Un an après le début de la guerre en Ukraine, plusieurs conclusions peuvent être tirées de ces mois d’affrontements qui, hélas, sont loin d’être terminés.
Trois confirmations
Trois confirmations d’abord.
1/ La vérité est toujours la première victime d’une guerre. Celle-ci n’a pas manqué à la règle. Dès le début de l’invasion, l’hystérie a été maximale, chacun sommant l’un et l’autre de prendre position de façon totale et tranchée. Il y avait donc d’un côté les « poutinolâtres » et de l’autre les « suppôts de l’OTAN », sans qu’il soit possible d’apporter la moindre nuance à ce tableau figé. Se poser, réfléchir, analyser, tenter un jugement nuancé, c’était trahir. Après un an de guerre, l’étau s’est à peine desserré.
2/ La guerre ne change pas de nature. Oui, il y a le cyber, l’aviation et les armes de dernières technologies ; mais la guerre ne change pas de nature. Cette campagne d’Ukraine l’a démontré une nouvelle fois. La géographie est essentielle dans le déroulement des opérations : un cours d’eau à traverser, un fleuve à tenir, une hauteur à prendre, sans compter la météo et les saisons qui ont aussi leur importance.
La guerre, ce sont des civils qui souffrent, des destructions massives, des vies ruinées, des villes tout autant, des apparatchiks au chaud, des cinglés au front (Wagner), des courageux et des traitres. La nature humaine en somme, avec des bombes.
3/ Les sanctions économiques ne servent à rien. Comme prévu, les sanctions économiques n’ont pas fait plier Poutine, elles n’ont pas conduit à un changement de régime et n’ont pas modifié le sens de la guerre. Comme pour Cuba, la Corée du Nord, la Syrie, l’Irak, l’Iran, le Venezuela, la Libye, etc., les sanctions économiques se révèlent toujours inefficaces. On le sait au moins depuis le blocus européen imposé par Napoléon.
Quatre résurrections et un enterrement
Résurrections de l’OTAN et de l’Occident, enterrement de l’ONU, tels sont les autres faits marquants de cette année de guerre.
Résurrection de l’OTAN. Annoncée « en état de mort cérébrale » par Emmanuel Macron, l’OTAN est ressuscitée et plus vivante que jamais. Son Secrétaire général a même demandé à la Corée du Sud d’envoyer des chars en Ukraine, proposant ainsi une vision très extensive de la notion « d’Atlantique nord » qui semble ainsi aller jusqu’à la mer de Chine. Si le nom est le même, l’OTAN a changé de nature : c’est désormais, et plus que jamais, l’alliance militaire de la puissance américaine.
Résurrection des États-Unis, du moins sur la scène mondiale. Oublié le fiasco en Afghanistan et le départ précipité d’août 2021, USA is back comme aurait pu dire Reagan. Merci Poutine, désormais meilleur allié des États-Unis.
Résurrection de l’Occident, dans une version étriquée. Fini l’illusion du marché mondial et de la mondialisation heureuse. Retour aux blocs et à ses logiques. Lorsqu’il s’est agi de prendre des sanctions contre la Russie, seul l’Occident a voté pour. Ni l’Amérique latine ni l’Afrique ne se sont alignées. Lula, la bonne conscience de la gauche européenne, a même refusé de fournir des armes à l’Ukraine. On lui pardonne néanmoins cette incartade, il ne faut pas étouffer le mythe vivant de la révolution. Curieusement, le passé « poutinolâtre » de Nicola Maduro et d’Evo Moralès n’a pas été rappelé, eux qui se targuaient pourtant d’un bolivarisme à visage humain.
Résurrection du nucléaire. Retour du réel face à la pénurie de l’énergie. Le monde a découvert que l’homme vivait de pain (les céréales de l’Ukraine), d’électricité et de gaz. Si on se coupe du gaz russe, alors il faut trouver d’autres sources d’énergie. Revoilà le nucléaire, dont la Belgique avait annoncé sa sortie… en janvier 2022. Un beau sens du tempo.
Un enterrement : celui de l’ONU, qui a officiellement montré qu’elle ne servait à rien, ni à éviter une guerre ni à rétablir la paix.
Des millions au soleil
Sous le soleil de la guerre, il y a plusieurs vainqueurs.
Erdogan tout d’abord, dont la partition est pour l’instant parfaite. Dans l’OTAN sans être contre la Russie, avec l’Ukraine tout en étant le meilleur allié de Moscou, jouant les bons offices et les négociateurs, Erdogan est celui qui a le mieux tiré parti de la guerre. Reste à concrétiser ce délicat exercice de style.
L’Inde, plaque tournante du pétrole. C’est par ce pays que transite le pétrole russe que l’Europe ne veut pas acheter et, face à une alliance sino-russe qui pourrait devenir hégémonique, le rapprochement avec Bombay est une nécessité pour l’Europe. Le géant discret montre son intérêt et surveille son voisin chinois avec beaucoup d’attention.
L’industrie militaire américaine, dont les contrats explosent et dont les ventes progressent. Les marchands de canons tirent profit des guerres, normal, c’est leur métier.
Et un vaincu : la paix, et une certaine idée de l’Europe, qui non seulement n’a pas réussi, depuis 2015, à éviter cet affrontement, mais dont on ne voit pas comment, après douze mois de guerre, elle va pouvoir mettre un terme au conflit et établir un ordre de paix sur le continent.
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