En 2010, et alors que le programme d’avion de transport A400M se trouvait en difficulté, les sept pays clients [France, Royaume-Uni, Allemagne, Espagne, Belgique, Luxembourg et Turquie] acceptèrent d’accorder à Airbus Military une rallonge financière de 3,5 milliards d’euros, dont une partie sous forme d’avances remboursables, gagées sur le succès alors probable de cet appareil à l’exportation.
À l’époque, et après avoir décroché un premier contrat [en 2005] en Malaisie pour quatre unités, Airbus Military estimait pouvoir exporter entre 400 et 500 avions dans les années à venir…
Seulement, évaluant le potententiel à l’exportation de l’A400M à 280 exemplaires, le cabinet PriceWaterhouseCoopers, mandaté par le ministère allemand de la Défense, jugea cette ambition hors de portée. Et d’en conclure que si le nombre d’appareils exportés devait être « moins importante que prévu, le gouvernement fédéral [allemand] s’exposerait alors à un risque de défaut pour le reste du prêt ».
Depuis, les ventes de l’A400M n’ont pas vraiment décollé, avec seulement deux nouveaux clients, à savoir le Kazakhstan [deux exemplaires] et l’Indonésie [deux avion également, plus quatre autres en option]. Cela étant, à en croire Michael Schoellhorn, le Pdg d’Airbus Defence & Space, cet avion ne manquerait pas de clients potentiels. Pour autant, aucun contrat ne s’est concrétisé pour le moment… à cause de la politique allemande en matière d’exportation d’équipements militaires.
« Plusieurs pays sont intéressés par l’A400M. Malheureusement, nous avons des difficultés à obtenir les licences d’exportation allemandes à temps », a en effet affirmé M. Schoellhorn, dans un entretien accordé à l’agence Reuters, en marge de la conférence de Munich sur la sécurité, qui vient de se terminer. Cependant, il n’a pas précisé l’identité des clients potentiels…
Cela étant, ce problème n’est pas nouveau. En 2019, Tom Enders, alors Pdg d’Airbus [la maison-mère d’Airbus Defence & Space], s’était enervé devant de l’intransigeance de Berlin en matière de ventes d’équipements militaires, notamment celles concernant les avions C-295 [transport], Eurofighter Typhoon [produit en coopération avec BAE Systems et Leonardo] et A330 MRTT [ravitaillement en vol]. « Sans approche européenne commune, Airbus pourrait envisager de fabriquer des produits sans l’Allemagne », avait-il menacé.
En outre, a continué M. Schoellhorn, « notre problème est que nous n’avons encore reçu aucun contrat de la ‘Zeitenwende’ [‘changement d’époque’, nldr] et que des exportations importantes ne sont pas approuvées ». Et « cela nous met dans une situation très insatisfaisante », a-t-il souligné, estimant le manque à gagner à « plusieurs milliards d’euros ».
Selon lui, Airbus Defence & Space pourrait produire jusqu’à 30 A400M par an… Soit trois fois plus qu’actuellement.
Quant à la ‘Zeitenwende », qui concerne au fonds spécial de 100 milliards d’euros mis en place pour « réparer » la Bundeswehr après des années de sous-investissements, l’industriel n’en profite pas vraiment… alors qu’il s’attend à une nouvelle commande d’Eurofighter dédiés à la guerre électronique.
L’Allemagne et sa pratique de l’intelligence économique dans les exportations d’armement
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