Un de nos lecteurs s’interroge sur le calcul qui permet au gouvernement d’annoncer le nombre de personnes non vaccinées : est-il basé sur le nombre de personnes vaccinées, ou sur le nombre de passes sanitaires actifs ? Comment fonctionnent les indicateurs utilisés pour mesurer l’avancée ou la décrue de la pandémie ? « Ouest-France » vous répond.
Tanguy aimerait savoir « comment est calculé le nombre de non vaccinés : est-il basé simplement sur le nombre de Français de plus de 12 ans moins le nombre de doses injectées ou est-il basé sur le nombre de français de plus de 12 ans moins le nombre de passes sanitaires actifs ? Je pose cette question car une infection par le virus étant équivalent à un vaccin, il y a très certainement beaucoup de gens qui sont non vaccinés car protégés par une infection ou plusieurs infections. Auquel cas, compter le nombre de passe sanitaire actif permettrait d’avoir un suivi plus précis sur le nombre de gens réellement protégé du virus que juste sur des doses injectées. »
Pour vous répondre succinctement, Tanguy, les personnes vaccinées ne sont pas comptées en fonction des passes sanitaires actifs, car cette méthode de calcul serait elle-même biaisée. On vous explique pourquoi, en commençant par faire le point sur les différents indicateurs que la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees) utilise pour mieux appréhender l’épidémie.
Plusieurs indicateurs pour mesurer la pandémie
La Drees est un des services de statistiques publiques qui publie régulièrement des données permettant de mesurer la progression de l’épidémie. Si vous aimez les tableurs Excel ou que vous vous intéressez aux méthodologies de calculs, vous pouvez retrouver toutes leurs données sur la pandémie de coronavirus ici.
Il existe trois bases de données qui nous informent sur les différents impacts de la pandémie. La base de données dite « Si-Dep » référencie le nombre de tests effectués en France, en différenciant évidemment les tests positifs et les négatifs jour par jour.
Autre base de données, le « SiVic », qui comptabilise le nombre d’hospitalisations dues au Covid-19. Là encore, on distingue les différentes prises en charge une fois le patient arrivé à l’hôpital : les personnes en soins critiques, celles en soin conventionnel, ainsi que les décès dus au Covid-19.
Enfin, une dernière banque de données, appelée « VacSi », dénombre le nombre de doses de vaccin reçues dans la population. Étudiées toutes ensembles, ces bases de données « permettent de mieux décrire la situation épidémique et d’éclairer les décisions de politique publique », explique la Drees sur son site.
Le calcul des vaccinés permet de déduire les non vaccinés
Pour votre question, c’est la base VacSi qui nous intéresse. Celle-ci est constituée au moment de la prise de rendez-vous et de la vaccination. À noter cependant, VacSi ne compte pas simplement les doses injectées : les données qui la constituent font la différence entre primo-vaccination et dose de rappel, ce qui assure un suivi fiable de la vaccination dans la population générale.
Ces données sont anonymisées, explique la Drees dans sa note de méthodologie : « Dans chacune des trois bases, lors de leur constitution et avant transmission à la Drees, les informations relatives aux noms, prénom, sexe et date de naissance de personnes hospitalisées, testées ou vaccinées servent à la constitution d’un pseudonyme, chaîne de caractères non signifiante identifiant de façon unique chaque personne ». Seul ce pseudonyme est transmis à la Drees, qui peut dès lors s’en servir pour exploitation statistique, sans être en possession de données personnelles sensibles.
Contactée pour répondre à la question de Tanguy, la Drees indique que la part des non vaccinés est calculée « à partir de la base VacSi, qui permet de calculer les injections. On en déduit ensuite les non vaccinés par différence avec la population ».
Autrement dit, grâce à VacSi, la Drees sait que, au 14 janvier 2022, près de 52,1 millions de Français sont entièrement vaccinés (primo-vaccination effectuée il y a peu ou dose de rappel reçue). En plus de ces 52 millions, près de 1,3 million de personnes n'ont reçu qu'une seule dose. La France comptant officiellement 67 millions d’habitants, il resterait donc peu ou prou 13,6 millions de personnes non vaccinées. Si l’on y retire les quelque 9 millions de moins de 12 ans, encore très rarement vaccinés, on retombe sur le chiffre de 5 millions environ de Français, volontairement non vaccinés, qu’Emmanuel Macron a dit vouloir « emmerder ».
Par ailleurs, et contrairement à ce qu’avançait Florian Philippot, ancien parlementaire européen et candidat à l’élection présidentielle, les personnes n’ayant pas encore reçu de dose de rappel ne sont pas comptabilisées parmi les personnes « non vaccinées ». Nos confrères de Libération l’ont démontré dans un article.
A l’inverse, les passes sanitaires actifs ne rentrent pas dans le champ d’étude de la Drees, comme elle nous le confirme : « Nous ne disposons pas, à la Drees, de base de données sur les passes sanitaires. Il est possible que cela existe via l’application TousAntiCovid mais nous ne sommes pas en mesure de vous le certifier. »
Partir des passes impliquerait d’autres biais
Dans votre question, Tanguy, vous supposez que le suivi des passes sanitaires en activité permettrait un meilleur suivi des gens réellement protégés contre le coronavirus. Mais cette méthode de calcul implique elle-même un biais. En effet, à l’heure actuelle, toute personne pouvant présenter le résultat d’un test négatif de moins de 24 heures a accès à un passe sanitaire (ce qui devrait évoluer avec le passe vaccinal à venir). Mais celui-ci n’est pas en soi une preuve de protection contre le coronavirus, seulement une preuve qu’à un moment T, la personne n’était pas infectée.
Certes, les certificats de rétablissement seraient plus à même de renseigner sur le degré de protection d’un individu, mais seulement dans une certaine mesure : on sait que les risques de réinfection sont réels, notamment avec le variant Omicron.
Pour résumer, Tanguy, les chiffres des personnes non vaccinées sont obtenus par un calcul, réalisé à partir de la base de données VacSi. Si cette méthode ne permet pas de prendre en compte tous les cas spécifiques, comme les personnes déjà infectées et donc en partie protégées contre le coronavirus, d’autres méthodes de calcul auraient également leurs biais.
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