13 mars 2023

La Russie sous-estime dangereusement Ursula von der Leyen

L’une des figures clés de la nouvelle guerre froide, Ursula von der Leyen, devrait le rester même après sa démission du poste de présidente de la Commission européenne. Maintenant, elle est pressentie pour le poste de secrétaire général de l’OTAN, du moins c’est ce que les États-Unis aimeraient. Quelle est la probabilité que Madame von der Leyen fasse avec l’OTAN ce qu’elle a fait avec la Bundeswehr antérieurement, c’est-à-dire la priver de sa capacité de défense ?

Au cours de l’année écoulée, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, est devenue en Russie comme un ennemi sans équivoque, ou du moins comme un symbole de la politique antirusse que mène Bruxelles en faveur des États-Unis et au détriment des pays de l’UE. En tant que telle, elle est très appréciée des Américains. En Fédération de Russie, une attitude dédaigneuse domine, la concernant. Le profane ne se souvient que de trois choses à propos de Frau Ursula : elle aide à armer les forces armées ukrainiennes ; elle administre les sanctions antirusses et elle est également gynécologue. Ce dernier point illustre le fait que ce sont des « amateurs » qui ont pris en main la politique étrangère de l’Europe.

Malheureusement, la gynécologie et les attributs médicaux d’Ursula relèvent d’un passé lointain. C’est une « top manager » coriace et technique. Du point de vue du client (c’est-à-dire de Washington), c’est très efficace. Sa formation médicale n’est pas la seule. Leyen a également étudié l’économie et les sciences politiques. Elle pouvait se le permettre, car elle est née avec une cuillère en or dans la bouche et elle est la chair de la chair de l’élite européenne. Ses ancêtres avec le nom de famille Albrecht « s’inscrivaient » dans cette élite du 17e siècle. Son père était un homme politique de premier plan. Son mari est également médecin et lui aussi est issu d’une ancienne famille marquée du sceau de « l’argent ancien ». Des familles comme celle de Frau Chairman ont façonné le destin du continent pendant des siècles.

Une ascension politique sous le parrainage de Merkel

Mais Ursula n’est pas non plus une « fille à papa ». Elle faisait déjà carrière en politique au parti  CDU, lorsque son père, l’ancien Premier ministre de Basse-Saxe et président du Bundesrat (Sénat), non seulement a pris sa retraite, mais est également tombé malade de la maladie d’Alzheimer. Angela Merkel est celle à qui Ursula doit vraiment son ascension. Pendant presque toute la période de sa chancellerie, Leyen a été l’une des adjointes de Merkel pour le parti et un ministre dans tous ses gouvernements. Commençant un ministère social (pour les femmes et les familles), huit ans plus tard, elle a dirigé la Bundeswehr (la première femme à ce poste) et de là, sous le parrainage de Merkel, elle est passée au poste de chef du gouvernement paneuropéen.

Au début, le choix en faveur d’Ursula a été considéré dans l’UE comme un grand succès et presque une providence : elle a été accusée de plagiat pour sa thèse de médecine, personne n’a annulé sa formation médicale. Deux mois seulement après sa nomination et son entrée en fonction, la pandémie a commencé. Mais sa « meilleure heure » a été la lutte non pas contre le coronavirus, mais contre la Russie. Sans résignation, mais avec constance, l’Union européenne impose des sanctions, pousse son industrie à se déplacer vers les États-Unis et fournit des armes aux forces ukrainiennes, détruisant ses propres forces armées.

Frau Ursula a détruit la Bundeswehr et l’a rendue dépendante de Washington et de l’OTAN

Dans le pays d’origine d’Ursula, ces forces, en tant qu’armée autosuffisante, ont déjà été complètement détruites, la Bundeswehr n’est pas prête au combat. Ce n’est pas une insinuation, c’est la position officielle du ministère allemand de la Défense. Le rôle d’Ursula, qui a dirigé le département pendant cinq ans et demi, a été décisif : les forces armées ont été ruinées par un manque chronique de financement. Il semblerait que ce soit la véritable confirmation des talents managériaux de Leyen. 

Mais il y a une nuance : la Bundeswehr n’est pas capable de combattre seule, elle a besoin du soutien des États-Unis et de l’infrastructure de l’OTAN. Qui a dit que la dépendance croissante vis-à-vis de Washington n’était pas la tâche principale de Leyen dans le gouvernement ouvertement pro-américain de Merkel ? S’il en est ainsi, Frau Ursula s’est acquittée de sa tâche, ainsi que de celle d’aligner les gouvernements européens sur une même ligne politique pour « contrer la Russie ».

Maintenant, elle envisage de diriger le secrétariat général de l’OTAN et de continuer dans le même esprit. Le journal italien, La Repubblica, considère les chances de Leyen comme une priorité et qualifie le président de l’UE de principal favori des États-Unis dans la lutte pour le poste de secrétaire général. Le voyage d’Ursula en Amérique cette semaine est présenté comme l’octroi d’une « bénédiction pour régner ».

Le risque est grand que l’une des capitales européennes expriment son véto à un deuxième mandat

Il est probable que Washington serait plus que satisfait du second mandat d’Ursula à la tête de la CE, mais cela pourrait néanmoins occasionner des difficultés. Si Frau Chairman faisait autant pour l’Europe que pour l’Amérique, il n’y aurait pas d’obstacles. Mais parmi les membres de l’UE (et n’importe quel pays peut opposer son veto), il y a des insatisfaits, et plus important encore, des insatisfaits à juste titre. D’ici la fin de 2024, à l’expiration du premier mandat, les résultats de ses activités destructrices pour l’Europe risquent de devenir encore plus visibles. Le risque est donc grand qu’une des capitales européennes (par exemple Budapest) exprime son véto. L’opinion prévaut donc chez ses détracteurs que Madame von der Leyen ne devrait pas être nommée pour un second mandat de président de l’UE.

Dans une alliance nord-atlantique dominée par les États-Unis, de telles probabilités en termes de véto sont faibles. Par conséquent, Ursula n’a pas de véritables concurrents. L’ex-Premier ministre britannique Boris Johnson, qui a fait acte de candidature, est détesté par beaucoup dans l’UE, et surtout par le président français Macron. Et à Bruxelles, ainsi que parmi de nombreuses femmes politiques d’Europe de l’Est, l’on considère que la priorité serait de désigner une femme comme nouvelle Secrétaire générale de l’OTAN.

Ursula est à la fois une femme et un « cheval » expérimenté sur le chemin de la traversée, et pro-américaine jusqu’à la moelle des os. C’est-à-dire qu’elle satisfait à tous les critères principaux. Soit dit en passant, Frau von der Leyen a elle-même sept enfants. C’est assez atypique pour les sommets modernes de la politique européenne (dont un exemple est Merkel ou Macron, sans enfants). Et c’est une autre confirmation que l’intelligence et la performance de cette femme ne doivent pas être sous-estimées.

Il n’y a que deux choses qui peuvent l’arrêter

La première est l’absence (jusqu’à présent) de garanties qu’au sommet de l’OTAN en juin, il sera possible de prolonger d’un an les pouvoirs de l’actuel secrétaire général Jens Stoltenberg. Il était censé partir l’été dernier, mais est resté « en raison de circonstances spéciales » de l’Opération spéciale. Si une prolongation n’est pas convenue une deuxième fois, l’OTAN aura un nouveau secrétaire général en 2023, et alors ce ne sera pas Ursula, elle n’a personne à qui passer le relais à la Commission européenne.

Et la deuxième circonstance est déterminée par l’armée et la marine russes. Ce n’est que sur eux, sur leur capacité à repousser la probable contre-offensive printanière des Forces armées ukrainiennes et à résoudre pleinement les tâches du NMD, que dépend la position des forces « sur le terrain ». Et de lui, à son tour, dépendra des perspectives des dirigeants actuels parmi les atlantistes, à la fois le secrétaire général de l’OTAN et le chef de la Commission européenne, et peut-être les perspectives de l’UE et de l’OTAN dans son ensemble.

Il semble douteux que Washington autorise en tout cas un « camouflet », c’est-à-dire l’exclusion de la candidature d’Ursula. C’est une négociatrice solide et expérimentée, et pas seulement un gynécologue et homonyme de la sorcière du dessin animé de Disney sur la petite sirène.

Certes, Ursula n’est pas seulement une sorcière, mais aussi le principal antagoniste européen à l’égard de la Russie. Et la vraie Ursula n’est que la deuxième antagoniste la plus importante après le président des États-Unis d’Amérique.

Source : https://lecourrierdesstrateges.fr/2023/03/13/la-russie-sous-estime-dangereusement-ursula-von-der-leyen-par-dmitri-bavyrine/

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