10 août 2022

Les golfs échappent aux restrictions de consommation d’eau

Face à la sécheresse qui frappe la France, 62 départements ont été placés au seuil de crise, le plus haut niveau, et une cellule interministérielle de crise a été activée. En conséquence, les restrictions d’eau sont étendues et renforcées partout dans l’Hexagone. Mais qu’en est-il des terrains de golf ? On vous répond.

Ici, l’arrosage d’un green de golf. Photo d’illustration.

La France traverse une sécheresse qui s’aggrave après des vagues de chaleur excessives et trois épisodes caniculaires en à peine deux mois, rendant encore plus perceptibles les conséquences du réchauffement climatique. Si l’ensemble de l’Hexagone est sous vigilance sécheresse avec des restrictions d’eau à différents niveaux, 62 préfectures ont désigné des territoires en état de crise, le plus haut seuil. La Première ministre Élisabeth Borne a décidé d’activer la cellule interministérielle de crise, vendredi 5 août.

Mais au fait, « l’arrosage des terrains de golf est-il autorisé malgré les restrictions de consommation d’eau ? » La question nous est posée par Jean-Baptiste, de Rennes (Ille-et-Vilaine). On vous aide à y voir plus clair.

Des élus de gauche s’inquiètent

Les golfs bénéficient, effectivement, d’une dérogation spécifique pour l’arrosage. C’est d’ailleurs l’une des inquiétudes émises par Hendrick Davi, député à Marseille (Bouches-du-Rhône), le 31 juillet. Dans une série de tweets, l’élu politique dénonçait : « En période de sécheresse, il est interdit de remplir les piscines mais les golfs doivent seulement réduire leur consommation de 20 % et arroser entre 19 heures et 8 heures. »

Plus récemment, le 2 août, Éric Piolle, maire écologiste de Grenoble (Isère), pointait également du doigt l’arrosage des greens (noms donnés aux zones d’herbe les plus rases des parcours de golf). « Pourquoi peut-on arroser les greens de golf quand tout le monde manque d’eau ? », s’est interrogé le premier édile sur le plateau de BFM TV, le 31 juillet 2022. « Cela montre juste que l’état d’esprit n’est pas le bon état d’esprit. C’est un état d’esprit où l’on continue de protéger les plus riches, les plus puissants. Le mandat d’Emmanuel Macron en est, je crois, le symbole depuis cinq ans », a-t-il ajouté.

« Dans les arrêtés anti-sécheresse, il y a une dérogation pour permettre d’arroser les greens de golf ! Alors qu’on appelle à la sobriété, les pratiques des plus riches sont protégées », a également indiqué Éric Piolle sur Twitter.

D’autres élus de gauche, notamment la présidente du groupe insoumis à l’Assemblée nationale, Mathilde Panot, ou encore Alma Dufour, déplorent aussi cette autorisation en faveur des greens, alors que la sécheresse sévit intensément partout en France.

Quelles mesures s’appliquent pour les golfs ?

Une question se pose alors : pourquoi les golfs peuvent-ils arroser leurs greens malgré une sécheresse historique ? La réponse se trouve dans le « guide de mise en œuvre des mesures de restriction des usages de l’eau en période de sécheresse », publié par le ministère de la Transition écologique en juin 2022.

À la douzième page de ce guide, un tableau liste les mesures minimales de restriction des usages de l’eau à mettre en place par les autorités en fonction du niveau d’alerte. Exemples : l’arrosage des pelouses et des massifs fleuris est interdit en cas d’alerte renforcée et au niveau maximal d’alerte, le seuil dit de « crise ». Idem pour le lavage des véhicules chez les particuliers, le remplissage d’une piscine privée ou encore l’arrosage des terrains de sport, sauf de « manière réduite au maximum pour les terrains d’entraînement ou de compétition à enjeu national ou international ».

Exception faite pour les greens des terrains de golf, peut-on lire sur le guide du ministère conformément à l’accord-cadre golf et environnement 2019-2024. Et pour cause, au premier palier (soit le seuil vigilance sécheresse), seule une sensibilisation « aux règles de bon usage d’économie d’eau » est préconisée. Pour le niveau d’alerte, il est seulement interdit d’arroser « les terrains de golf de 8 h à 20 h de façon à diminuer la consommation d’eau sur le volume hebdomadaire de 15 à 30 % ». Au troisième niveau « alerte renforcée », « une réduction des volumes d’au moins 60 % » est demandée et il est interdit d’arroser les « fairways », c’est-à-dire les zones tondues et roulées d’un parcours de golf, entre le départ et le green.

Concernant le niveau maximal d’alerte, le seuil de crise, s’il est interdit d’arroser les golfs, « les greens pourront toutefois être préservés, sauf en cas de pénurie d’eau potable, par un arrosage réduit au strict nécessaire entre 20 h et 8 h, et qui ne pourra représenter plus de 30 % des volumes habituels ».

Comment expliquer cette dérogation ?

Contacté par France Info, Gérard Rougier, directeur territoires, environnement et équipements à la Fédération française de golf (FFG), indique que « sans eau, un green meurt en trois jours et il faut trois mois pour le faire repousser. Or un parcours sans green, c’est comme une patinoire sans glace, il devra fermer ». Et d’ajouter que l’activité des « 700 golfs qui emploient 15 000 personnes en France » serait menacée.

Toutefois, libre aux préfectures des départements de suivre ces règles dictées par le ministère de la Transition écologique. En Ille-et-Vilaine par exemple, aucune dérogation n’est accordée aux golfs pour arroser.

Face à cette mesure adoptée par le département, certains professionnels ne sont pas de cet avis. Vendredi 5 août, Marie-Christine Paris, présidente du Dinard Golf Club à Saint-Briac, confiait à Ouest-France : « Si on nous interdit d’arroser, tout meurt. On va devoir arrêter notre activité. Je rappelle qu’on parle d’un endroit vivant. »

La Fédération française de golf assure « faire des efforts »

Après l’indignation de nombreux élus et internautes sur les réseaux sociaux, la Fédération française de golf s’est défendue. Interrogé au micro de RMC vendredi 5 août, Pascal Grizot, le président de la fédération, assure que « la filière du golf fait de nombreux efforts ».

« Dans les départements les plus touchés par la sécheresse, on demande à arroser 1,5 % de la surface totale du golf. On fait des efforts sur 98,5 % du reste de la surface », a-t-il expliqué. « On n’est pas en train d’arroser les golfs mais d’appliquer l’accord-cadre qui a été élaboré avec trois ministères pour 2019 à 2024. »

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