États-Unis.
En d’autres termes, comment est-il possible de faire reculer le pétrodollar sans que l’Arabie saoudite ne monte aux barricades ? Cela dit, tous les États membres, y compris la Russie et l’Arabie saoudite, ont bien compris que si les BRICS sont “non occidentaux”, il est impossible de les transformer en une alliance anti-occidentale. Par conséquent, ce que nous voyons dans l’expansion des BRICS, c’est leur transformation en la communauté la plus représentative du monde, dont les membres interagissent les uns avec les autres en contournant la pression de l’Occident.
Indian Punchline, ibid.
Source : https://lecourrierdesstrateges.fr/2023/08/31/guerre-dukraine-jour-548-aucune-percee-ukrainienne-mais-une-inexorable-defaite-geopolitique-americaine/
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