Élisabeth Borne et Olivier Véran se sont livrés, ce dimanche 26 mars, à de véritables provocations vis-à-vis de l’opinion. En réalité, c’est signé Emmanuel Macron. Le Président s’obstine à jeter de l’huile sur le feu mais il ne sent plus le pays – a-t-il d’ailleurs jamais senti ce pays qu’il n’aime pas et envers lequel il ne ressent aucune filiation? Les symptômes s’accumulent d’une colère montante de l’opinion. Et les signaux d’un état d’esprit « révolutionnaire » ne sont plus faibles ! La France est en train de basculer, tandis qu’Emmanuel Macron commence à concentrer les attaques sur sa personne.
En début de soirée, Elisabeth Borne a fait savoir qu’elle recevrait partis et groupes d’opposition la semaine du 3 avril. Et les syndicats la semaine du 10 avril – mais non pour parler de la réforme des retraites. Le Premier ministre entend montrer que le gouvernement n’est pas sous pression.
Et, dans le Journal du Dimanche, Olivier Véran affirmait, ce 26 mars, avec aplomb: « La réforme des retraites n’est pas la retraite des réformes ». Le Premier Ministre et le porte-parole du gouvernement font dans la provocation!
Le « Qu’ils viennent me chercher ! » de trop?
Madame Borne et Monsieur Véran donnent l’impression de n’avoir pas lu les sondages (ici et ici). Ou bien, ils se jugent – et donc le Président avec eux – invulnérables.
Emmanuel Macron réédite son tristement fameux « Qu’ils viennent me chercher! » du moi de juillet 2018, lorsque démarrait l’affaire Benalla. Il pense que tout lui réussira toujours puisqu’il a surmonté non seulement le scandale Benalla mais aussi la crise des Gilets Jaunes, le COVID-19 et qu’il a été le premier président de la Vè République réélu au terme d’un quinquennat.
Et si c’était le défi de trop ?
Selon un sondage de l’institut Elabe publié ce jeudi 23 mars par BFMTV, 7 Français sur 10 “qui ont vu, écouté ou entendu parler de l’interview du président” n’ont pas trouvé le chef de l’Etat convaincant. Et 61% des sondés estiment que ses propos, tenus mercredi 22 mars, vont attiser la colère plutôt qu’apaiser les esprits. Et on ne sera pas surpris d’apprendre que, dans le cas de législatives anticipées, le Rassemblement National et la NUPES ferait jeu égal, au premier tour, avec environ 26% des suffrages, tandis que Renaissance reculerait de cinq point, à 22%.
Une tolérance de la violence des manifestants en hausse dans l’opinion
Cependant le bout de sondage le plus significatif est celui qui concerne une éventuelle approbation de violence commises par des manifestants: il n’y avait que 15% des Français à répondre positivement lors de la crise des Gilets Jaunes. Un sondage LCI du 22 mars donne une approbation de 20%, soit cinq points de plus.
Un Français sur cinq qui ne désapprouve pas la violence ou, du moins, la considère comme un mal nécessaire lié au refus de négocier du gouvernement! Et ceci dans un tableau d’ensemble où, quel que soit l’institut de sondage, environ deux tiers des personnes interrogées jugent qu’il serait plus raisonnable de suspendre cette loi qui n’a pas vraiment été votée.
Cela ne peut s’expliquer que par le sentiment de blocage politique et d’impossibilité de se faire entendre.
Depuis le début, le pouvoir a joué la provocation vis-à-vis des courants d’opinion hostiles à la réforme des retraites. Néanmoins, l’attitude d’Emmanuel Macron et d’Elisabeth Borne témoigne d’un pouvoir qui se raidit de plus en plus. Il semble bien que le Président et son Premier ministre ne sentent plus du tout le pays – s’ils l’ont jamais senti (à tous les sens de l’expression).
Le rejet croissant des violences policières
A l’inverse, le rejet des violences commises par les forces de l’ordre est plus articulé et plus élevé qu’il ne l’a jamais été durant la crise des Gilets Jaunes.
Nous ne parlons pas ici de l’épisode de Sainte-Soline, sur lequel Eric Verhaeghe revenait en début de soirée et où les forces de l’ordre ont fait face à des militants particulièrement organisés. Nous avons en tête en l’occurrence la violence largement asymétrique déployée contre des manifestants opposés à la réforme des retraites, dans leur immense majorité pacifiques.
Tirons simplement trois tweets du fil « Anonyme Citoyen », qui fait un patient travail d’information sur les manifestations depuis la crise des Gilets jaunes:
Faut-il dès lors s’étonner qu’une pétition ait été mise en ligne sur la « plateforme citoyenne » de l’Assemblée Nationale pour demander la dissolution de la BRAV-M. Elle a receuilli, à l’heure où nous écrivons, plus de 50 000 signatures. Et l’on peut penser que le nombre va grimper si certaines informations sont confirmées, comme la perte d’un oeil par un manifestant syndiqué à « Sud-Rail ».
Un mouvement social de plus en plus hors de contrôle pour le gouvernement
Non seulement le gouvernement parraine des pratiques policières illégales, mais il ne semble plus se rendre compte des mouvements de terrain qui ont commencé.
Mentionnons tout d’abord la désapprobation internationale croissante. Des manifestations ont eu lieu notamment à Berlin, à Athènes, à Santiago du Chili, pour protester contre la répression en France. Il y a aussi des hashtags populaires, favorables aux manifestants français, comme « FranceProtest ». Pour un chef de l’Etat qui a construit sa réputation sur le soutien international dont il disposait, les revers s’enchaînent. La nécessité d’annuler la visite du roi Charles III en France est un terrible aveu d’échec.
Puisque nous parlons de la Grande-Bretagne, renvoyons au remarquable livre de Pierre-Antoine Gouiffès sur les affrontements entre mineurs et gouvernement dans la Grande-Bretagne des années 1972-1985, paru en 2007 mais qui nous rappellera opportunément comment la grève des éboueurs de 1979 à Londres, fut un signal particulièrement évident de la manière dont le gouvernement travailliste avait perdu le contrôle de la situation. Regardez cette photo:
Ce n’est pas Paris 2023 mais Londres 1979. La signification politique est cependant la même, au moment où la grève des éboueurs a duré une semaine entière à Marseille et où l’on apprend qu’elle va s’étendre à cinq nouveaux arrondissements de Paris. Et l’on remarquera cette scène, qui en dit long, de Parisiens excédés venant accumuler leurs sacs d’ordure non ramassés devant le Ministère de l’Enseignement Supérieur, rue Descartes, dans le 5è arrondissement. Quel désaveu pour une caste dirigeante se vantant d’appartenir aux « sachants » et méprisant les « gens qui ne sont rien », les « ouvrières illettrées » et les « Français qui fument des gauloises et roulent au Diesel »:
Au stade de France, un « Macron démission » prémonitoire?
Sur tout le territoire, les signes de blocages voire d’insurrection se multiplient. Un blocage total du « Grand Ouest » est même annoncé pour la nouvelle journée de mobilisation mardi 28 mars: des opérations « ville morte » sont annoncées à Saint-Nazaire, Nantes, Saint Brieuc, Brest, Lorient, Rennes, Caen, L’approvisionnement en carburant est toujours sous tension, du fait du blocage de plusieurs raffineries.
Avant même la nouvelle journée de mobilisation intersyndicale de mardi 28 mars, la journée du samedi 25 mars a été marquée par de nombreux défilés, et des rassemblements jusque tard dans la soirée. En réalité, les rassemblements spontanés en soirée n’ont pas cessé depuis le 16 mars, jour du débat sur le 49-3 à l’Assemblée.
Notons, enfin, pour finir ce tableau provisoire, que des « Macron démission » ont été scandés, samedi soir 25 mars au stade de France pendant le match France-Pays-Bas. Feu de paille? Ballon d’essai? Pour nous, plutôt le signe qu’un feu plus important couve. Emmanuel Macron a déchaîné des forces qu’il ne peut plus maîtriser.
Le propre des évolutions révolutionnaires, c’est l’impossibilité de les décrire à l’avance. Peut-être sommes-nous au début d’un cycle qui durera deux ou trois ans. Peut-être est-ce au contraire une question de semaine. En tout cas, une chose est sûre, le pouvoir macronien est à l’agonie, malgré les rodomontades de tel ou tel. Et une révolution a commencé.
Implacablement, par l’arrogance et l’aveuglement du pouvoir macronien, la France est en train de basculer dans une nouvelle ère politique, qui rebattra les cartes complètement.
Gardez la crise bancaire en arrière-fond
Bien évidemment, les événements qui se déroulent en France sont cruciaux pour l’avenir du pays. Ils illustrent la fébrilité du rapport entre les forces en présence, avec d’importants revirements (encore inattendus il y a peu) à anticiper. Mais il ne faudrait pas oublier le contexte négatif qui domine les marchés financiers, dont nous avons suggéré qu’il était largement expliqué par une intention finale de faciliter la mise en place des monnaies numériques.
Il faudra suivre cette semaine, et dans les jours à venir, l’évolution des valeurs bancaires. Nous maintenons notre pronostic d’une sévère correction d’ici à octobre 2023, qui impactera douloureusement le marché de l’assurance-vie. Suivez nos conseils (dès demain) pour protéger votre épargne en conséquence.
Source : https://lecourrierdesstrateges.fr/2023/03/27/est-ce-une-revolte-non-emmanuel-cest-une-revolution/
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