Louise Michel naquit le 29 mai 1830 à Vroncourt-la-Côte (Haute-Marne).
"Fille
naturelle d'un châtelain et d'une servante, dans la Haute-Marne, elle
devient institutrice. À Paris, à partir de 1865, elle se lance dans
l'action aussitôt que la Commune est déclarée. Amoureuse de Théophile
Ferré, l'un des plus intransigeants Communards, elle secourt les
blessés, fait feu sur les barricades, signe des articles dans Le Cri du peuple
(sous le pseudonyme d'Enjolras). En réalité, elle ne joue aucun rôle
important pendant la Commune. C'est son procès à Versailles, en décembre
1871, où elle est théâtralement vêtue en veuve (veuve de Ferré,
fusillé), un voile de crêpe sur le visage, qui la fait entrer dans la
légende. Victor Hugo lui consacre un poème : Viro Major.
Déportée
en Nouvelle-Calédonie, elle s'affirme anarchiste. Elle avait sans doute
été anarchiste d'instinct pendant la Commune, mais dans l'exil, elle va
devenir anarchiste consciente.
«Il
fallait regarder en face l'échec de la Commune, écrit-elle. Et c'est
durant ce voyage que je suis devenue anarchiste. J'avais vu à l'œuvre
mes amis de la Commune, si honnêtes qu'en craignant d'être terribles,
ils ne furent énergiques que pour jeter leurs vies. J'en vins rapidement
à être convaincue que les honnêtes gens au pouvoir sont aussi
incapables que les malhonnêtes sont nuisibles. Il est donc impossible
que la liberté s'allie jamais avec un pouvoir quelconque.
«Si
un pouvoir quelconque pouvait faire quelque chose, c'eût été la
Commune, composée d'hommes d'intelligence, de courage, d'une incroyable
honnêteté [...]. Le pouvoir, incontestablement, les annihila [...].
C'est que le pouvoir est maudit, et c'est pour cela que je suis
anarchiste.»
Anarchiste,
donc, pas seulement par opposition au pouvoir «bourgeois», mais en
opposition à tout pouvoir, de droite ou de gauche. En
Nouvelle-Calédonie, elle entreprend l'alphabétisation des Canaques,
revient en France en 1880, après l'amnistie générale, et anime
d'innombrables meetings. La foule afflue à ses conférences. Elle publie
des poèmes et des romans. Sa célébrité est immense. On la surnomme
«Jeanne d'Arc des barricades», «Prêtresse de la révolution », «Grande
druidesse de l'anarchie», «Sœur de charité de la révolution». À la tête
de quinze mille manifestants en 1883, elle est bientôt inculpée, avec
Émile Pouget, sous le prétexte d'un pillage de boulangerie auquel elle
n'a évidemment pas participé, à six années de réclusion. Graciée en 1886
par Jules Grévy, elle est en 1888 blessée à la tête d'une balle de
revolver et s'emploie à excuser et à protéger son agresseur.
De 1890 à 1904, elle vit en Angleterre où elle fréquente Kropotkine et Malato.
Verlaine lui dédie une Ballade en l'honneur de Louise Michel. En 1895, elle fonde le journal Le Libertaire,
avec Sébastien Faure, et la Ligue des femmes, «pour l'égalité entre les
sexes». Elle y fait l'éloge du célibat et du malthusianisme.
Lorsqu'elle
n'est pas en prison, la police la surveille en permanence. Affiliée à
la franc-maçonnerie, son énergie est intacte malgré l'âge, mais elle se
tue peu à peu en tournées de conférences épuisantes.
Séverine écrit : «Pauvre
fille ! Elle est disgraciée comme la misère, décharnée comme la faim,
désexuée par la douleur. On comprend, à la regarder, le drapeau triste
qu'elle s'est choisi, étant elle-même un drapeau vivant, avec son maigre
corps, qui fait hampe dans les plis flottants de ses vêtements noirs.»
Celle que Léon Daudet appelait «une sœur de charité en carmagnole» meurt le 9 janvier 1905 dans une pauvre chambre d'hôtel à Marseille, où l'avait menée sa tournée de conférences.
À
Paris, cent vingt mille personnes accompagnent son cortège funèbre.
Dans la foule, on reconnaît Sébastien Faure, Émile Pouget, Malato,
Séverine et quelques survivants de la Commune : Vaillant, Camelinat,
Beatrix Excoffon."
Michel Ragon
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