15 mai 2022

Electricité : l'Espagne et le Portugal décrochent du système de racket européen

Feu vert à la baisse des tarifs d'électricité. Madrid a approuvé vendredi par décret la limitation des prix du gaz qui entre dans la production électrique, afin d'alléger la note d'électricité des ménages comme des industries. « Pour une fois, ce ne sera pas les mêmes qui paieront », a affirmé la ministre de la Transition écologique, Teresa Ribera, en expliquant que la baisse des tarifs sera financée par une réduction des bénéfices des compagnies énergétiques.

Ce nouveau système, âprement négocié avec Bruxelles , va entrer en vigueur de façon simultanée en Espagne et au Portugal. Il reconnaît « l'exception ibérique » et marque un précédent en permettant aux deux pays de décrocher du système tarifaire européen. La Commission européenne a en effet ouvert la porte à ce régime particulier, en reconnaissant que le manque d'interconnexions vers la France. Les flux d'un côté à l'autre des Pyrénées, ne représentent que 3 % à 5 % de la capacité installée en Espagne. Cet isolement empêche la péninsule ibérique d'échanger et d'avoir accès aux énergies renouvelables du nord de l'Europe, ce qui l'oblige à fonctionner, de fait, comme une île.

Réduire la note d'électricité de 25 % à 20 %

Le mécanisme ibérique prévoit un plafonnement du tarif du gaz qui entre dans la production électrique. Les gaziers seront compensés et recevront la différence entre le prix du marché et le tarif plafonné auquel il sera introduit dans le mix électrique. Cette compensation sera financée par une réduction des bénéfices extraordinaires perçus par les compagnies électriques à la faveur de l'escalade des prix. « Seul le gaz sera payé au prix du gaz », a expliqué la ministre, en insistant sur le fait que la flambée des cours doit cesser de contaminer le tarif du reste des énergies mobilisées, nucléaire ou renouvelable.

L'objectif de Madrid est de réduire de 25 à 30 % la facture des ménages, mais aussi des PME et des industries, qui ont vu flamber leurs coûts de production depuis l'été 2021. Avec une hausse telle que certains secteurs gros consommateurs d'énergie ont dû se résoudre à ajuster l'activité de leurs sites ibériques , dans la sidérurgie notamment.

Selon les règles définies avec Bruxelles, l'Espagne et le Portugal vont pouvoir décrocher exceptionnellement du marché énergétique européen pour au moins douze mois.

Plafonnement à 40 euros le MWh sur six mois

Le prix du gaz sera plafonné à 40 euros le MWh durant les six premiers mois, avant de monter progressivement pour atteindre une moyenne de 50 euros le MWh sur l'année, soit la moitié de ce qu'il avait coûté ces trois derniers mois. Le gouvernement espagnol calcule que le système va se traduire par une réduction directe de 30 % de la note d'électricité, avec un mégawattheure à 130 euros en moyenne, au lieu de 210 euros ces derniers mois.

Ce mécanisme s'est heurté durant des mois à l'opposition frontale des principales compagnies énergétiques, Iberdrola et Endesa en tête. Hostiles à l'idée de voir réduits les bénéfices issus de la forte volatilité du gaz, elles espéraient maintenir le système de tarification marginale européen, qui fait que toutes les énergies sont vendues au prix de la technologie la plus chère, à savoir celle des centrales à gaz.

Profits conséquents

Les profits ont été particulièrement importants pour celles, puisque sur l'année 2021, entre éolien, hydraulique et solaire, les renouvelables ont apporté 46,7 % de la production. Jusqu'ici les consommateurs espagnols n'avaient pas profité de ces investissements supposés générer une énergie verte et à moindre coût. La mise en place du nouveau système tarifaire devrait changer la donne. C'est une victoire de la ministre de la Transition écologique, Teresa Ribera, qui depuis près de dix mois s'est battue pour réclamer à Bruxelles une réforme du marché électrique européen .

« Les consommateurs ne comprennent pas pourquoi les efforts dans le déploiement des énergies renouvelables ne se traduisent pas de façon plus directe en factures d'électricité plus basses », insistait-elle l'été dernier dans une lettre adressée à la Commission. En attendant la refonte du système européen, elle a au moins obtenu une exception ibérique. En espérant qu'elle ait un effet d'entraînement pour réduire l'inflation qui a atteint près de 10 % en mars dernier .

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