Elle a refusé jusqu’au bout de renier un homme qui entretenait des esclaves sexuelles : Clare Bronfman, héritière de l’empire de spiritueux Seagram, a été condamnée mercredi à New York à plus de six ans de prison — 81 mois — après avoir plaidé coupable dans le scandale de trafic sexuel de la secte Nxivm.
La peine, qui inclut aussi une amende de 500.000 dollars, est plus lourde que celle réclamée par les procureurs fédéraux de Brooklyn, qui demandaient cinq ans d’incarcération pour l’héritière de 41 ans.
La fille du défunt milliardaire Edgar Bronfman avait plaidé coupable en avril 2019 de fraude à la carte bancaire et d’avoir caché un individu clandestin pour le compte de l’organisation Nxivm créée par Keith Raniere, jugé lui coupable en juin 2019 d’avoir entretenu plusieurs années durant un harem de 15 à 20 esclaves sexuelles.
Mme Bronfman n’était pas accusée de lien direct avec cet esclavage, mais les procureurs avaient fait valoir qu’elle avait apporté à M. Raniere, grâce à sa fortune estimée à 210 millions de dollars, un soutien financier irremplaçable.
« Il ne fait guère de doute que Raniere n’aurait pas pu commettre les crimes pour lesquels il a été condamné sans de puissants alliés comme Mme Bronfman », affirmaient-ils dans un document avant l’audience.
Neuf femmes victimes de l’organisation ont témoigné mercredi, parfois en pleurs, soulignant que Mme Bronfman, qui payait des avocats pour faire taire les critiques de Nxivm, avaient « ruiné » leur vie.
Les avocats de la défense avaient espéré lui éviter la prison, demandant trois ans de libération conditionnelle.
Selon eux, Mme Bronfman ignorait tout des abus sexuels commis par Keith Raniere, perpétrés via une organisation parallèle à Nxivm, « DOS », qui comprenait des « maîtres » et des « esclaves ».
« Se sentir acceptée »
À les croire, elle ne connaissait que le bon côté de l’organisation, basée à Albany, dans l’État de New York, à savoir ses formations favorisant l’épanouissement personnel : des formations qu’elle avait découvertes en 1983 et qui avaient permis à cette femme, mal dans sa peau, de surmonter ses angoisses.
Jusqu’au bout, Clare Bronfman a refusé de désavouer M. Raniere.
« Pendant mes nombreuses années chez Nxivm, j’ai commencé à apprécier la vie, à me sentir acceptée, aimée, heureuse », écrivait-elle au juge new-yorkais Nicholas Garaufis fin août. « Beaucoup de membres de cette communauté sont devenus un peu ma famille, et je ne peux pas tourner le dos à ces amitiés ni nier le profond impact que Keith et Nxivm ont eu sur ma vie », ajoutait-elle.
Ce refus a sans doute contribué à alourdir sa peine.
Elle « a écrit au juge pour dire que Nxivm et Keith Raniere avait changé sa vie pour le mieux. Elle va avoir plus de six ans pour contempler ce sentiment, et décider une fois pour toutes si c’est aussi facile à accepter qu’elle le pensait », a réagi après l’audience le responsable du FBI new-yorkais, William Sweeney.
Des six personnes inculpées dans ce scandale, révélé en mars 2018, Mme Bronfman est la première à connaître sa peine.
Keith Raniere, qui a toujours affirmé que ses relations sexuelles étaient consensuelles, devrait connaître sa sentence le 27 octobre.
Après six semaines de procès, celui qui était considéré comme un gourou avait été jugé coupable des sept chefs d’inculpation retenus contre lui, dont exploitation sexuelle d’une mineure de 15 ans, extorsion et association de malfaiteurs.
Les quatre autres inculpés ont plaidé coupable, dont l’actrice Allison Mack, de la série « Smallville », de deux chefs d’accusation, pour extorsion et association de malfaiteurs.
L’affaire Nxivm a déjà été adaptée deux fois à l’écran : un docu-série, The Vow, qui insiste sur le côté non-sexuel de l’organisation, et un film de Lisa Robinson, Escaping the Nxivm Cult (2019), autour du témoignage d’une mère ayant tenté de sortir sa fille de l’organisation.
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