09 juin 2023

Quelques pas dans le labyrinthe du simulacre


Un ancien secrétaire général de l’OTAN, le Danois Rasmussen, transformé en agent d’influence de haute volée et conseiller de Mister Z., évoque la possibilité d’une intervention de la Pologne réunissant autour d’elle une “coalition de volontaires” (les pays baltes). Puisqu’on reste entre pays de l’OTAN, ce serait dire à l’Ukraine : “puisqu’on refuse de te mettre dans l’OTAN, l’OTAN (une partie) viendra à toi”. Il paraît qu’on en parlera au sommet de l’OTAN, le 11 juillet à Vilnius, en présence de Zelenski. Simulacre dans le simulacre.
Le prédécesseur de Stoltenberg, le Danois Rasmussen, s’étant révélé comme un habile et zélé serviteur de l’Occident-laxatif, a suivi une voie doré, notamment en numéraires et en état d’âme, d’agent d’influence et de communication hors-cadre. Il a ainsi fait les ‘think tanks’ les plus agressifs et est devenu un familier des bandes de la direction ukrainienne ; d’abord un “familier” de l’ex-président Porochenko, puis, depuis les prémisses de la guerre de février 2022, un conseiller de Zelenski. Rasmussen est un bon relais de Washington, rayon département d’État et service neocon, de Bruxelles-UE et bien entendu de l’OTAN. Tout ce qu’il dit est par conséquent plus ou moins approuvé par l’une ou l’autre de ces brillantes autorités.

... D’où l’intérêt de sa dernière déclaration qu’un pays de l’OTAN, ou plutôt un “groupe de pays” de l’OTAN pourrait envoyer des forces en Ukraine pour nous aider là-bas, nous défenseurs des valeurs de la civilisation occidentale. Andrew Korybko saute sur cette affaire, où le nom de “Pologne”, – une des connaissances favorites de ce commentateur, – est cité :

« L'ancien secrétaire général de l'OTAN, Anders Rasmussen, a prédit que “si l'OTAN ne parvient pas à se mettre d'accord sur une voie claire pour l'Ukraine, il est tout à fait possible que certains pays prennent des mesures à titre individuel”. Il a ensuite émis l'hypothèse suivante : “Je pense que les Polonais envisageraient sérieusement d'intervenir et d'assembler une coalition de volontaires si l'Ukraine n'obtient rien à Vilnius”. »

Tout aussi vélocement, Korybko, dont la mémoire est à la fois considérable et infaillible, saute à nouveau, cette fois sur l’occasion de mettre en évidence un paradoxe bien surprenant, – et qui va s’avérer révélateur pour le développement d’une de ses théories sur la suite de la guerre en Ukraine :

« ...Aussi surréaliste que cela puisse paraître, ce même scénario prévisionnel avait jusqu'à présent été qualifié de “propagande russe” par des entités officielles de l'UE.

» La East StratCom Task Force (ESCTF), qui fait partie du Service européen pour l'action extérieure, a un projet appelé "EUvsDisinfo" dans le cadre duquel elle démystifie la soi-disant “propagande russe”. Elle a régulièrement affirmé que le scénario spécifique évoqué par l'ancien secrétaire général de l'OTAN était un “récit de désinformation pro-Kremlin récurrent”, suggérant ainsi de façon implicite que M. Rasmussen serait une “marionnette russe”. L'ESCTF n'avait bien sûr pas l'intention de le discréditer et devrait recalibrer sa narrative à la lumière de ses derniers propos.

» Le fait est que le même scénario qui a été précédemment dénoncé comme un “récit de désinformation pro-Kremlin récurrent” est maintenant crédité par nul autre que l’ancien chef du bloc militaire antirusse des États-Unis. Cela donne raison aux avertissements répétés du chef du service de renseignement extérieur russe, Sergei Narichkine, depuis le début de l'opération spéciale de son pays, selon lesquels la Pologne prépare une intervention militaire en Ukraine. »

Une question se pose donc : que s’est-il passé, qui fasse évoluer un « récit de désinformation pro-Kremlin récurrent » en une proposition audacieuse et novatrice d’un ancien secrétaire général de l’OTAN devenu officiel agent d’influence de l’Ouest-corruptif ? L’évidence même de la vérité-de-situation, qu’on est obligée d’accepter lorsqu’elle s’impose sur le terrain d’une guerre. Il apparaît de plus en plus évident que l’Ukraine ne peut gagner cette guerre, et qu’elle pourrait clairement la perdre... Or, l’Ukraine, c’est l’OTAN ! La perspective devient inacceptable et insupportable et le simulacre commence à prendre eau de toutes parts, – ce qui est inacceptable et insupportable !

On sait que l’Ukraine et son président, Mister Z. assisteront au sommet de l’OTAN du 11 juillet à Vilnius, exactement comme si l’Ukraine était membre de l’OTAN. Mais elle ne l’est pas, et elle ne le sera pas, ni d’ici là, ni même durant le sommet. Il faut donc chercher autre chose, telle est l’idée de Korybko interprétant avec finesse celle de Rasmussen et de quelques bandes expertes et diverses du bloc-BAO :

 « Le ministre britannique de la défense, Ben Wallace, a déjà déclaré au Washington Post lors d'une récente interview : “Nous devons être réalistes et dire que [l'adhésion de l'Ukraine à l'OTAN] n'est pas près de se produire : [L'adhésion de l'Ukraine à l'OTAN] ne se fera pas à Vilnius ; elle ne se fera pas de sitôt”, ce que même le président ukrainien Vladimir Zelensky a reconnu à contrecœur. C'est pourquoi le président français Emmanuel Macron a suggéré d'étendre les garanties de sécurité “tangibles et crédibles” à cette ancienne république soviétique lors du prochain sommet. »

C’est un peu la “solution sud-coréenne”, dans sa partie d’un pacte de défense mutuelle signée entre la Corée du Sud et les USA. Mais on sait Mister Z. et ses partisans, surtout dans l’Ouest-compulsif de ses nombreux et religieux soutiens, particulièrement soupçonneux de ces pactes du type-“chiffondepapier”. Alors intervient l’idée polonaise étendue à l’idée de la formation autour de ce pays elle d’une “coalition de volontaires” dont on se doute bien qu’il s’agit des trois pays baltes, et le tout envoyant des forces en Ukraine pour verrouiller tout cela.

«...La Pologne, qui aspire à devenir l'hégémon régional de l'Europe centrale et orientale, pourrait alors prendre l'initiative d'organiser la “coalition des volontaires” que Rasmussen a prédite afin d'étendre de facto le parapluie nucléaire de l'OTAN sur l'Ukraine.

» La présence officielle de troupes conventionnelles des États de l'OTAN dans ce pays pourrait servir à inspirer confiance dans les pactes de défense mutuelle de type coréen que les membres de l'Union pourraient bientôt proposer à l'Ukraine lors du sommet du mois prochain. En outre, elles pourraient également servir à geler la ligne de contact (LOC) en dissuadant les attaques russes par crainte qu'elles ne déclenchent indirectement l'article 5 si les forces de l'alliance sont touchées à la suite d'actions entreprises par le Kremlin, y compris en cas d'autodéfense. »

Certes, tout serait alors différent, de toutes les façons possibles, et du point de vue du Système si les choses se passaient de la sorte ; le simulacre en serait ragaillardi et l’on pourrait à nouveau parler de “victoire“. Se plaçant avec empathie à la place de ses adversaires, Korybko reconnaît volontiers qu’il s’agit d’une manœuvre absolument acceptable et tout à fait supportable.

« Tout bien considéré, il est parfaitement logique, du point de vue des intérêts militaro-stratégiques et narratifs de l'Occident, que la Pologne prenne la tête d'une “coalition de volontaires” en Ukraine dans le courant de l'été, en particulier si la contre-offensive de Kiev, soutenue par l'OTAN, ne parvient pas à faire bouger sérieusement la “Ligne de Contact” (LOC). Bien qu'il soit incroyablement dangereux d'augmenter les risques d'une guerre chaude entre l'OTAN et la Russie par erreur de calcul, ces dirigeants pourraient encore choisir de jeter les dés par désespoir pour obtenir quelque chose qui puisse être présenté comme une “victoire”.

» La Russie a prévu ce scénario il y a plus d'un an, mais ce n'est que récemment que d'autres pays que la Pologne ont eu intérêt à ce qu'il se produise. L’Occident qualifiait ces prévisions de “propagande russe” afin de faire croire à son public cible que rien de tel n'était en train de se tramer, jusqu’à ce que l'ancien chef de l'OTAN prédise aujourd’hui exactement la même chose que la Russie. Comme tout va très vite, cette prédiction pourrait bientôt se réaliser, mais il ne faut pas non plus la tenir pour acquise. »

Effectivement et avec sagesse, Korybko nous avertit bien que cette “prédiction” ne doit pas être “tenue pour acquise”. De même, bien entendu, il expose ici la théorie d’un éventuel projet de l’OTAN et des USA, – ou des plus durs et purs neocon à l’intérieur de l’OTAN, – sans évoquer les réactions de la Russie. Comme la Russie évoque cette possibilité depuis au moins un an, il est évident qu’elle se prépare à des réactions si la chose se concrétise. Pour elle , une telle opération reviendrait à une situation peut-être plus dangereuse encore que l’entrée de l’Ukraine dans l’OTAN et il paraît très inenvisageable et même complètement irréaliste qu’elle laisse faire sans réagir fermement et, disons, opérationnellement... Alors, le champ des possibles devient trop vaste et incertain pour qu’on s’hasarde à des prédictions à partir d’une prédiction.

Par contre, ce que montre cet épisode et cette possibilité, c’est à quel point l’Ouest-simulatif est pris à son propre piège de la nécessité d’une “victoire” dans le cadre d’un simulacre d’une extraordinaire complexité par rapport à la réalité qui se manifeste de façon de plus en plus entêtée sur le terrain de la guerre. Ce piège recèle de nombreuses possibilités d’échappée d’une situation incontrôlable vers des possibilités sinon catastrophiques pour le bloc-BAO, dans tous les cas extraordinairement déstructurantes pour lui avec une dynamique d’une déstabilisation au second degré d’une situation déjà hyper-déstabilisée. Si l’on ignore les possibilités et les effets d’une telle opération en Ukraine même, l’on peut être sûr qu’il s’agit d’une perspective propre à diviser le camp otanien jusqu’à menacer la cohésion, voire l’existence de l’OTAN et de l’UE, et à réduire encore plus, et toujours plus vite, le faible crédit des pays de l’ensemble américaniste-occidentaliste dans le reste du monde. Il s’agit de la poursuite et de l’accélération d’une course toujours plus effrénée vers l’accomplissement de l’effondrement.

... Car, comme dit Mercouris à ce propos comme à tant d’autres :

« Les neocon ne reculent jamais. Si l’opération qu’ils ont lancée réussit, ils choisissent l’escalade. Si l’opération qu’ils ont lancée rencontre de grandes difficultés, ils choisissent l’escalade. »

 Source

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Remarque : Seul un membre de ce blog est autorisé à enregistrer un commentaire.