Tout le monde sait qu’à la grande époque du charbon, les mineurs descendaient avec un canari dans la mine. La petite bête était la première à mourir quand des gaz délétères commençaient à envahir les galeries. Si le canari mourait, les mineurs essayaient de retourner à la surface avant que le coup de grisous ne tue ceux qui n’avaient pu s’échapper à temps.
Depuis des années, je soutiens que les banques remplissent ce même office dans les systèmes capitalistes. Et le but de ce papier est de démontrer une fois encore cette réalité.
Commençons par le début (ce qui est souvent une bonne idée) : à quoi sert une banque ?
Revenons aux bases essentielles de tout système économique : d’un côté nous avons mes petites fourmis travailleuses qui épargnent pour leurs vieux jours et qui peuvent avoir besoin de leur argent à tout moment et de l’autre des besoins d’investissements à long terme dont on espère qu’ils seront très rentables mais qui sont parfaitement illiquides.
Ce qui m’amène à la première question ?
Que fait une banque qui soit utile aux autres agents économiques.
Voici la réponse. La banque est l’intermédiaire qui accepte de prendre et le risque du temps et les risques de défaut de ceux à qui elle a prêté l’argent des dépôts.
La banque va commencer par emprunter l’argent des fourmis sous forme de dépôts et elle garantit qu’à tout moment n’importe lequel des déposants pourra retirer tout son argent quand il le voudra. Ayant emprunté cet argent, elle doit ensuite le placer à un taux supérieur à celui qu’elle paiera aux déposants et ce taux doit couvrir d’abord les frais de fonctionnement de la banque (intérêts payés aux déposants, salaires loyers etc..) et ensuite les deux risques que prend la banque
- Le risque du temps. La banque prête à long terme des actifs à court terme, ce qui peut être très dangereux si les fourmis veulent leur argent toutes à la fois. C’est pour contrer ce risque que les banques centrales ont été créées, leur rôle étant de fournir du cash pendant les paniques bancaires en contrepartie des actifs à long terme que la banque a accumulé. Une telle crise s’appelle une « crise de liquidités» et les banques centrales savent très bien traiter ce genre de problèmes. C’est ce que nous venons d’avoir avec les banques aux USA.
- Le risque de non-remboursement des prêts qu’elle a consentis. Prêter à des gens qui se retrouvent en faillite quelque temps après, bien incapables de rembourser leurs dettes, voilà quel est le danger mortel pour une banque. Cela s’appelle une « crise de solvabilité » et la situation est sans espoir si les pertes sont supérieures au capital de la banque. Dans ce second cas, il faut fermer la banque et les déposants perdent leurs dépôts, ou en tout cas la partie de ces dépôts qui ne seraient pas assurés.
Quelle va être la réaction des marchés financiers à chaque type de risque ?
La réponse est simple.
Dans le cas d’une crise de liquidités, les marchés financiers baissent brutalement (krach) et cette baisse est une occasion d’achat. Dans ce premier cas, il faut racheter les financières pendant la panique.
Si nous avons affaire a une crise de solvabilité, la situation est totalement différente, nous avons affaire à un cancer plutôt qu’à un arrêt du cœur et les dégâts sont beaucoup plus importants à moyen et long terme sur l’économie et les marchés financiers. Dans ce second cas, il faut éviter les financières comme la peste.
La différence entre les deux est que la crise de liquidités est très difficilement prévisible ,alors que l’on voit arriver la crise de solvabilité littéralement des années à l’avance, en analysant le cours des banques dans les marchés financiers. Une crise de solvabilité s’annonce par une sous performance constante des actions du secteur bancaire créée par d’énormes erreurs monétaires ou budgétaires.
Je vais consacrer ce papier aux crises de solvabilité.
Pour ce faire, je vais utiliser l’indice des banques américaines cotées à Wall Street pour lequel je dispose des cours journaliers depuis 1927.
Et je vais montrer que quand les banques voient leurs cours sous performer le placement sans risque qu’est l’or pendant 7 ans au moins, cela veut dire que l’économie est malade puisque le travail d’intermédiation des deux risques n’est plus rentable.
Et je diagnostique un cancer, c’est-à-dire une crise de solvabilité.
Voici le premier graphique.
TOUTES les périodes hachurées en rouge, c’est-à-dire les moments où les banques faisaient moins bien que l’or depuis 7 ans au moins, ont été des périodes de grandes tensions financières aux USA : La grande dépression,
L’entrée en guerre des USA,
La grande inflation des années 70,
La grande crise financière de 2008,
la première crise de l’euro de 2011,
le Covid…
Et à chaque fois les marchés des actions ont fortement baissé comme le montre le graphique suivant.
Dans le deuxième graphique, j’ai laissé les périodes hachurées rouges et grises (crises de solvabilité et récessions) que j’avais sur le premier graphique et la ligne noire représente le ratio entre l’indice des actions US et l’or.
Chaque crise de solvabilité (hachures rouges) a été accompagnée par des baisses monstrueuses des marchés financiers… sauf si les banques se mettaient à surperformer, ce qui nous sortait de la zone rouge.
Hélas, nous venons de rentrer dans une nouvelle période rouge et je ne crois pas que les banques vont surperformer l’or dans les mois qui viennent.
Comme je n’ai cessé de le dire depuis des mois, le danger se précise et il est nécessaire de protéger les actions aux USA avec de l’or et des obligations chinoises (Cf les articles sur le portefeuille IDL).
Le risque que nous ayons devant nous aux USA une baisse assez forte des marchés financiers reste entier.
Mais au moins, aux USA, les fonds propres des banques ont été reconstitués depuis la dernière crise de solvabilité, celle de 2008-2009 puisque de 2012 à 2022, les banques ont fait mieux que l’or. (Voire le premier graphique)
Là où le danger est le plus grand est sans doute la zone euro.
Là, à l’évidence, nous n’avons eu aucune reconstitution des marges bancaires.
Que le lecteur veuille bien considérer mon dernier graphique.
Depuis 2004, le cours des banques européennes n’a cessé d’être sous sa moyenne mobile sauf de 2016 à 2018.
- Ce qui implique que cela fait seize au moins que les banques dans la zone euro ne gagnent plus d’argent en intermédiant le temps et le risque.
- Ce qui veut dire que le capital de ces banques a dû fondre comme neige au soleil. La situation financière de ces banques est d’autant plus préoccupante que ce qui leur reste de capital est investi dans les obligations des États de la zone euro, dont un grand nombre ne pourront rembourser cette dette.
Une nouvelle crise de solvabilité en France ou en Italie porterait sans nul doute un coup mortel à de nombreux établissements financiers dans la zone euro, sans que la BCE puisse intervenir puisque la BCE, sous l’influence de la Bundesbank, a décidé de mettre en priorité la lutte contre l’inflation.
Continuez donc à surveiller l’indice des bancaires de la zone Euro (SX7E) et le cours de l’or.
C’est eux qui nous renseigneront bien mieux quels n’importe quels économistes ou banquiers centraux.
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