En ouverture, cette rimaillerie de Léo Ferré parlant des romances qui reviennent toujours... Mais là, on ne parle pas des romances mais des aventuriers dont Washington fait grand usage pour le rythme des “regime change”, et l’on remarque qu’avec Zelenski une fois de plus le même schéma menaçant de se se reproduire...
Il fait, il est nécessaire que chacun d’entre nous se rappelle la phrase fameuse du temps d’Eisenhower (est-ce un ambassadeur US en Amérique du Sud, ou le secrétaire d’État ou quelqu’un du genre...), parlant d’un dictateur sur mesure installé par la CIA là où il faut pour faire ce qu’il faut :
« He’s a sonavabitch but he's our sonavabitch » (« C’est un fils de pute mais c’est notre fils de pute. »)
La question numéro un est de savoir si un tel traitement de jugement infâme peut être appliqué à Saint-Zaleski ? La deuxième question, si par extrême malédiction la réponse à la première était positive, serait alors : “Mais Washington ne serait-il pas sur la voie de liquider “son fils de pute” ?
Bien... Nous, nous écrivons cela, – comme si nous n’avions rien dit, n’est-ce pas. Mais enfin, il y a des bruits... Je veux dire, il y a depuis quelques jours, des actes bien mystérieux et des rumeurs inquiétantes sur des remous internes particulièrement violents et radicaux à Kiev et alentour. Ce sont à la fois des questions de corruption et d’orientation des événements qui sont en cause, et il nous serait bien difficile, à nous autres petites têtes comploteuses, de ne pas faire un rapport de tout cela avec la visite en villégiature de 24 heures à Kiev, la semaine dernière, du directeur de la CIA.
Un dossier fourni de ‘SouthFront.org’ du 24 janvier nous documente sur ces questions, avec diverses images bienvenues. Pour vous donner une idée de la chose, on emprunte un passage du dernier texte de M.K. Bhadrakumar le toujours très-sérieux et bien-informé diplomate indien devenu commentateur, sur son ‘Indian Punchline’ du 24 janvier :
« Medvedchouk [opposant de Selenski emprisonné puis échangé contre un prisonnier ukrainien] nous rappelle “une tendance intéressante” dans la politique ukrainienne. Le président Porochenko avait promis la paix avec la Russie en une semaine, mais une fois au pouvoir, il n'a pas respecté les accords de Minsk, et a “lamentablement perdu les élections suivantes”. Il a été remplacé par Vladimir Zelensky, qui a également promis un règlement avec la Russie dans le Donbass, mais est devenu à la place “la personnification de la guerre”. C'est-à-dire qu’“on promet la paix au peuple ukrainien, puis on le trompe”. La presse occidentale a occulté le fait que la base de soutien de Zelenski est réduite et qu'il existe une majorité silencieuse qui aspire à la paix.
» La mort du ministre de l'intérieur Denys Monastyrski, un collaborateur de longue date de Zelenski, et de son premier adjoint Yevgeny Enin dans un accident d'hélicoptère à Kiev il y a une semaine, dans des circonstances mystérieuses, fait sourciller, puisque les milices néo-nazies ukrainiennes opèrent à partir de son ministère. Un jour plus tôt, la démission surprise du principal conseiller de Zelenski, Alexei Arestovich, pour avoir prétendument jeté le discrédit sur l'armée ukrainienne, a eu lieu.
» Depuis lors, dans des interviews télévisées, Arestovich a fait part de ses doutes sur la conduite de la guerre. Ensuite, il y a eu le meurtre de Denis Kireev, qui était un participant important aux pourparlers de paix de mars avec la Russie. Aujourd'hui, suite à des accusations de corruption, un important remaniement du personnel a eu lieu, impliquant un procureur général adjoint, le chef adjoint du bureau du président, le ministre adjoint de la défense et cinq gouverneurs régionaux jusqu'à présent... »
Tournons-nous vers nos deux compères Christoforou et Mercouris qui ont fait hier soir deux émissions sur le sujet, l’une à deux, l’autre de Mercouris seul. Pour résumer l’atmosphère, chez deux commentateurs qui ne sont pas du tout complotistes et ont pris grand soin d’accueillir les premiers événements de la séquence avec la plus extrême prudence, on résumera je crois assez justement par cette intervention de Mercouris, rigolard :
... « Tous les médias occidentaux ont accepté et développé la thèse [officielle] de la lutte contre la corruption. Mais Zelenski a été élu en 2019 sur deux grands thèmes dont l’un était “la lutte contre la corruption” [le second étant la réconciliation avec la Russie !] . Et il s’attaquerait à la corruption aujourd’hui, trois ans plus tard, en pleine guerre [avec la Russie !]... »
Effectivement, effectivement... C’est un peu gros et cela a et aura de la difficulté à prendre, surtout lorsque, peut-être, sans doute, – surprise, surprise, – la purge pour “corruption” atteindra le sommet , Saint-Zelenski lui-même. C’est là ce qui fait d’un problème très classique dans les pratiques américanistes, – la liquidation des “marionnettes ayant trop ou mal servi, Somoza, Noriega, Ngo Dinh Diem, – un cas bien particulier. Ni Somoza, ni Noriega, ni Ngo Dinh Diem ne furent des “héros” à la dimension internationale, porteurs et symboles d’une bataille essentielle, dans une époque hyper-communicationnelle comme elle est la nôtre.
Rappellez-vous ce que nous écrivions il y a si peu de temps, à peine quatre jours concernant Zelenski devenu Zaint-Zelenski, icône du Saint-Simulacre et de la Sainte-Simulacre (mettons cela au féminin du genre transgenre, pour en finir avec les nécessités révolutionnaires du temps !)... Nous mettons ces réflexions sous le feu différent des événements actuels qui se précipitent et qui se resserrent sans doute autour de Zelenski, lequel devrait être, selon Mercouris toujours, « le sommet de la Purge », – car c’est bien le mot “purge” qui est employé !
« Par ailleurs, la situation est loin d’être simple en “terme de proxy”. Nous voulons dire par là que l’Ukraine ne peut être comparée ni à l’Afghanistan, ni à l’Irak, où les leaders successifs placés par les coalitions occidentales ne jouaient pas un rôle essentiel, – là encore en termes de communication, – et pouvaient être aisément mis à l’écart, parfois liquidés. L’Afghan Karzai, premier président placé à Kaboul par l’Occident eut très vite une attitude d’indépendance mais cela n’eut aucun effet international, cela resta un problème intérieur. Dans le cas ukrainien, c’est complètement différent, à cause de l’énorme effort d’influence et de pression exercé par Zelenski sur tous les pays du bloc-BAO, et du prestige pratiquement équivalent à une sanctification qui en a résulté...
» Il sera/il serait très difficile de se débarrasser de Saint-Zelenski sans engendrer des remous majeurs, voire des fractures radicales au sein de la coalition de ces pays. Or, c’est ce même Saint-Zelenski qui occupe la position la plus extrême dans la tactique et la stratégie de la bataille constituant de plus en plus un handicapa fatal pour l’Ukraine, et une méthode de combat de plus en plus jugée avec méfiance par nombre de pays. A côté de ce problème, – comment éliminer Saint-Zelenski sans faire s’effondrer l’Église du Saint-Simulacre ? – la querelle picrocholinesque sur l’envoi ou pas de chars plus ou moins lourds en Ukraine est une simple indication de la difficulté de détourner l’attention (sans le vouloir mais parce que c’est nécessaire) de cette question du Saint-Zelenski qui devient majeure pour faire tenir le Saint-Simulacre en place. »
Il paraît, disait-on également, que Boris Johnson a décidé une visite impromptu à Kiev, peut-être à la demande de Saint-Zelenski, pour défendre son ami Zelenski contre les entreprises internes de déstabilisation. Les Polonais, quant à eux, préparent des plans secrets et l’on reparle des tweets de Sikorsky, l’ancien ministre, immédiatement après le 23 février, évoquant les anciennes terres polonaises d’Ukraine qu’il fallait tenter de récupérer ; c’est que l’on dit que cette partie de l’Ukraine, hors des attaques russes, pourraient regrouper tous les nouveaux matériels de l’OTAN, de façon à constituer une force de stabilisation intérieure en cas de remous autour de Zelenski, avec quelques miettes, justement pour la Pologne. Ces diverses rumeurs qui enflent à nouveau aujourd’hui reviennent périodiquement depuis un ans, signe qu’elles recouvrent de véritables ambitions, – par exemple, pour garder le cas polonais, des ambitions expansionnistes qui pourraient déranger bien des relations avec des pays voisins et des renchérissements d’autres réclamations concernant des territoires contestés.
On dit cela parce qu’il me paraît évident qu’à une accélération du désordre intérieur en Ukraine, jusqu’à la mise en cause envisagée par certains de Zelenski que l’on ne considérerait plus comme un Saint, fournirait un formidable moteur pour le développement d’un désordre général dans tous ces territoires de l’Europe centrale et de l’Est. Il y a là une curieuse évolution de deux logiques antagonistes : la logique unitaire antirusse des pays de l’“Ouest-collectif” qui s’appuie sur l’étendards Saint-Zelenski et a pour but la déconstruction de la Russie, et la logique des revendications antagonistes et déconstructrices des Europes du Centre et de l’Est si l’étoile de Saint-Zelenski pâlissait et si le désordre s’installait dans ce pays.
C’est dire s’il reste à comprendre ce qu’est exactement cette guerre en Ukraine et, d’une façon plus générale, les concepts que nous évoquions hier, sans très bien concevoir de quoi nous parlions, –sauf qu’il y a beaucoup de choses niuvelles, de nouveaux concepts à découvrir :
« L’“esprit de la Troisième Guerre Mondiale” règne partout... C’est une bien étrange “Guerre Mondiale” puisqu’elle existe d’abord dans la communication et souvent s’y cantonne... Il reste, très sérieusement, à définir désormais ce qu’est une “Guerre Mondiale”. »
Qu’on me pardonne d’être énigmatique : c’est que, moi-même, je crois que nous sommes tous placés devant une énigme et qu’il importe avant tout de nous en aviser, d’être prêt à tout, de comprendre que les événements ont une explication qui nous échappe.
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