De façon très symptomatique, c’est dans une parfaite simultanéité que, en France, la crise des retraites entre dans une phase cruciale et, aux Etats-Unis, la 16è banque du pays fait défaut, marquant le début d’une crise obligataire qui devrait avoir des conséquences dévastatrices. Dans ce grand projet mondialiste qu’était le Great Reset, fondé sur un retour du Big Government, de l’autorité sans partage du pouvoir exécutif et sur le recours intempestif à la planche à billets, les failles apparaissent désormais, et les déséquilibres commencent à perturber de façon systémique l’équilibre général de l’Occident.
La faillite de SVB, un risque majeur pour l’équilibre financier en Occident
L’histoire produit parfois de ces coïncidences et de ces accélérations qui sont comme un coup de vent sur un balancier, capable de balayer un funambule au-dessus du sol. Coup sur coup, la faillite inattendue de la Silicon Valley Bank, 16è banque américaine, et le fiasco des retraites en France, présenté par le cartel de la presse subventionnée comme une victoire parlementaire pour le Président Macron (l’Express en donne un merveilleux exemple) montrent que l’affirmation autoritaire des « Big Government » qui ont gavé l’Occident d’argent facile sous le prétexte facile et trompeur de combattre la pandémie débouchent aujourd’hui sur de graves déséquilibres dont nous ne sortirons que par des crises majeures, politique et économique.
Vers une dissolution de l’Assemblée Nationale ?
Laborieusement, le Sénat a fini par adopter la réforme des retraites dont on rappelle la principale logique : ceux qui ont cumulé 43 annuités peuvent partir à la retraite à partir de 64 ans, au lieu de 62. Les autres doivent attendre 67 ans.
Toutefois, le chemin de croix d’Olivier Dussopt et d’Elisabeth Borne est loin d’être achevé. Une Commission mixte paritaire (CMP) doit se réunir mercredi pour accorder les violons de l’Assemblée et du Sénat. Si la fumée est blanche, le texte devra encore être voté par l’Assemblée et par le Sénat dans sa version finale. Si la fumée est noire, le dernier mot reviendra à l’Assemblée, qui n’a jusqu’ici pas pris position sur le texte, du fait de la bataille parlementaire menée par la France Insoumise.
Pour le gouvernement, la prise de risque est maximale, puisque sa majorité est très incertaine.
Durant tout le week-end, le débat a sévi autour d’Elisabeth Borne sur le recours ou non à l’article 49-3 de la Constitution. L’affaire était bien engagée, jusqu’à ce que le Rassemblement National n’annonce qu’une réflexion commune aux partis d’opposition n’était en cours pour voter une motion de censure commune. Il n’en fallait pas plus pour que le gouvernement fasse machine arrière et ne revienne sur ses positions :
Élisabeth Borne a indiqué que « des points d’équilibre seront trouvés », pour voter le texte. Et de poursuivre : « Si la CMP est conclusive, comme nous le souhaitons avec la majorité présidentielle, le texte retournera au Sénat puis à l’Assemblée nationale pour un vote final » et « je suis sûre qu’il existe une majorité au Parlement pour voter ce texte », a-t-elle déclaré. Elisabeth Borne, in le JDD
Voilà donc, la messe serait dite, dans l’odeur du sang, de la sueur et des larmes. Mais le gouvernement nous a habitués à tant de pantalonnades depuis trois mois, sur ce sujet, que l’on attend la réalisation du plan avec délectation.
Dans la pratique, on voit mal comment un système aussi chaotique pourrait durer. Même si Macron ne recourt pas au 49-3, le passage à la dissolution de l’Assemblée Nationale paraît désormais inévitable dans les semaines qui viennent. C’est d’autant plus vrai que l’Assemblée doit maintenant discuter d’un autre texte clivant, sur l’immigration. En tirant excessivement sur la corde, Macron finira bien par la casser.
Crises
En réalité, on arrive au bout d’un système occidental fondé sur l’endettement massif des Etats. Amorcé dans les années 1970, avec la suppression du lien entre le dollar et l’or, l’économie mondiale s’est progressivement construite sur un empilement de crédits.
Ce sont d’abord les USA qui se sont endettés à volonté, profitant du fait que l’économie mondiale avait besoin de dollars pour alimenter sa propre croissance. Progressivement, tout le monde occidental a copié le modèle américain. Même les pays plus vertueux, comme l’Allemagne, se sont laissés entraîner dans la spirale de la création monétaire et de l’endettement – par l’intermédiaire de l’euro.
Regardons bien où sont allés les dollars fabriqués depuis les années 1970: (1) dans le gigantesque budget de la défense américain, ses marchés captifs pour l’industrie de la défense et la bureaucratie toujours plus énorme du Pentagone. (2) dans la dette toujours plus marquée des pays occidentaux – la France étant devenue, de Chirac à Macron, un triste exemple d’endettement public pour compenser les pertes de compétitivité. (3) dans les caisses des banques centrales de tous les pays servant d’atelier industriel aux Etats-Unis et à l’Union Européenne, à commencer par la Chine. (4) dans des activités non-productives comme le sport avec à la clé le dopage toujours plus monstrueux. (5) dans des bulles successives, qui ont éclaté les unes après les autres: les marchés d’actions jusqu’au krach de 1987; la nouvelle économie, jusqu’à l’éclatement de la bulle de 2001; les subprimes qui ont mené à la crise de 2007.
La création monétaire et l’endettement public sont devenus de véritables drogues. Et à chaque fois qu’il y a une crise, au lieu de sevrer, on a augmenté les doses. On n’a jamais autant créé d’endettement qu’après la crise de 2007-2008 – avec une politique de taux bas voire zéros et même négatifs. .
La crise du COVID-19 a posé les germes d’une nouvelle crise, encore plus systémique que celle de 2007-2008: en face d’une création monétaire et d’un endettement public toujours plus fous, il y a eu, pendant de longs mois, une interruption de l’activité et du commerce. Avec toutes les conséquences inflationnistes que l’on sait. Au point que les banques centrales n’ont pas eu d’élément d’alternative à une remontée des taux.
La Silicon Valley, première victime de la remontée des taux
Et c’est vrai que la pandémie de coronavirus, avec sa brillante gestion par la caste à coup d’helicopter money, a gorgé d’argent facile les entreprises de la « tech ». C’était un gimmick depuis plusieurs mois que de se féliciter, dans les milieux financiers, de cette crise sanitaire qui a permis de gagner autant en si peu de temps, et avec si peu d’efforts.
Vous avez chanté tout l’été ? Dansez maintenant. Nous avons expliqué par quel mécanisme la faillite était survenue à la Silicon Valley Bank, prise en tenaille entre les premiers retraites d’argent de la golden generation qui a empoché des soutiens publics pendant deux ans, et la remontée des taux qui dévalue mécaniquement la valeur des obligations d’Etat dont la banque avait prudemment acheté une quantité phénomènale.
C’est le problème des crises obligataires : elles sont « mécaniques » et difficiles à enrayer. Elles produisent un effet de blast extrêmement long pour toutes les institutions financières qui ont acheté des obligations…
Nous avons déjà alerté sur les conséquences d’une crise liée à la remontée des taux en France. Les assureurs-vie les craignent comme la peste, pour les raisons qui ont mis SVB à terre : les clients demandent à récupérer leur argent, et la compagnie doit vendre des obligations en urgence pour rembourser les clients, au risque d’enregistrer de fortes pertes qui créent la panique. Rien ne prouve que le phénomène va s’étendre rapidement à la France, mais le risque existe, et l’incompétence de Bruno Le Maire constitue désormais le principal danger pour l’épargnant.
Nous vous tiendrons bien entendu informés de façon privilégiée sur ce sujet au fil des jours.
Et l’Ukraine dans tout cela?
Au début de la guerre d’Ukraine, Alexandre N., que nos lecteurs connaissent bien, nous avait pronostiqué une guerre lente mise en oeuvre par une Russie attendant l’effondrement de la finance occidentale. Plus récemment, Emmanuel Todd a émis l’hypothèse que la Russie visait la fin de l’OTAN.
En tout cas, on constate que ceux qui ont émis des hypothèses de stratégie au long cours de la Russie, permettant d’expliquer une guerre lente et limitée – là où beaucoup d’observateurs se gaussent d’un pays qui ne mènent pas de « Blitzkrieg » – ont senti quelque chose d’essentiel. D’un côté un bloc géopolitique eurasiatique est en train de se former, qui se donne lentement les moyens de larguer les amarres avec l’Occident. De l’autre, l’Amérique du Nord et l’Union Européenne ont beau rendre la Russie responsable de tout ce qui leur arrive de désagréable, cela devient de moins en moins crédible.
A moins d’imaginer qu’il y ait eu des agents russes derrière le krach de la Silicon Valley Bank….
La question qui se pose est celle d’une fuite en avant occidentale vers une guerre mondiale qui permettrait de faire oublier la crise. Il y a là un véritable risque.
On a cependant trois raisons de penser que la guerre restera limitée: (1) la Russie, pour l’instant, en menant une guerre lente et localisée, empêche, malgré l’agressivité verbale occidentale et les livraisons d’armes à l’Ukraine, la cristallisation d’une guerre de grande ampleur. (2) Les USA semblent privilégier la Chine comme adversaire principal. (3) la Chine elle-même n’entrera pas, sauf à y être contrainte par de multiples provocations américaines, dans une logique de « guerre chaude ».
Arrivés à ce point, nous voilà confrontés aux hypothèses les plus probables, celles sur lesquelles Le Courrier des Stratèges vous informe et vous avertit depuis le longs mois: le raidissement politique intérieur des gouvernements occidentaux; et la vampirisation progressive de la substance économique européenne par les USA, en particulier à la faveur de la mise en place de monnaies numériques.
Source : https://lecourrierdesstrateges.fr/2023/03/12/dissolution-krach-financier-un-great-reset-qui-coute-cher/
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