L'Ukraine est en train de perdre la guerre et les Occidentaux ne savent pas quoi inventer pour prolonger le conflit, dans l'espoir que la Russie finisse par chuter. A Washington, on fait circuler avec le plus grand sérieux, des cartes sur l'éclatement à venir de la Russie. Pendant ce temps, des centaines d'Ukrainiens sont tués ou blessés inutilement chaque jour, alors qu'il faudrait négocier. Mais l'Ouest sait-il encore négocier ? De ce point de vue, la transcription d'un entretien entre Emmanuel Macron et Vladimir Poutine à quelques jours du déclenchement de la guerre en fait sérieusement douter.
La Bataille d’Ukraine
Journée du 25 juin 2022
Selon Southfront.org:
La nuit du 24 au 25 juin a vu le bombardement massif des positions ukrainiennes dans tout le pays. 40 à 60 missiles russes ont visé les militaires kiéviens en l’espace de quelques heures. Les frappes ont été effectuées depuis le territoire biélorusse, depuis la Russie et la mer Noire.
L’une des cibles était le centre d’entraînement “Desna” de l’armée ukrainienne dans la région de Tchernigov, qui a déjà été touché par des missiles russes à plusieurs reprises. Le centre d’entraînement a été visé une première fois le 17 mai, lorsque 87 militaires ukrainiens y ont été tués, selon le président ukrainien Zelenski. Le 25 juin, les forces russes ont lancé une vingtaine de missiles sur le centre de Desna. La partie ukrainienne n’a pas encore commenté cette attaque. Le nombre de victimes n’a pas encore été révélé.
Selon le maire de Jitomir, 24 roquettes ont touché des installations militaires près de la ville. Des avions russes auraient frappé les installations kiéviennes depuis l’espace aérien biélorusse. La ville de Jitomir n’a pas été touchée. Aucun détail sur les destructions et les victimes des installations de l’armée kiévienne n’a été donné.
Le gouverneur de la région de Lvov, Maxime Kozitski, a confirmé les frappes sur le district de Iavorovski, où se trouve le terrain d’entraînement des mercenaires étrangers. Six missiles russes y auraient visé les installations kiéviennes. Deux d’entre eux ont été abattus par la défense aérienne, quatre ont atteint leur cible.
Selon une source anonyme du ministère ukrainien de la Défense, l’armée russe a aussi détruit plusieurs cibles dans la région de Nikolaïev. Il s’agit notamment du poste de commandement de la 28e brigade des forces armées ukrainiennes situé dans un lycée de la ville et du poste de commandement de la 59e brigade des forces armées ukrainiennes sur l’aérodrome de Koulbakino.
Le ministère russe de la défense a confirmé le 26 juin les attaques par des avions et des missiles Kalibr :
– au 169e centre d’entraînement de l’armée ukrainienne, près de Desna, dans la région de Tchernigov,
– au 199ème centre d’entraînement des troupes d’assaut aérien près de Teterevka dans la région de Zhitomir,
– ainsi qu’au 184e centre d’entraînement des forces armées ukrainiennes près de Staritchi dans la région de Lvov.
À la suite de ces attaques, le redéploiement prévu des 65e et 66e brigades mécanisées et de la 46e brigade aéromobile des réserves stratégiques de l’armée ukrainienne vers les lignes de front du Donbass a été contrecarré.
Le 25 juin, le ministère russe de la Défense a indiqué que les forces aérospatiales russes avaient frappé des installations militaires de l’usine de zinc Megateks à Konstantinovka, dans une partie du territoire de Donetsk encore sous domination ukrainienne. Il s’y trouvait 80 mercenaires polonais, 20 véhicules de combat blindés et 8 systèmes de lancement de roquettes multiples Grad.
Le ministère russe de la Défense a également indiqué que plus de 300 militaires ukrainiens et mercenaires étrangers, ainsi que 35 unités d’équipement, ont été touchés près de Nikolaïev.
On comprend donc que l’armée russe intensifie ses frappes pour écourter autant que possible la guerre, alors que Washington et Londres obligent Kiev à ne pas négocier. Les forces russes détruisent autant de matériel qu’elles peuvent. Et elles visent désormais systématiquement casernes et centres de formation pour empêcher que de nouvelles unités soient envoyées sur le front afin de prolonger la guerre.
Notons d’ailleurs que le personnel du 64e bataillon de la 103e brigade de défense territoriale située à Lvov a refusé de se redéployer dans la zone d’opérations du Donbass, car il est composé de réservistes non formés et manque d’armement lourd.
Le 25 juin, toujours, les forces dirigées par la Russie ont revendiqué le contrôle de la ville de Severodonetsk, y compris de la zone industrielle de l’usine Azot. Toute la rive gauche de la rivière Severski Donets à l’intérieur des frontières de la République populaire de Lougansk est sous le contrôle des forces alliées.
Dans son briefing quotidien, le ministère russe de la Défense a confirmé que les villes de Borovskoïe, Voronovo et Sirotino sont également sous le contrôle total des forces dirigées par la Russie. “La tentative de l’ennemi de transformer la zone industrielle de l’entreprise Azot de Severodonetsk en un point chaud de la résistance a été déjouée. Le territoire de l’usine est contrôlé par les unités de la République populaire de Lougansk” – lit-on dans le rapport du ministère russe de la Défense.
Le même jour, l’état-major général des forces armées ukrainiennes a officiellement reconnu la perte de Severodonetsk, Voronovo, Borovskoïe et Sirotino.
Plus tôt le 25 juin, le maire ukrainien de Severodonetsk a confirmé que les troupes ukrainiennes se sont retirées de leurs positions militaires dans la ville, seuls des civils, qui avaient été pris en otage par les Kiéviens, sont encore sur le site l’usine Azot en attendant d’être pris en charge.
Des reporters militaires russes ont partagé des images des abris anti-bombes d’Azot à Severodonetsk, où les combattants kiéviens retenaient des civils. Les gens sont évacués des sous-sols de l’usine par petits groupes (10-20 personnes). Parmi les personnes évacuées se trouvent des enfants et des personnes âgées.
Les combats se poursuivent depuis le 24 juin dans la ville de Lisitchansk. La route Lisitchansk-Artiemovsk (Bakhmout) est sous le contrôle de l’artillerie russe.
Selon les rapports de la région, des groupes de soldats ukrainiens tentent de briser l’encerclement de Gorskoïe et de rejoindre leurs camarades à Lisichansk ou à Artiemovsk. Certains sont même habillés en civil pour essayer de passer. Un des problèmes que rencontre les fuyards, ce sont les mines placées par l’armée ukrainienne.
Pendant ce temps, les civils quittent leur abri dans la ville de Gorskoïe. L’armée russe a déjà fourni une aide humanitaire aux résidents locaux des zones libérées. La ville a été presque entièrement sécurisée par les forces alliées.
Le 25 juin, l’armée de Kiev a mené une nouvelle tentative de reconquête de l’Ile des Serpents. Des avions et des MLRS ukrainiens ont été utilisés. Cependant, l’attaque n’a donné aucun résultat. Elle a été repoussée par le système de défense aérienne russe Pantsir-S. En conséquence, 1 Su-25 de l’armée de l’air ukrainienne et 12 roquettes ukrainiennes ont été détruites.
Le 26 juin
Le ministère russe de la défense a affirmé que plus de 720 militants ukrainiens avaient été tués, que 12 chars et autres véhicules blindés de combat, ainsi que 16 véhicules spéciaux avaient été détruits au cours de la journée écoulée en Ukraine.
Le nombre de victimes dans les rangs ukrainiens ne cesse d’augmenter. Il s’agit d’une part de la rupture des lignes de défense kiéviennes sous le feu de l’armée russe; d’autre part des attaques russes contre les bases militaires kiéviennes sur différents points du territoire.
Selon Southfront.org:
Selon les premiers rapports en provenance des lignes de front, les forces dirigées par la Russie ont pris le contrôle de la ville de Volcheïarovka le 26 juin. La ville est une zone d’importance stratégique dans la région métropolitaine de Severodonetsk-Lisitchansk.
Les positions militaires russes dans la ville permettent d’établir un contrôle du feu sur la route Lisitchansk-Seversk, qui est la dernière utilisée par les forces armées ukrainiennes pour l’approvisionnement militaire de leurs positions.
L’armée kiévienne a perdu la possibilité de retirer les forces restantes de Lisitchansk. Les forces alliées russes ont établi des positions militaires sur les hauteurs de la ville et maintenant l’autoroute Seversk-Lisitchansk est sous le contrôle total de l’artillerie russe.
Le 26 juin a commencé par une attaque de missiles sur la capitale de l’Ukraine.
Les frappes de missiles ont été effectuées sur le quartier de Chevtchenko, dans le centre de Kiev. Il est rapporté que la capitale a été touchée par au moins quatre missiles. Selon certains rapports, au moins 14 missiles ont touché la ville. Selon Iouri Ignat, porte-parole de l’armée de l’air ukrainienne, Kiev a été frappé par des missiles russes X101 à partir d’avions Tu-95 et Tu-160 qui ont décollé d’Astrakhan et le lancement des missiles a eu lieu au-dessus de la mer Caspienne.
Les missiles russes ont touché les installations de l’usine de construction de machines militaires Artiom. Dans le même temps, l’attaque a touché un immeuble d’habitation située à proximité. Il s’agit d’un immeuble appelé “Lviv Quarter” qui avait déjà été touché lors de frappes le 29 avril. Selon les rapports locaux, les civils ont été évacués de cette maison il y a plusieurs mois en raison de son emplacement près de l’installation militaire. Cependant, selon le maire de la ville, l’ancien boxeur Klitschko, 25 résidents ont été évacués de la maison, quatre personnes ont été hospitalisées, dont une fillette de sept ans qui a été extraite des décombres.
Il n’est pas à exclure que la frappe sur l’immeuble soit due à un tir ukrainien. L’une des vidéos montre la chute d’un fragment d’un missile ukrainien, qui visait à abattre des missiles de croisière russes.
L’armée russe a déjà averti le régime de Kiev que les installations militaires d’importance stratégique, y compris dans la capitale ukrainienne, seraient prises pour cible si les forces armées ukrainiennes déployées dans la région du Donbass ne cessaient pas leurs attaques contre les civils de la ville de Donetsk et des localités voisines..
Alors que le gouvernement ukrainien s’indigne des frappes russes sur Kiev, le 26 juin, son armée a frappé, sans aucun motif militaire le village de Stakhanov en République de Lougansk avec un missile Tochka-U. Au moins 9 maisons ont été détruites.
Selon les autorités de la République de Donetsk, l’armée kiévienne a tiré ces derniers jours plus de 200 obus à partir de lance-roquettes multiples BM-21 Grad, de canons d’artillerie de 155, 152 et 122 mm, ainsi que de mortiers de 120 mm sur le territoire de la République.
13 localités de la République ont été visées. Deux civils ont été blessés à la suite de ces bombardements. 21 bâtiments résidentiels et 1 installation d’infrastructure civile ont été endommagés.
D’autre part, le 26 juin, les forces armées ukrainiennes (AFU) ont à nouveau tiré sur la plate-forme de la plateforme de forage de l’entreprise Tchernomorneftegaz en mer Noire. L’attaque a été confirmée par un représentant des services d’urgence de Crimée.
L’attaque a eu lieu de nuit et a touché la plate-forme de forage flottante auto-élévatrice “Tavrida”. L’obus a touché l’héliport, laissant un trou de près de 5 m de diamètre.
Dans quelle mesure faut-il prendre au sérieux les tensions autour de Kaliningrad?
Un point de vue très posé d’Andrew Korybko dans OneWorld.Press:
“La
Lituanie a récemment informé la Russie qu’elle se conformera aux
sanctions de l’UE contre Moscou en interdisant le transit de
marchandises soumises à restrictions sur son territoire entre la
Biélorussie et l’enclave de Kaliningrad. Selon RT, cette mesure concerne
principalement les ressources naturelles et les machines, qui
représentent la moitié des marchandises reçues du continent. Le
gouverneur régional Anton Alikhanov a rassuré ses habitants en affirmant
que des ferries et des navires seront utilisés pour réacheminer les
produits qui ne peuvent plus transiter par la Lituanie. (…)
Bien
que l’on ne puisse en être sûr, il est utile de rappeler aux lecteurs
que ce minuscule État balte avait auparavant servi de pion américain
pour provoquer la Chine.
Il a récemment permis à la région de Taiwan, reconnue comme partie
intégrante de la République populaire de Chine par la grande majorité de
la communauté internationale, d’ouvrir un bureau diplomatique et s’est
également retiré d’une plate-forme de coopération régionale avec Pékin.
La Lituanie n’avait objectivement rien à gagner de tout cela, c’est pourquoi les experts s’accordent à penser qu’elle a agi ainsi pour s’attirer les faveurs des États-Unis, ce qui pourrait expliquer sa dernière provocation contre la Russie. En d’autres termes, ce minuscule État balte est utilisé comme une arme de guerre hybride par les États-Unis afin de mener des provocations contre des grandes puissances comme la Chine et la Russie. Dans l’exemple actuel, cela pourrait avoir pour but de susciter des titres alarmistes sur la troisième guerre mondiale.
Pour expliquer, les commentateurs occidentaux ont longtemps effrayé leur population avec le scénario selon lequel la Russie aurait l’intention d’envahir le “fossé de Sulwaki”, le long de la frontière polono-lituanienne qui sépare étroitement Kaliningrad de la Biélorussie. Dans leur imagination débordante, le président Vladimir Poutine est un tel ultra-nationaliste que cela ne le dérangerait pas de risquer la troisième guerre mondiale en s’emparant d’un territoire contrôlé par l’OTAN et en risquant probablement une réponse nucléaire des États-Unis en vertu de la clause de défense mutuelle de l’article 5.
Ce scénario n’a jamais été fondé sur des faits concrets, mais il a servi à justifier la violation par les États-Unis et d’autres pays de l’Acte fondateur Russie-OTAN de 1997, qui interdit le déploiement de troupes et d’infrastructures de l’organisation dans la région. Il convient de mentionner que la Russie a critiqué cette évolution à la fin du mois de décembre lorsqu’elle a fait part à l’Occident de ses demandes de garanties de sécurité qui, rétrospectivement, constituaient la dernière chance d’éviter diplomatiquement le conflit ukrainien qui s’est ensuite développé.
Depuis le début de l’opération militaire spéciale de la Russie en Ukraine, le front de Kaliningrad est resté remarquablement calme, ce qui a confirmé l’absence de volonté de Moscou d’aggraver les tensions avec l’OTAN le long de leur frontière commune, contrairement aux affirmations alarmistes de l’Occident au fil des ans. Au cours des presque quatre mois qui se sont écoulés depuis le début de la campagne russe en Ukraine, l’opinion publique européenne s’est toutefois lassée de continuer à soutenir Kiev.
Un sondage d’opinion récemment publié par le Conseil européen des relations étrangères a montré que davantage de citoyens de l’UE préfèrent la paix à la punition de la Russie, ce qui risque de compromettre les efforts de guerre par procuration de l’Occident, dont le secrétaire général de l’OTAN, Jens Stoltenberg, a prédit ce week-end qu’ils pourraient durer des années. Le soutien de l’opinion publique ayant diminué en seulement un tiers d’année, il se pourrait que les États-Unis aient chargé la Lituanie de procéder à un blocus partiel de Kaliningrad afin de provoquer une crise.
L’objectif était de relancer la campagne d’épouvante entourant le scénario du “fossé de Sulwaki” afin de restaurer le soutien de l’opinion publique à la guerre par procuration que l’OTAN mène contre la Russie, par le biais de l’Ukraine. En tant qu’État vassal obéissant, la Lituanie se serait probablement pliée à une telle demande, étant donné qu’elle n’a pas hésité à provoquer la Chine, comme nous l’avons expliqué précédemment. Cet aperçu suggère que le discours sur la troisième guerre mondiale à propos de Kaliningrad est une opération de guerre de l’information.
Cela ne veut pas dire que la Russie ne défendrait pas militairement son intégrité territoriale au cas où l’OTAN bloquerait complètement son enclave balte, mais simplement que ce scénario catastrophe ne s’est pas encore produit et qu’il est donc prématuré de craindre un échange nucléaire imminent entre ces deux rivaux. Tout le monde devrait donc se rendre compte qu’il ne s’agit que d’une provocation artificielle et illégale qui vise en fait à cibler l’esprit des citoyens occidentaux bien plus que le bien-être des habitants de Kaliningrad”.
En attendant, Vladimir Poutine a annoncé une série de contre-mesures pour le 30 juin.
Poutine à Macron: "Désolé mais là j'ai hockey!"
Le Temps retranscrit un extrait d’entretien entre Macron et Poutine à quatre jours du déclenchement de la guerre. On ne peut qu’être frappé par le manque de sérieux et de compréhension des enjeux de la partie française.
“Emmanuel Macron:
Depuis notre dernière conversation, les tensions ne cessent de croître et tu sais mon engagement et ma détermination à poursuivre le dialogue. Je voudrais que tu me donnes d’abord ta lecture de la situation et peut-être de manière assez directe comme on le fait tous les deux me dire quelles sont tes intentions. Et puis après, je voulais essayer de voir s’il y avait encore des actions utiles à conduire et te faire quelques propositions”.
On dirait un étudiant de Sciences Po lors d’une simulation du club Diplomatie. Poutine, lui, rentre tout de suite dans le vif du sujet (c’est moi qui souligne):
“Vladimir Poutine:
Que pourrais-je dire? Tu vois toi-même ce qu’il se passe. Toi et le chancelier Scholz vous m’avez dit que Zelenski était prêt à faire un geste, qu’il avait préparé un projet de loi pour mettre en œuvre les Accords de Minsk. […] En fait, notre cher collègue, M. Zelenski, ne fait rien. Il vous ment. […] Je ne sais pas si tu as entendu hier sa déclaration où il dit que l’Ukraine doit accéder à l’arme atomique“.
A ce moment, la transcription indique une intervention en arrière-plan d’un participant français à la conférence téléphonique:
(Le conseiller diplomatique Emmanuel Bonne: «Mais non, n’importe quoi.»)
Incompétence ou mauvaise foi du conseiller diplomatique, ancien ambassadeur au Liban et ancien directeur de cabinet de Jean-Yves Le Drian? Sans doute les deux! On se souvient en effet que Zelenski avait menacé, la veille, lors d’un discours à Munich, de sortir de l’accord de Budapest (par lequel l’Ukraine ( comme la Biélorussie et le Kazakhstan) avait renoncé à l’arme nucléaire en 1994. Nous avions souligné, dès nos premiers bulletins que ce discours avait été la provocation de trop, à laquelle la Russie était obligé de répondre.
Les faits sont là mais le zozo qui sert de “conseille diplo” au Président se permet de commenter avec désinvolture, morgue et vulgarité les propos du président russe. Au fond, toute la Macronie est résumée dans cette anecdote.
Poutine n’a même pas fait attention, il continue: “J’ai aussi entendu tes commentaires lors de la conférence de presse à Kiev le 8 février dernier. Tu as dit qu’il faut réviser les Accords de Minsk, je cite, «pour qu’ils soient applicables».
Là, on commence à s’amuser. C’est panique à bord chez les Français qui assistent à l’entretien: on hésite entre la mauvaise foi et la panique….
(Les conseillers de Macron: «Non, il n’a pas dit cela», «Je vais lui dire de ne pas rentrer dans une discussion de détail avec lui.»).
Emmanuel Macron va lui choisir l’agressivité:
“Emmanuel Macron:
Vladimir, d’abord une chose, je n’ai jamais dit qu’il fallait réviser les Accords de Minsk. Je ne l’ai jamais dit ni à Berlin, ni à Kiev, ni à Paris. J’ai dit qu’il fallait les appliquer, qu’il fallait justement respecter les choses et je n’ai pas la même lecture que toi des derniers jours.
Vladimir Poutine:
Écoute Emmanuel, je ne comprends pas votre problème avec les séparatistes. Eux au moins ont fait tout ce qu’il fallait, sous notre insistance, pour ouvrir un dialogue constructif avec les autorités ukrainiennes.
Emmanuel Macron:
Par rapport à ce que tu as dit, Vladimir, plusieurs remarques: première chose, les Accords de Minsk, ce sont un dialogue avec vous, tu as totalement raison. Dans ce contexte-là, il n’est pas prévu que la base de la discussion soit un texte soumis par les séparatistes. Et donc, quand ton négociateur essaie d’imposer aux Ukrainiens de discuter sur la base de feuilles de route des séparatistes, il n’est pas respectueux des Accords de Minsk. Ce ne sont pas des séparatistes qui vont faire des propositions sur les lois ukrainiennes!”
Même question que pour Emmanuel Bonne? Le président français est-il incompétent ou de mauvaise foi? Les Accords de Minsk sont un accord entre le gouvernement de Kiev et les républiques autonomes du Donbass, destiné à éviter l’éclatement de l’Ukraine. La France et l’Allemagne ont pris l’engagement de faire respecter les accords par le gouvernement central ukrainien. Et la Russie a le même rôle pour les Républiques du Donbass – dont elle a refusé de reconnaître l’indépendance ou le désir de rattachement avec la Russie en 2014. Il est donc normal que les républiques de Lougansk et Donetsk aient fait des propositions.
Vladimir Poutine:
Bien entendu, nous avons une lecture tout à fait différente de la situation. Lors de notre dernier entretien, je t’ai rappelé et même lu les articles 9, 11 et 12 des Accords de Minsk.
Emmanuel Macron:
Je les ai sous les yeux! Il est bien écrit que le gouvernement de l’Ukraine – paragraphe 9, etc. – propose, et que c’est en consultation et en accord avec les représentants de certains arrondissements des régions de Donetsk et Lougansk, dans le cadre du groupe de contact tripartite. C’est exactement ce qu’on propose de faire. Donc je ne sais pas où ton juriste a appris le droit (une conseillère sourit). Moi, je regarde juste les textes et j’essaie de les appliquer! Et je ne sais pas quel juriste pourra te dire que dans un pays souverain, les textes de loi sont proposés par des groupes séparatistes et pas par les autorités démocratiquement élues.”
Pour parler comme Macron, on se sait pas où il a appris la diplomatie, lui. Rappelons-nous que l’on est dans une phase d’extrême tension et il jette de l’huile sur le feu avec le président russe. En ergotant comme s’il était dans un dîner parisien.
Poutine se maîtrise alors qu’on imagine qu’il aurait toute raison de mettre fin à l’entretien. Et il donne une petite leçon d’histoire et de savoir-vivre diplomatique au petit marquis:
“Vladimir Poutine:
(Ton ferme et agacé) Ce n’est pas un gouvernement démocratiquement élu. Ils ont accédé au pouvoir par un coup d’État, il y a eu des gens brûlés vifs, c’était un bain de sang et Zelenski est l’un des responsables.
Ecoute-moi bien: le principe du dialogue est de prendre en compte les intérêts de l’autre partie. Les propositions existent, les séparatistes, comme tu les appelles, les ont transmises aux Ukrainiens, mais ils n’ont reçu aucune réponse. Où est le dialogue?”
La réponse suivante confirme que l’intelligence d’Emmanuel Macron est très surestimée. Intellect, bien entendu, mais aussi intelligence des situations.
“Emmanuel Macron:
Mais parce que, comme je viens de te le dire, on s’en fout des propositions des séparatistes. Ce qu’on leur demande, c’est de réagir aux textes des Ukrainiens et il faut faire les choses dans ce sens-là parce que c’est la loi! Ce que tu viens de dire met en doute, quelque part, ta propre volonté de respecter les Accords de Minsk, si tu juges que tu as face à toi des autorités non légitimes et terroristes“.
A partir du moment où Emmanuel Macron était, apparemment, prêt à défendre le coup d’État de Maïdan, les guerres du Donbass et le comportement des Kiéviens, comment le président français a-t-il pu jamais prétendre servir de médiateur? C’est ce que lui fait comprendre Poutine:
“Vladimir Poutine:
(Toujours très agacé) Ecoute-moi bien. Tu m’entends? Je te le redis, les séparatistes, comme tu les appelles, ont réagi aux propositions des autorités ukrainiennes. Ils ont répondu mais ces mêmes autorités n’ont pas donné suite“.
Une des règles de la négociation, c’est qu’on ne prend aucune position dont on ne soit en mesure de défendre un pourcentage que l’on a préalablement défini. Là c’est capitulation de Macron en rase campagne: “OK, OK, OK, t’énerve pas comme ça, Vlad! Je retire“. Exagéré? Lisez!
“Emmanuel Macron:
Alors ok: sur la base de leur réponse aux textes des Ukrainiens, ce que je te propose, c’est qu’on exige de toutes les parties une réunion dans le cadre du groupe de contact pour continuer à avancer. On peut dès demain demander que ce travail soit fait et exiger de toutes les parties prenantes qu’il n’y ait pas une politique de la chaise vide. Or, les deux derniers jours, les séparatistes n’ont pas voulu se prêter à cette discussion. Moi, je vais dans la foulée exiger cela de Zelenski. Est-ce qu’on est d’accord là-dessus? Si on est d’accord, je le lance et j’exige une réunion dès demain.”
La répétition du terme “exiger” est suspecte, elle cache une immense faiblesse….C’est ce que Poutine ne se prive pas de faire comprendre:
“Vladimir Poutine:
Donc pour être bien d’accord, dès qu’on aura raccroché, j’étudierai ces propositions. Mais dès le début, il aurait fallu faire pression sur les Ukrainiens, mais personne n’a voulu le faire.
Emmanuel Macron:
Mais si, moi je fais le maximum pour les pousser, tu le sais bien.
Vladimir Poutine:
Je sais mais malheureusement ce n’est pas efficace.
Emmanuel Macron:
J’ai besoin que tu m’aides un peu (malicieux). La situation sur la ligne de contact est très tendue. J’ai vraiment appelé hier Zelenski au calme. Je vais lui redire, calmer tout le monde, calmer dans les réseaux sociaux, calmer les forces armées ukrainiennes. Mais ce que je vois aussi, c’est que tu peux vraiment appeler à calmer tes forces armées pré-positionnées. Il y a eu beaucoup de bombardements hier. Si on veut donner une chance au dialogue, il faut calmer le jeu dans la région. Comment vois-tu l’évolution des exercices militaires?”
Après “exiger”, il est passer à “calmer”. Quelle agitation en face du très calme président russe! Ici encore, je ne peux que recommander de lire le très bon livre de Jacques Baud, Poutine, maître du jeu?. On y verra par exemple que les tirs des troupes des républiques du Donbass dont parle Macron sont une réponse au début d’une nouvelle attaque kiévienne, qui a commencé le 16 janvier – le jour où les Américains annonçaient une attaque russe!
“Vladimir Poutine:
Les exercices se déroulent selon le plan prévu.
Emmanuel Macron:
Donc ils se terminent ce soir, c’est ça?
Vladimir Poutine:
Oui, probablement ce soir, et nous allons certainement laisser une présence militaire à la frontière tant que la situation dans le Donbass ne sera pas calmée. La discussion sera prise en consultation avec les ministères de la défense et des affaires étrangères.
Emmanuel Macron:
D’accord. Vladimir, je te le dis très sincèrement, pour moi, remettre les discussions dans le bon cadre et éviter les tensions est un préalable absolu. Et moi, ce qui m’importe – et je te le demande vraiment –, c’est qu’on maîtrise la situation. Ça, c’est le premier pilier. Et je compte beaucoup sur toi. Ne cède pas aux provocations quelles qu’elles soient dans les heures et les jours qui viennent“.
Emmanuel Macron n’est pas sur la même planète que Vladimir Poutine! Pour ce dernier, la menace de Zelenski de déchirer les accords de Budapest est une réalité. Macron se grise de mots et voudrait que tous les autres fassent comme lui:
“Je voulais très concrètement te faire deux propositions. La première, organiser une rencontre dans les tout prochains jours à Genève entre toi et le président Biden. Je lui ai parlé vendredi soir, je lui ai demandé si je pouvais te faire cette proposition. Il m’a dit de te dire qu’il y était prêt. Le président Biden a aussi réfléchi sur les manières de désescalader de façon crédible la situation, prendre en compte tes demandes et aborder très clairement la question de l’OTAN et de l’Ukraine. Dis-moi la date qui te convient.”
Le président russe finit en diplomate, après que les promesses maintes fois non tenues par le président français ont été réitérées:
“Vladimir Poutine:
Merci beaucoup Emmanuel. C’est toujours un grand plaisir et un grand honneur de m’entretenir avec vos homologues européens ainsi qu’avec les Etats-Unis. Et j’ai toujours beaucoup de plaisir à dialoguer avec toi parce que nous sommes dans une relation de confiance. Donc, Emmanuel, je te propose d’inverser les choses. Avant toute chose, il faut préparer cette réunion en amont. Ce n’est qu’après que nous pourrons parler parce que si on vient comme cela, pour parler de tout et de rien, on va encore nous le reprocher“.
Apparemment la leçon n’est pas comprise par Macron. Poutine vient de lui dire: j’entends des mots, des mots. Mais jamais rien ne vient. Mais le président français défend son “plan com”:
“Emmanuel Macron:
Mais est-ce qu’on peut se dire aujourd’hui, là, à l’issue de ces discussions, qu’on est d’accord sur le principe? Je voudrais une réponse claire de ta part là-dessus. Je comprends ta réticence sur une date mais est-ce que tu es prêt à avancer et à dire aujourd’hui «Je souhaite une réunion à deux avec les Américains, puis élargie aux Européens» ou pas? (conseillère: «Voilà.»)”
De diplomatie lasse:
“Vladimir Poutine:
C’est une proposition qui mérite d’être prise en compte et si tu veux qu’on soit bien aligné sur la façon de la formuler, je te propose de demander à nos conseillers de s’appeler pour se mettre d’accord […] mais sache que sur le principe, je suis d’accord.”
On comprend que les Russes aient forgé le verbe “Makronit”, pour dire “appeler au téléphone à n’importe quelle heure sans motif précis”. Le bavard de l’Elysée n’arrive pas à…raccrocher.
“Emmanuel Macron:
Très bien, tu me confirmes que tu es d’accord sur le principe. Je propose que nos équipes […] essaient de parachever un texte conjoint, une sorte de communiqué à l’issue de ce call“.
Alors Poutine couronne ce dialogue inutile par deux traits d’humour qui ont dû passer au-dessus de la tête des interlocuteurs français. D’une part, il explique “Théoriquement, Manu, j’ai hockey, maintenant”:
“Vladimir Poutine:
Pour ne rien te cacher, je voulais aller jouer au hockey sur glace parce que là je te parle depuis la salle de sport avant d’entamer des exercices physiques. Je vais d’abord appeler mes conseillers.
Emmanuel Macron:
Merci en tout cas Vladimir. On reste en contact en temps réel. Dès qu’il y a quelque chose, tu m’appelles”.
Et puis, pour finir, la gentille leçon au mec sans manières qu’il a en face de lui: à quoi sert de se tutoyer quand on n’a aucune complicité de fait?
“Vladimir Poutine:
Je vous remercie Monsieur le président (en français)”.
Poutine, qui ne fait rien par hasard, renvoie Macron à une époque où le français était la langue de la diplomatie et où la France était admirée pour son respect des formes.
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