Il fut un temps où l’Union européenne rejetait les sanctions secondaires que les États-Unis utilisaient pour pousser les pays tiers à suivre leurs régimes de sanctions contre d’autres pays :
Profitant de la position centrale des États-Unis dans l’économie mondiale, ils ont imposé des « sanctions secondaires » aux entreprises étrangères, qui sont obligées de choisir entre commercer avec les pays visés par les sanctions américaines ou perdre l’accès au lucratif marché des États-Unis. En outre, les États-Unis ont pénalisé les entreprises étrangères qui enfreignent la législation américaine sur les sanctions.
Pour contrer ces mesures extraterritoriales, l’UE avait introduit un mécanisme de blocage :
La légalité de ces sanctions peut être contestée devant divers mécanismes judiciaires nationaux et internationaux, bien que chaque mécanisme ait ses propres limites. Pour contrer les effets négatifs des sanctions secondaires, les États tiers et l’UE peuvent également utiliser, et ont déjà utilisé, divers mécanismes non judiciaires, tels que les lois de blocage, les véhicules spéciaux destinés à contourner la portée des sanctions, ou même les contre-mesures.
Les lois de blocage interdisent aux entreprises de l’UE de se conformer aux sanctions américaines :
Conformément à l’art. 5(1) du Règlement de blocage de l’UE, il est interdit aux opérateurs de l’UE de se conformer « à toute exigence ou interdiction, y compris les demandes de tribunaux étrangers, fondées sur ou résultant, directement ou indirectement » d’un ensemble de lois sur les sanctions étrangères considérées comme s’appliquant de manière extraterritoriale par l’Union européenne, « ou d’actions fondées sur ces lois ou résultant de celles-ci« . Les lois en question sont énumérées dans l’annexe du règlement ; à l’heure actuelle, il s’agit de toutes de lois américaines. L’art. 5, paragraphe 2, prévoit que la Commission européenne peut, sur demande, autoriser les opérateurs de l’UE à se conformer totalement ou partiellement à ces lois, dans la mesure où le non-respect porterait gravement atteinte à leurs intérêts ou à ceux de l’Union européenne.
En 2018, la Commission a mis à jour l’annexe du règlement de blocage de l’UE afin d’y inclure les sanctions secondaires américaines (réimposées) contre l’Iran. Elle a également adopté un règlement d’exécution établissant les critères qui seraient pris en compte pour l’octroi des autorisations de mise en conformité, et a publié une note d’orientation sur l’application du règlement de blocage de l’UE réactivé.
La loi de blocage a été utilisée pour rejeter les sanctions imposées par les États-Unis à l’encontre de l’Iran après que les États-Unis ont quitté l’accord nucléaire.
Maintenant, l’UE est devenue folle et envisage elle-même d’introduire des mesures extraterritoriales contre les pays qui ne suivent pas son propre régime de sanctions contre la Russie :
L’Union européenne discute d’un nouveau mécanisme de sanctions destiné à cibler les pays tiers qui, selon elle, ne font pas assez pour empêcher la Russie de se soustraire aux sanctions, en particulier ceux qui ne peuvent pas expliquer les hausses des échanges de biens ou de technologies clés, selon des personnes au fait du dossier.
L’objectif premier de cet outil serait de dissuader les pays d’aider la Russie et de réprimer les canaux commerciaux que Moscou pourrait exploiter, ont déclaré ces personnes. Si cela ne fonctionne pas, le bloc aurait la possibilité, dans un deuxième temps, d’imposer des restrictions ciblées sur des produits clés.
…
Le nouveau mécanisme d’application, dont certains aspects ont d’abord été rapportés par le Financial Times, donnerait aux États membres le pouvoir de créer deux listes – l’une de pays tiers affectés et l’autre de marchandises interdites.
Si le mécanisme est approuvé par les gouvernements nationaux, les décisions concernant les pays et les marchandises à inscrire sur les listes seront prises à l’unanimité par les États membres. Il est peu probable que les mesures ciblent la Chine dans un premier temps, mais elles se concentrent principalement sur les pays d’Asie centrale et les voisins immédiats de la Russie, ont ajouté ces personnes.
Par ailleurs, le train de mesures proposé permettrait de sanctionner plus facilement les entreprises de pays tiers qui contournent les sanctions de l’UE.
Les politiciens et bureaucrates de l’UE à Bruxelles sont en train de tuer leur propre défense morale contre l’application par les États-Unis de sanctions secondaires à l’encontre de tiers.
Comment pourront-ils encore défendre leur propre loi de blocage ? En outre, que feront-ils lorsque des pays tiers, comme la Turquie ou la Chine, introduiront leurs propres lois de blocage contre les sanctions secondaires de l’UE à l’encontre de leurs entreprises ?
Moon of Alabama
Traduit par Wayan, relu par Hervé, pour le Saker Francophone
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