09 août 2020

Dimanche sans boulot


Alors, vous ne savez pas? Eh bien figurez vous qu’aujourd’hui je me repose! Ça vous la coupe, hein? Pourtant si, je vous assure, c’est décidé, ce sera un dimanche sans les élucubrations nouratinesques. Après tout, j’ai bien le droit moi aussi de me mettre en vacances, d’autant qu’en l’occurrence, c’est moi qui décide et personne d’autre. Alors je vais me balader, voilà! Et puis rien foutre! C’est beau de tout lâcher, comme ça, sans raison particulière, juste pour changer un peu, pour oublier l’espace de quelques heures tout ce qui foire, qui part en quenouille, vasouille, embrouille, cafouille…notre monde à la noix veux-je dire, cet espèce de grand-guignol tragique, plein d’affreux de tout poil qui consacrent leurs vies à nous pourrir l’existence… Du coup, aujourd’hui je glandouille, cap sur la nature vierge, enfin presque…mais ça se trouve encore…je monte à Trounaze (1) en compagnie de mes potes Yves Rognes, lequel en a déjà raz le béret de la vie citadine et Jean Foupallour. Ce dernier a la bonté de m’accompagner, d’abord parce qu’il n’a, en somme, rien de mieux à foutre et ensuite pour ne pas me laisser redescendre tout seul, ce soir, par les chemins escarpés qui nous ramèneront vers le tumulte. Nous allons de ce pas prendre le car. C’est curieux, le car des vallées. Moins qu’avant, certes, puisque aujourd’hui les normes exigent des machines récentes, sûres, clean et en parfait état attesté par des tas de contrôles vachement rigoureux. Quand j’étais petit il en allait tout autrement, vous savez, j’ai connu dans le temps une guimbarde d’avant-guerre dont vous n’auriez pas voulu pour la transformer en abri à migrants, voire en poulailler! Un engin improbable, ça fumait, ça chauffait, ça freinait mal…même qu’un jour ça n’avait plus freiné du tout, quinze morts dont le chauffeur et vingt deux blessés dont le contrôleur, celui qui détenait la petite machine à manivelle, vous savez, comme dans le film (2)…je vous le recommande, celui-là, mal vu par les critiques, mal aimé par ce gauchiard de feu-Rochefort, paix à son âme, qui le considérait comme une crotte de chien sur son étincelante carrière! Pov couillon, va! Un de ses meilleurs rôle, et avec Coluche pour lui filer la réplique, s’il vous plaît! Une pure merveille, je vous assure. Mais ce genre de rigolade avec du second et du troisième degré en pagaille, ça ne plaît pas aux bien-pensants! Pauvre œuvrette condamnée pour cause de vulgarité débile…un peu comme votre serviteur s’il eût bénéficié d’un minimum d’éclairage médiatique… C’est mieux comme ça, pour vivre heureux vivons hors de la vue de nos maîtres à penser convenablement! Et montons à Trounaze dans un superbe pullman quasiment neuf…il possède même une clim, vous savez! Voilà un truc que je n’eusse même pas imaginé, en 1957, quand je rendais visite à Tonton Félix dans sa campagne. Je l’appréciais bien, ce tonton-là, il vivait sagement, sans enquiquiner qui que ce fût… Tout le monde ne l’aimait pas, vu qu’il professait une certaine appétence pour les thèses mal-pensantes…un vieux facho, quoi, il lisait Céline, mais aussi Barrès et même Brasillach, Drieu La Rochelle, tout ça… C’est même lui qui me les avait conseillés, à onze ans, vous vous rendez compte (pas Tonton, moi, évidemment)! Un peu plus tard j’ai pris goût et après ça ne m’a plus jamais lâché…d’où cette incapacité viscérale à hurler avec les loups. Félix, lui, il vivait en dehors du monde parce qu’il aurait préféré qu’on s’entende avec les Chleus plutôt qu’avec les Amerloques et les Communistes, mieux valait donc qu’il disparaisse volontairement de la circulation, dans le cas contraire les gens bien s’en seraient chargés. La liberté, dans les années d’après- guerre, ça consistait à ne pas dépasser les thèses du MRP sur la droite…finalement les choses n’ont guère changé au pays des droidlom, vous y pouvez penser ce que vous voulez mais faut surtout pas que ça se sache… Ça évite les sujets qui fâchent, pas vrai?

Et nous voilà à présent sur le chemin montant, sablonneux, malaisé qui nous conduit au col, vous vous souvenez, l’endroit d’où l’on voit Trounaze, en bas, au loin. Le point culminant, après vous attaquez la descente, en faisant bien gaffe à ne pas déraper, à éviter de vous fouler une cheville, à freiner des talons pour ne pas prendre ce genre de vitesse qui vous entraîne vers la gamelle hyperbolique, style Foupallour jeune (3), sauf qu’à nos âges ça ne pardonnerait plus. Il est chouette le vieux cimetière de Trounaze mais on essaiera d’éviter, autant que possible.
On grimpe. Dans ces cas-là c’est chacun pour soi, trop dur pour discuter, la dernière fois c’était il y dix ans, à peu près, montée épique! Aujourd’hui je sens bien la différence, les années pèsent! Le camarade Yves, lui, c’est autre chose, habitué il déambule, fringant, en se cognant un de ces pétards artisanaux aussi gros qu’un Davidoff de la grande époque. Moins bon, certes, mais Jeannot qui suit le fumeur, commence à donner des signes, ça lui entre dans les naseaux et ça monte au cerveau tout de suite! Bon d’accord le cerveau de Foupallour c’est un machin poussif, pas performant pour deux sous, cependant, survolté aux herbes de Trounaze ça peut donner des résultats étranges, il commence déjà à zigzaguer, le pauvre bougre, sur un sentier de quarante-cinq centimètres de large mieux vaut éviter. Alors je m’époumone à le rattraper, l’animal. On s’arrête un peu, pas grave, sauf que l’autre cannabissé continue de plus belles, tellement shooté qu’il nous a oubliés… On finira bien par le rejoindre, le crapahutage montagneux est ainsi conçu que l’homme de tête finit toujours par s’arrêter, c’est là qu’on le rattrape, forcément, au moins à l’arrivée. En politique c’est très différent mais au fond ça revient au même. Le type qui fait la course en tête, tôt ou tard il se plante quelque part, alors les autres lui recollent aux basques. Prenez Présipède, au hasard, six mois après sa victoire il commençait déjà à dégringoler du piédestal. Et avec un bon coup de gilets jaunes l’effondrement survenait! Sauf qu’une fois à l’Elysée vous n’en sortez plus qu’avec un coup de pied au cul du suffrage universel, demandez à Sarko et à Hollandouille! Reste à savoir si le petit dernier subira le même sort… rien n’apparaît moins sûr! Moi, je ne voudrais pas vous casser le moral mais Macrounette je vous le garantis dix ans, pièces et main d’œuvre! On se le fumera jusqu’en 2027! Autant dire qu’un pourcentage significatif d’entre nous n’en verra pas la fin… Pas drôle, n’est-ce pas! Mais vous envisageriez qui à la place? Les Ripoublicons sont foutus, les Socialos rétamés, quant à la mère Le Pen son rôle fondamental consiste à assurer la réélection du petit bonhomme à sa Bribri. Vous voyez, les balades dans la nature intacte sont propices à la délectation morose. Heureusement Jean Foupallour maintenant vomit tripes et boyaux! Un garçon qui tient si bien le pastis, voilà qu’il ne résiste pas aux effluves du joint…ça promet, on n’est pas encore rendus, par contre lui, pour son compte personnel, il en a déjà rendu pas mal! Comme quoi la langue française recèle aussi ses ambiguïtés! En tout cas, ces petits désagréments changent les idées, j’ai déjà oublié l’ami Macrouille. Et puis, l’avantage de dégobiller en pleine montagne c’est qu’on n’est pas obligé de nettoyer, la nature s’en charge toujours.

Nous verrons bien la semaine prochaine, si je suis de nouveau parmi vous c’est qu’on s’en sera sortis…
Et j’arrive même à publier avant que ce que raconte n’arrive, c’est vous dire le métier!
Bon Dimanche à tous, humectez vous bien et veillez à passer à l’ombre.

Et merde pour qui ne me lira pas.

NOURATIN

(1) Voir DERRIERE NAPOLEON – Chapitre XVI
(2) Les vécés étaient fermés de l’intérieur de Patrice Lecomte avec le concours de Marcel Gotlib, notamment pour les dialogues
(3) Voir DERRIERE NAPOLEON– Chapitre IV

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