C'est avec un préavis de quelques jours que 350 soldats danois ont été envoyés en Lettonie, début mai. La mission était claire : dissuader la Russie d'attaquer la Lettonie, les soldats danois sont sensés aider à défendre ce pays.
Mais dans le camp danois, en Lettonie, les soldats avertissent qu'ils ne peuvent pas maintenir un niveau opérationnel élevé.
Ils ont annulé un entraînement important, car les munitions manquaient, lors d'une manœuvre du bataillon vers l'est. Plusieurs manœuvres ont été annulés faute de munitions, confirme le commandement de la défense.
"Nous manquons de tout, des munitions aux sous-vêtements. C'est la période la plus consternante que j'ai vécue dans les Forces armées danoises. Et j'en ai vu beaucoup en 20 ans !"
"C'est une question de vie ou de mort", souligne Dennis, 41 ans, qui est le représentant conjoint pour environ 300 hommes du bataillon de combat en Lettonie.
"Ça te fait chuter notre niveau. Si Poutine choisit de traverser la frontière, alors nous ne seront pas prêt", dit Dennis, qui pour des raisons de sécurité ne veut pas que son nom de famille apparaisse.
Sa frustration, face au manque de munitions pour l'entraînement, est partagée par plusieurs officiers à qui DR News a parlé.
"Cela pourrait me coûter la vie ou la vie d'autres personnes si Poutine choisit de traverser la frontière", a déclaré Dennis.
Il a 20 ans d'expérience dans les forces armées et a été déployé à plusieurs reprises, dont deux fois à Helmand en Afghanistan.
"J'ai perdu des collègues et vu des gens blessés. Alors je sais de quoi je parle."
Il n'y a pas que les munitions qui manquent au camp. Les soldats sont installés dans des tentes délabrées, avec de la moisissure et un manque cruel d'équipement.
Ne seriez-vous pas difficiles ?
"Bien sûr, nous sommes exigeants, nous voulons ce qui nous est nécessaire. Quand on était à l'ISAF (Mission de l'OTAN en Afghanistan, ndlr), nous avions un haut niveau opérationnel. Les soldats danois pouvaient rivaliser avec ceux de tous les autres pays. Je ne pense pas que nous y arrivions maintenant. Nous n'avons même plus la possibilité de faire du tir. Notre niveau à chuté."
Le Colonel Jens Lønborg : "Cela ne devrait pas arriver"
De retour au Danemark, le colonel Jens Lønborg admet que les soldats déployés n'ont pas emporté de munitions en Lettonie.
"Je suis malheureusement d'accord qu'il y a eu un manque de munitions d'entrainement. Il n'en ont pas emmené là-bas quand ils sont partis, dit Jens Lønborg," qui est chef du département des opérations au sein du Commandement de la défense, qui est responsable des soldats déployés.
Pourquoi ?
"C'est un problème logistique qui n'a pas été résolu à temps. Elles auraient dû être là, et elles n'y étaient pas, c'est une erreur."
"Il n'y a pas d'excuses à cela. Cela ne devrait pas arriver."
Le colonel souligne que le bataillon dispose depuis son arrivé de munitions de combat, en cas d'attaque russe. Il assure également qu'il dispose de munitions spéciales, pour l'entraînement dans les bâtiments.
"Cette semaine, une partie des munitions d'entrainement est arrivée, et aux dernières nouvelles, d'ici la semaine prochaine, tout devrait être là"
Quant aux autres lacunes du camp et à la moisissure dans plusieurs des tentes, le colonel assure que du matériel sera acheminé de façon continue et qu'un nouveau camp sera établi dans les prochains mois.
"C'est nécessaire. L'endroit où ils vivent est trop vétuste. Mais c'était ce que nous avions de mieux à ce moment là."
Au camp de Niflheim, en Lettonie, Dennis souligne qu'il est convaincu que ses commandants feront tout ce qu'ils peuvent pour se procurer des munitions.
"Nous en obtenons un peu, au compte gouttes, mais pas dans la quantité que nous aurions besoins. Nous manquons de presque tous les calibres," dit-il, ajoutant que c'est un problème général dans toutes les forces armées :
Le commandement de la défense rejette l'idée qu'il y a une pénurie générale de munitions pour l'entraînement. Le colonel Jens Lønborg admet cependant que les stocks sont insuffisants pour une éventuelle guerre.
"Il y a sans doute des lacunes, mais il ne faut pas désespérer"
Analyste militaire : La mission en Lettonie révèle l'état de l'Armée
Les critiques des soldats en Lettonie doivent être considérées à la lumière du fait que les forces armées ont été frappées par des réductions de budget pendant de nombreuses années. C'est l'évaluation d'Alexander Høgsberg Tetzlaff, analyste au Centre d'études militaires de l'Université de Copenhague.
Ce n'est pas très amusant, en tant que soldat, de courir dans une forêt et de crier "pan" au lieu de tirer, ou conduire des véhicules ordinaires au lieu de véhicules blindés.
Les soldats sont très frustrés de ne pas avoir les munitions et l'équipement dont ils ont besoin pour être opérationnels. Lorsqu'ils partent ensuite en mission et découvrent qu'il manque toujours quelque chose, c'est simplement la goutte d'eau qui fait déborder le vase, explique Alexander Høgsberg Tetzlaff.
Il a le grade de major dans les forces armées et a été envoyé en Afghanistan, il a donc lui-même vécu les évènements de l'intérieur.
Bien que les forces armées expliquent le manque de munitions en Lettonie par une erreur logistique, cela est perçu par les soldats comme une énième pénurie, après que "les conditions se soient détériorées depuis de nombreuses années dans les forces armées", explique l'analyste militaire.
En même temps, il qualifie le problème "d'énorme", le fait que nous n'ayons pas de stocks de munitions au cas où une guerre éclaterait.
"Pour économiser, la capacité de stockage a été réduite. Il est considéré comme coûteux d'avoir du matériel en stock, mais les imprévus coûtent encore plus cher. Ce serait bien d'en avoir un minimum quand on en a besoin", dit-il.
Des centaines de véhicules et de matériel militaire provenant de casernes à travers le pays ont été envoyés en Lettonie, ce qui exerce une pression sur les forces armées, déclare Alexander Høgsberg Tetzlaff. Par conséquent, il prédit que cela pourrait être un défi pour l'équipe de relève, qui se rendra en Lettonie cet automne.
"Comment diable les préparez-vous à être professionnels, alors que vous n'avez pas le bon équipement et les bonnes armes pour vous les entraîner ? En principe, il y a un risque que nous devions intervenir en Lettonie, où se trouve l'équipement, pour suivre une formation en situation réelle. Et cela, bien sûr, est une situation intenable."
La mission en Lettonie est le plus grand déploiement danois en Europe en 23 ans. Pour l'instant, il doit durer le reste de l'année.
La Russie peut dormir sur ses deux oreilles ! Les armées européennes sont dans un état déplorable...
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire
Remarque : Seul un membre de ce blog est autorisé à enregistrer un commentaire.