On a noté ces dernières semaines l’abondance des commentaires concernant la possibilité d’un engagement nucléaire (en Ukraine pour certains, sans limitations pour d’autres). Le fait même qu’il puisse y avoir de telles vaticinations est extrêmement préoccupant, et plus encore le fait qu’on fasse dire à certains ce qu’ils n’ont pas dit pour pouvoir mieux les menacer. La démarche centrale de cet étrange affrontement verbal est l’appréciation tacite de certains autres de l’emploi du nucléaire. Au bout de quoi, l'on trouve une psychologie de psychopathe.
Il existe un bruit de fond général, – on ne peut parler de “débat”, – sur l’emploi du nucléaire tactique, concernant la seule Ukraine, selon des accusations américanistes, relayées ou entretenues, voire suscitées pat les zélenkistes. Le but est évidemment de pure propagande-narrativiste, de faire passer la Russie pour une destructrice de l’humanité en puissance, après l’avoir transmutée en numéro un de l’impérialisme de tous les temps. Plus c’est gros (Goebbels le savait bien)... Il y a, depuis quelques jours, ce bruit de fond qui, par instant, devient tonitruant et insupportable, soutenu par le cœur des plumes folles, des journaleux de la presseSystème déployant un appareil considérable pour argumenter autour de l’emploi du nucléaire tactique par les Russes en Ukraine.
Le 28 septembre 2022, Christoforou-Mercouris (à partir de 07’05” sur leur vidéo) discutent de l’extraordinaire narrative américaniste concernant la possibilité d’emploi du nucléaire (par les Russes, c’est-à-dire de la faute des Russes). Il s’est agi purement et simplement de transformer de fond en comble, contre l’évidence du texte officiel, notamment du discours de Poutine du 26 septembre, la position des Russes. La narrative américaniste s’est donc transmutée en une affirmation que Poutine menaçait d’employer du nucléaire tactique en Ukraine, emploi de facto “en premier” (ce que Poutine n’a jamais suggéré, et qui n’est pas accepté dans la stratégie russe) ; à partir de cette interprétation, les USA avertissant les Russes qu’ils utiliseraient eux-mêmes du nucléaire si les Russes franchissaient une “ligne rouge” par ailleurs extrêmement vague et indéfinie (du nucléaire tactique russe jamais évoqué par les Russes dans ces conditions, mais aussi d’autres actes non définis). Cela introduit une dimension effrayante par son ambiguïté et son imprécision quant à la “facilité”, la “faculté”, et la “légalité” de soi-même pour soi-même d’emploi du nucléaire par les USA ; cela à partir de règles non précisées et établies par eux-mêmes, accordés au jugement qu’ils portent sur le comportement russe, non selon des faits ni le véritable sens d’un discours mais selon leur narrative interprétative...
Les deux compères sont effarés, compte tenu de l’extraordinaire dangerosité de l’enjeu :
« Cela conduit à l’appréciation selon une réaction extrêmement terrifiée et effrayée [du comportement US], et cela me conduit à penser qu’il s’agit de la plus foutue et la plus dangereuse administration [US] que j’ai jamais vue dans ma vie... » (Christoforou)
« Lancer des avertissements répétés [comme le Washington Post l’a rapporté à propos de démarches secrètes auprès de Moscou de l’administration Biden] à propos d’avertissements russes concernant l’utilisation d’armes nucléaires tactiques qui n’ont jamais été lancés, et avertir en retour qu’on y répondra par les moyens les plus puissants, dont chacun comprend qu’il s’agit de nucléaire tactique, constitue une attitude si risquée et si complètement irresponsable... Je veux dire, je n’ai jamais vu un comportement pareil, jamais jamais de toute ma vie... » (Mercouris)
Bien entendu, avec Christoforou-Mercouris nous nous trouvons en présence de commentateurs qui tendent à soutenir les thèses russes, – ou plutôt, et la nuance est d’une taille impressionnante, qui tendent à rejeter absolument le bloc-BAO, ses dirigeants, sa politique du mensonge, sa dégénérescence, son hypocrisie... En fait, ce que Christoforou-Mercouris détestent le plus, outre le mensonge qui est le seul matériel disponible en masse dans la base industrielle de guerre de l’Ouest, c’est l’absence de logique, d’équilibre, d’ordre dans la pensée, essentiellement sinon exclusivement pour ce qui concerne les matières les plus irréversibles.
Hier, PhG regrettait que l’on s’en tint à la Guerre Froide, et celle des plus belles embrouilles, pour en juger négativement des Russes chez nombre d’antiSystème (français) ; qui plus est, s’en tenant à la Guerre Froide en oubliant que les Russes furent les premières victimes, bien plus que les Polonais ou les Baltes, d’un communisme importé d’Occident, des banques de Wall Street aussi bien que des services de renseignement du Kaiser. Il écrivait, PhG :
« Une partie importante des conservateurs et patriotes occidentaux n’a pas compris, souvent par inculture historique et ignorance des relations internationales depuis 1989, qui défendait quoi dans la guerre en Ukraine, et qui était fautif de quoi. Par inculture, oui, ils en sont restés aux confortables lieux communs de la Guerre Froide, n’ayant toujours pas compris le rôle qu’y ont joué les Etats-Unis. »
Mais PhG parlait des esprits qui vivent et de leur évolution qui est nécessairement considérable. Christoforou-Mercouris, parlant des “matières les plus irréversibles”, plaident au contraire pour le maintien des conceptions de la Guerre Froide ; dans tous les cas, sans aucun doute pour la plus du plus de toutes ces “matières les plus irréversibles”, celle qui est « plus claire que mille soleils », – l’arme nucléaire. La façon dont les dirigeants US, leur cour de divers ‘mignons”, leurs serviteurs des ministères et présidences européennes, leurs larbins de la presseSystème, “jouent” avec les hypothèses d’emploi l’arme nucléaire pour en faire un enjeu de leur narrative, – par rapport à ce qu’imposait la coutume de la logique de la responsabilité collective durant la Guerre Froide, – horrifie absolument Christoforou-Mercouris.
Il y a là un considérable obstacle de compréhension, deux mondes vivant séparément, dont le second ignore que le premier existe et le premier s’effrayant absolument de l’existence du second. Sergei Poletaev, co-fondateur et éditeur du ‘Projet Vatfor’, explique dans un article pour RT.com,
« Alors pourquoi entendons-nous sans cesse ces allusions ? La Russie est-elle réellement prête à utiliser une telle force ou s'agit-il simplement d'une forme de dissuasion verbale ?
» Premièrement, depuis la fin de la guerre froide, il existe un déséquilibre entre la puissance nucléaire de Moscou, ses capacités économiques et son poids politique dans le monde. Ensuite, ces armes de destruction massive sont perçues par nos anciens adversaires comme une relique du passé plutôt que comme un facteur pertinent dans les relations internationales actuelles.
» La Russie, au contraire, considère l'arsenal nucléaire comme le fondement de sa souveraineté et a supposé que tant que nous étions encore une grande puissance en termes nucléaires, nous pouvions également prétendre être importants en termes de politique étrangère, même en tant que nain économique. C'est la présomption d'être une grande puissance qui a déterminé nos actions en Ukraine et dans tout l'espace post-soviétique.
» Cette différence de perception est la raison fondamentale de la crise ukrainienne, et c'est la raison pour laquelle l'Occident et nous ne parvenons pas à trouver un terrain d'entente pour au moins essayer de lancer une sorte d'accord. »
L’essentiel de cette différence quasiment ontologique de perception est que « La Russie, au contraire, considère l'arsenal nucléaire comme le fondement de sa souveraineté » tandis que “les autres” en l’occurrence (le bloc-BAO) jugent que les armes nucléaires sont « une relique du passé », et bien peu de choses comparées à l’arme de la communication et surtout, surtout, l’art de la narrative. Tout cela est dit en termes élégants mais ne dit rien fondamentalement de ce en quoi ces armes sont “la matière la plus irréversible” qui soit, sans appel et sans délai... Les Russes les tiennent sans aucun doute comme des attributs de la souveraineté, mais ils savent également, – et ils y sont d’ailleurs poussés par cette vertu de la souveraineté, – qu’elles sont les armes à la fois de l’Apocalypse et du Jugement Dernier conjugués, au terme desquelles on trouve sans aucun doute la possibilité de la fin de toute civilisation et peut-être même de l’espèce... Cette possibilité-là n’est pas une narrative et ne doit pas être maniée comme l’est une narrative.
C’est là que se trouve la chose qui effraie et horrifie Christoforou-Mercouris. L’espèce de mollesse de jugement qui conduit à faire du nucléaire une « une relique du passé » conduit également, comme une logique qui se liquéfie et se désintègre, à perdre de vue qu’elles sont “la matière la plus irréversible” de la destruction totale. Ainsi s’explique-t-il qu’on en “joue” avec tant de légèreté selon les nécessités des relations publiques et de la narrative. Le problème est qu’à en “jouer” ainsi, on peut en arriver à des situations où l’on pourrait envisager de décider, le cœur “léger”, qu’une bonne vieille bombe nucléaire tactique ferait bien l’affaire dans telle phase de la guerre en cours, – et l’on en ferait avant même l’action une très belle narrative.
Les psychopathes parlent aux psychopathes
Passons à un autre registre sans pourtant quitter le précédent que nous retrouverons en bout de course, et voyons un article de l’excellent historien Eric Zuesse qui nous dit son étonnement de constater à quel point le gouvernement des USA, et les élites-Système qui l’entourent et le soutiennent en général, sont psychopathiques. On empruntera ici un simple extrait, mais l’extrait qui nous intéresse, de la définition de la psychopathie par le Wiki ; et qui nous intéresse parce qu’il définit tellement bien le comportement des dirigeants-Système aujourd’hui, et bien entendu ceux des USA :
« De plus, contrairement à la croyance populaire, les psychopathes ne sont pas tous violents ou malveillants, bien qu'ayant recours à la manipulation pour obtenir ce qu'ils désirent. En général, ce sont des individus qui ne ressentent pas d'empathie, ils se soucient peu de ce que les autres ressentent et les utilisent pour atteindre leur but. Le mensonge pathologique, les violations répétées des normes sociales, la victimisation, la tendance à blâmer autrui ou l’intolérance à la frustration peuvent être des comportements révélateurs de ce trouble. »
Dans son article, Zuesse, s’appuyant sur une longue enquête de Reuters qui, pour cette fois, n’a pas eu froid aux yeux, rapporte les pratiques de la CIA vis-à-vis des agents et “honorables correspondants” qu’elle recrute. L’Agence, telle qu’elle a évolué sans doute selon la description qu’en fait l’ancien officier de la CIA Larry Johnson, montre toujours beaucoup plus d’attention, de prévenance, de protection sur le long terme, à ceux qui sont des corrompus, des cyniques, ceux qui sont dépourvus de toute considération et de tout principe, – à ceux qu’on peut classer dans la catégorie des psychopathes, justement. Par contre, la CIA se montre négligente, voire parfois cruellement indifférente jusqu’à omettre d’avertir d’un danger qui les menace les agents et “honorables correspondants” qui acceptent d’être recrutés par conviction, par idéalisme, par élan pour la démocratie et l’Amérique, – puisque ces deux choses, paraît-il, existent bel et bien et coexistent. (Tel agent iranien, ingénieur nucléaire trahissant par idéalisme, et capturés par les services iraniens alors que la CIA n’ignorait rien de l’opération lancée contre lui et ne l’en prévint pas : un des exemples cités par Reuters.)
La CIA, comme le gouvernement qu’elle sert, comme le Système auquel elle se soumet, n’accorde son attention et sa sollicitude qu’à celui ou celle qui, comme elle-même, est de la race des psychopathes...
« Bien que ces individus soient devenus des traîtres pour des raisons idéalistes, et non parce qu'ils sont psychopathes, le gouvernement américain ne fait que les mettre à la poubelle, et traite en fait les traîtres psychopathes avec bien plus de respect et de considération. Le gouvernement américain récompense la psychopathie parce qu'il est lui-même, au plus haut niveau, extrêmement psychopathe. Au plus haut niveau, il est la personnification de la psychopathie.
» Reuters, qui a l'habitude d'édulcorer toute réalité psychopathique du gouvernement américain, a publié une longue enquête de 6.000 mots intitulé “America's Throwaway Spies : How the CIA failed Iranian informants in its secret war with Tehran”, qui décrit un degré de psychopathie du gouvernement américain que même moi je trouve surprenant. »
Il est vrai que cette vision clinique du gouvernement américaniste, c’est-à-dire du Système, de la façon dont il procède, même parfois sinon souvent contre ses intérêts finalement, cette brutalité perverse et invertie du jugement nous donnent à notre sens une part essentielle de l’explication du comportement des USA (du bloc-BAO, du “Camp du Bien”, de toute la longue caravane satanique qui écrase l’harmonie du monde et en piétine toutes les structures). Nous dirions qu’intuitivement, tout cela rencontre parfaitement ce que nous éprouvons en fait d’explication nécessaire. Il s’agit d’un phénomène à la fois pathologique et satanique, et satanique parce que pathologique, ou pathologique parce que satanique c’est selon.
L’on trouve à ce point de l’interprétation la cause essentielle de l’absence complète de prévention vis-à-vis de l’arme nucléaire, — encore plus que parce qu’il s’agit d’une « une relique du passé », – mais parce que la destruction massive des populations, de l’environnement, de ce qu’il reste d’harmonie dans notre univers, bref la destruction de l’univers dans sa totalité ne peut être en aucun cas une perspective qui puisse influer sur la décision de l’esprit du psychopathes. Au contraire, on irait jusqu’à penser que cette perspective l’excite considérablement.
C’est évidemment pour cette raison que la partie qui se joue autour de l’Ukraine (plus qu’en Ukraine elle-même) est de la plus extrême importance et constitue un des points d’orgue de la GrandeCrise. Par contre, cette espèce d’empathie pour la destruction et la déconstructuration, aussi bien évidente pour l’intuition dans le choix du vieillard atteint de démence sénile placé là pour diriger les USA et qui ne songe pas une seconde à démissionner, que dans le comportement de ceux qui influent sur des décisions sortant du Système, ne peut qu’accentuer la tension extrême entre la population et sa direction et susciter toujours plus de foyers de contrecoup, ou de “coups en retour”.
Bill Gates, qui est une sorte de psychopathe-philanthrope, ou bien philanthrope-psychopathe, disait lors du très-récent sommet ‘Forbes 400 Philanthropie 2022’, dénonçant la polarisation existant aux États-Unis jusqu’à menacer l’équilibre du système et proposant une vision attractive de la vérité accordée à la narrative :
« Cela vaudrait la peine d'investir chez quiconque a de bonnes innovations pour réduire la polarisation et faire en sorte que la vérité soit aussi intéressante que les folies. »
... Puis le philanthrope qui est en lui voulant sans doute écarter un instant le psychopathe qu’il est également en tant qu’enfant du Système, ou bien est-ce l’inverse après tout, – bref il se précipita pour dire, comme hors de propos mais tout de même tout à fait à-propos :
« J’admets que la polarisation politique peut mettre fin à tout cela, nous allons avoir une élection bloquée et une guerre civile... »
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire
Remarque : Seul un membre de ce blog est autorisé à enregistrer un commentaire.