26 mai 2022

"Les urgences d'Orléans ne s'en sortiront pas"

La contagion gagne. Alors que le service des urgences au centre hospitalier régional d'Orléans est en crise depuis des mois, l’on apprenait que, depuis mardi 17 mai, celui de Bordeaux était à son tour contraint à des fermetures ponctuelles.

"Et Chinon est actuellement dans la même situation qu’Orléans au plus fort du malaise alors Grenoble va mal", ajoute le docteur Matthieu Lacroix, urgentiste à Orléans. Dans un constat aussi réaliste que pessimiste, ce dernier considère qu’"à effectifs constants, les urgences ne s’en sortiront pas".

Le plan blanc appliqué aux urgences du CHR d'Orléans où la quasi-totalité du personnel infirmier et aide-soignant est en arrêt maladie

Le soutien du secteur privé a ses limites

Rappelons que sous l’égide du conseil de l’Ordre, lundi 18 mai au soir, une nouvelle réunion de crise réunissait notamment les praticiens des urgences du CHRO et leurs homologues de la clinique Oréliance.

Selon nos informations, Oréliance (dont l’activité aurait quasi doublé alors que les urgences hospitalières avaient fermé) connaît aussi ses limites. Ceux qui ont opté pour une activité libérale et privée veillent, légitimement, à protéger leurs équipes et leur mode de fonctionnement. En conséquence, un nouveau niveau de coopération imaginé localement entre public et privé a été abandonné. Bref, aucune évolution majeure à attendre désormais en la matière.

On fait au mieux mais ça ne tiendra pas longtemps" : les urgences d'Oréliance impactées par la crise à l'hôpital d'Orléans

Revenons aux urgences du CHRO qui recevaient, en moyenne, 180 patients au quotidien. Elles ont vu ce chiffre chuter à 50 avant de revenir, actuellement, à une centaine environ.

L’accès aux urgences demeure restreint (inutile de s’y présenter pour une entorse de cheville ou une petite plaie) et les personnels soignants, en arrêt de travail pour épuisement professionnel ces dernières semaines, sont maintenant revenus à leur poste. Mais pas d’embellie pour autant?!

"A tout vouloir rationaliser, ils ont foutu le système de santé par terre. L’Agence régionale de santé (ARS) nous alerte même qu’en matière de généralistes, on n’a pas encore atteint le creux de la vague", déclare le docteur Matthieu Lacroix.

"Aucun espoir  à court terme"

Et de poursuivre : "Le seul espoir réside dans l’augmentation du nombre de médecins et d’infirmières. Mais avec un tel manque d’anticipation, le retard ne sera rattrapé que dans dix ans. On est à l’os. À court terme, d’espoir, je n’en vois aucun?!"

Manifestement abattu, "il est de plus en plus difficile de venir travailler. On a perdu la foi. On a du mal à y croire. On veut bien être altruistes mais nombreux sont ceux à réfléchir à d’autres carrières", l’urgentiste échafaude une issue bien délicate : "Voir si le généraliste peut déléguer certaines missions à une infirmière, ce qui lui permettrait de traiter de petites urgences. Ceci afin que l’on puisse, nous aux urgences, se concentrer sur l’essentiel et l’indispensable."

La carte bleue a remplacé à la carte verte

Le docteur Lacroix évoque le collectif Santé en danger, lancé par le docteur Arnaud Chiche et qui compte notamment une pétition en ligne. Avec le sens de la formule, l’un des intervenants s’épanche sur la crise de l’hôpital public en estimant que "la carte bleue a remplacé la carte verte".

L’urgentiste orléanais, qui se focalise sur les enjeux nationaux, salue donc la démarche entamée par le collectif. Ce qui permettra, sans aucun doute, d’alerter le futur ministre de la Santé... 

Philippe Ramond

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