8 ans de constructions fortifiées, de tunnels, de bunkers et d’interminables dépôts d’armement, deux mois de repositionnement des réserves et de pertes humaines militaires, la structure commence enfin à s’effondrer. Les pertes humaines se chiffrent en dizaines de milliers de jeunes, de moins jeunes, de nationaux et d’étrangers, et après tout cela l’inévitable se produit.
Le comédien qui est président, dans ses vidéos quotidiennes depuis un bunker ou un manoir, a toujours résisté à faire ce que l’adversaire fait lorsqu’il considère que l’effort est trop grand par rapport au gain : se retirer vers une ligne de défense plus solide, en économisant hommes et matériel.Le récit officiel, partagé sans cesse, sur « les plus importantes victoires depuis la deuxième grande guerre » pour le public domestique, ne sera pas méprisant, pour la décision de se battre jusqu’au dernier homme. Après tout, toute décision de qualifier de perdue cette importante ligne de fortification défensive implique un renversement total du récit propagé par la presse officielle de l’Atlantique Nord. Il faut d’abord préparer le public qui suit sans relâche ces récits. Leur dire la vérité n’est pas une option, car cela reviendrait à dire effectivement le contraire de ce qui a été dit concernant l’issue inévitable du conflit.
Dans une autre guerre utilisée comme un cycle d’accumulation capitaliste, un fait qui peut être clairement énoncé dans l’inversion de la tendance du marché mondial des armes jusqu’en 2014, qui plaçait les deux concurrents indirects (États-Unis et Fédération de Russie) en concurrence directe et avec des chiffres très proches, cette situation s’est, pour ainsi dire, inversée, les États-Unis étant aujourd’hui le leader incontesté des ventes d’armes dans le monde, avec environ 2/3 de plus en valeur des ventes que son plus grand concurrent direct (Fédération de Russie).
Cela ne signifie pas qu’ils vendent plus en quantité….. Ils vendent surtout plus cher. Les données dont nous disposons mettent en lumière l’utilisation de la guerre et du complexe militaro-industriel comme un instrument du cycle d’accumulation capitaliste ou, au contraire, comme un instrument dont l’objectif fondamental est la défense nationale.
Le « Global Fire Power 2023 », qui établit le « Fire Power Index », place les États-Unis en tête avec 0,0712, la Fédération de Russie avec 0,0714 et la RPC avec 0,0722. En d’autres termes, les deux premiers semblent à égalité et le troisième est très proche. La quatrième place, l’Inde, est beaucoup plus éloignée, avec 0,1025. Qu’est-ce que cela nous apprend sur le rôle de chaque armée ?
La première question qui vient à l’esprit est la suivante : comment se fait-il qu’un pays qui dépense 800 milliards de dollars de son budget militaire (et nous n’incluons pas ici l’« argent noir » des services secrets, ni toute la recherche payée par des programmes fédéraux qui va également à des fins militaires), ait pratiquement la même puissance de feu qu’un pays qui dépense 65 milliards de dollars, et à peine plus qu’un autre qui dépense 290 milliards de dollars ?
La réponse réside dans plusieurs aspects : 1) le complexe militaro-industriel nord-américain est privé, il vise donc la recherche du profit, l’enrichissement d’une élite et la concentration des richesses, l’État étant un instrument de cette accumulation ; 2) les deux autres ont un complexe militaro-industriel essentiellement public – pas exclusivement – principalement dans les domaines les plus sensibles, et qui n’a pas vocation à faire plus que remplir son rôle public, c’est-à-dire garantir une défense nationale efficace capable de défendre la souveraineté du pays.
Cette différence est primordiale, car si la première fabrique des armes pour les vendre, c’est-à-dire et comme le disent de nombreux spécialistes, en font des « jouets » de luxe, très sophistiqués et complexes, et donc très coûteux, tant dans l’acte d’achat, l’entretien, la formation et les exigences techniques du personnel, et lorsqu’ils sont au combat, généralement très enclins aux pannes. Au contraire, les deux autres concurrents tentent de fabriquer, au moindre coût possible, des produits efficaces, performants et durables. Le fait qu’il s’agisse pour la plupart d’entreprises publiques permet à l’État d’acheter au prix de revient, et même lorsqu’il s’agit d’entreprises privées, le prix qu’elles demandent est conditionné par un marché dominé par le secteur public des affaires, dont la dynamique d’accumulation est contrôlée par l’État, pour défendre ce qu’il considère comme l’intérêt national. Ce système, les États-Unis l’appellent « manque de liberté économique ». Pour les 1% les plus riches, bien sûr !
A ces deux facteurs, nous pouvons également ajouter d’autres variables qui ne manqueront pas d’avoir une grande importance : les économies des 2ème et 3ème places sont toutes moins financiarisées et, en ce sens, moins spéculatives, surtout dans les secteurs stratégiques, ce qui se traduit par des prix plus bas et un poids plus faible du secteur rentier sur l’industrie ; les deux pays ont un potentiel industriel installé très important, ce qui permet une production nationale quasi exclusive, avec des chaînes de production presque entièrement en monnaie nationale et donc très peu vulnérables aux attaques spéculatives ou aux perturbations d’autres types (dans le cas de la Fédération de Russie, elle a en plus l’avantage d’avoir accès à toutes les matières premières sur son territoire) ; enfin, les deux pays ont des comptes de capital fermés (du moins en partie, puisque la Fédération de Russie les a fermé avec les sanctions et que la RPC ne les ouvre que dans certains domaines et avec de nombreuses limites), ce qui permet la mise en place de chaînes de production à haute valeur ajoutée, mais à faible coût comparatif, lorsque leur produit est évalué nominalement, en $. Les avantages que nous voyons ici dans le domaine de la défense sont également visibles dans d’autres domaines tels que la recherche et le développement spatial, les chemins de fer et les banques. C’est le seul moyen de résister à des sanctions massives (comme dans le cas de la Fédération de Russie), et le seul moyen d’utiliser le potentiel accumulé pour un développement plus rapide du pays (comme dans le cas de la RPC).
Que les défenseurs du néolibéralisme et de l’« ouverture » des marchés se manifestent maintenant et fassent valoir que les pays défendent mieux leur souveraineté de cette manière, et non par le biais des mesures protectionnistes susmentionnées. Sans ces mesures, les deux économies en question seraient déjà absolument dévastées, soit par les sanctions, soit par les attaques spéculatives, et leurs peuples seraient dans la pauvreté la plus absolue, dont ils ont eu tant de mal à se sortir. Ce n’est pas un hasard si les deux principales demandes américaines pour des changements dans la RPC sont liées à la privatisation de son énorme (environ 30% de la propriété du pays) secteur des entreprises publiques (principalement les banques) et à l’ouverture complète des comptes de capitaux. Ce n’est pas non plus un hasard si les États-Unis ont accusé la Fédération de Russie de renforcer sa monnaie par des contrôles de capitaux. C’est pourquoi la Maison Blanche affirme qu’un « changement de régime » est nécessaire. Ce n’est pas dans l’intérêt de « leur » démocratie, cela rend plus difficile l’entrée des chevaux de Troie.
Mais si c’est l’un des facteurs les plus importants de la contestation, l’un des autres, l’énergie, a déjà porté ses fruits, du moins à court terme. Selon Bloomberg, les États-Unis deviendront le premier producteur de gaz au monde d’ici 2022 [sic, NdT], le tout au détriment de la transition de l’achat européen, de la Fédération de Russie vers les USA. Si, pour les USA, cette « opportunité » (comme l’a dit Blinken) était fantastique, pour l’Europe, elle montre sa fragilité globale, en termes politiques, économiques et culturels. Pour avoir une idée du coût du « découplage » avec la Russie et du « couplage » avec les États-Unis, en termes de dépendance énergétique, il suffit de regarder les données de la balance commerciale pour novembre 2022, période pendant laquelle ces pays étaient engagés dans le remplissage de leurs réserves de gaz naturel et d’autres combustibles.
Les données fournies par Golden Sachs indiquent que pour la France, novembre dernier a été le mois de novembre le plus négatif de ces 20 dernières années, en termes de déficit commercial (- 15 %). La Suède, comme la France, a également connu le pire mois de novembre depuis 20 ans, l’un des 5 sur 20 à avoir un déficit, et celui de cette année a été beaucoup plus élevé que celui de l’année dernière, qui était déjà négatif et reflétait la « grande » décision d’Ursula de commencer à acheter du gaz « sur place » au lieu de conclure des contrats à long terme (le « découplage » était déjà en préparation), comme il serait souhaitable. L’Allemagne, tout en restant sur un terrain positif, a néanmoins connu son pire mois de novembre en 18 ans. En termes de production industrielle chimique et pharmaceutique (qui nécessite du gaz), elle est en chute libre, tombant à des niveaux bien plus bas qu’en 2010, en pleine crise des subprimes. Le prix exorbitant du gaz américain rend la production non viable, et d’autre part, le manque de gaz, dû à la fermeture et à la destruction du Nord Stream par ses « alliés », oblige à choisir entre la production industrielle d’une part, et le maintien des réserves stratégiques de gaz d’autre part, si nécessaires au chauffage en plein hiver. L’Allemagne a opté pour la fermeture et la délocalisation d’entreprises. Certaines vers la RPC, d’autres vers les USA, qui ont même un secteur pharmaceutique compétitif (rien n’arrive par hasard).
Le Japon est également dans une situation compliquée, avec également le pire mois de novembre de ces 20 dernières années. Cela ne sera pas sans rapport avec la décision d’acheter à nouveau du pétrole à la Russie, notamment en reprenant le projet Sahkalin et sans respecter le plafond de prix qu’elle avait auparavant « contribué » au sein du G7 à fixer. Cette décision ne fera certainement pas le bonheur de ses maîtres atlantistes.
La conclusion de l’un des économistes de Golden Sachs qui a publié ces données est que « les champions mondiaux de l’exportation ne le sont plus ». Voilà ce qui résulte de l’abandon de la souveraineté nationale et du fait de laisser les « alliés » prendre les décisions qui reviennent à chacun d’entre eux.
La soumission totale des pays du G7 et de l’UE aux diktats de l’OTAN, une organisation créée pour les préparer, qui se confond aujourd’hui avec l’Union européenne elle-même ; l’application aveugle de toutes les sanctions et directives économiques et financières ; l’absence de mécanismes de protection des marchés intérieurs respectifs… Tout cela a l’effet auquel nous assistons, qui avait été prévu par tant de personnes réduites au silence pendant tout ce temps. Comme ils doivent détester avoir raison.
Et alors que tout le monde maintient une telle ouverture, l’« allié » atlantique adopte des mesures protectionnistes visant précisément à capter le meilleur de ce que l’industrie de ses « amis » a encore à offrir.
Après cela et l’annonce – pour faire diversion aux récentes défaites militaires – du sommet de l’Union européenne, il ne reste plus qu’à voir notre premier ministre, notre président et autres atlantistes de gauche et d’extrême droite sortir pour défendre l’entrée rapide de l’Ukraine, de la Géorgie et de la Moldavie, dans l’Union européenne… Tout cela par solidarité, bien sûr ! Je veux voir quand ces gens, qui ont tant d’entreprises qui vivent des fonds structurels européens, cesseront de les recevoir… Je suis sûr qu’ils trouveront une faute là où il n’y en a pas. Après tout, c’est leur pratique !
Ils veulent du changement ? Ils doivent faire l’inverse de ce qu’ils font !
Hugo Dionísio
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