19 juin 2020

Réforme constitutionnelle : la consultation populaire aura bien lieu



Par oukase du 1er juin, le Président Poutine a fixé la date de l'organisation du vote populaire consultatif sur la réforme constitutionnelle au 1er juillet. L'opposition russe s'est littéralement focalisée sur cette réforme, lançant des cris hystériques contre la "dictature". Par deux fois, cet oukase a été contesté devant la Cour suprême, qui s'est reconnue incompétente. En effet, le judiciaire ne peut être compétent pour juger d'un acte politique. Ce qui est en ici le cas. Cette consultation populaire, qui fait tant trembler l'opposition, aura bien lieu.

Le vote consultatif populaire concernant la réforme constitutionnelle, qui avait été repoussé sine die pour raison de coronavirus, a finalement été fixé par oukase présidentiel au 1er juillet. Depuis que le calendrier politique intérieur a été rétabli, l'opposition russe crie haut et fort à l'instauration de la dictature. Deux éléments de cette réforme, officiellement, la dérangent : le rappel de la hiérarchie des normes, selon laquelle les normes du droit international sont inférieures aux normes constitutionnelles (voir notre texte); la possibilité spéciale donnée à Vladimir Poutine (et pas à ses successeurs) de se représenter en remettant à zéro le compteur de ses mandats (voir notre texte).

Déjà une première fois, le 10 juin, la Cour suprême avait rejeté un recours formé contre cet oukase du 1er juin, ce qui n'a pas empêché une seconde tentative, moins d'une semaine plus tard. En effet, le 16 juin, Guennadi Rudiak, activiste politique pro-occidental et entrepreneur individuel, a déposé un nouveau recours, qui lui aussi a été rejeté.

La Cour suprême s'est expliquée, assez maladroitement :

"Il entre dans les compétences de la Cour suprême de vérifier la légalité des actes infra-législatifs. La Cour n'est pas compétente pour examiner un recours contre la loi portant modification de la Constitution"

Maladroit, car le recours est formellement constitué contre l'oukase présidentiel et non pas contre la loi portant révision de la Constitution, qui n'est pas encore entrée en vigueur, donc ne peut de toute manière pas être attaquée puisqu'elle n'est pas opposable sans qu'il soit question de répartition de compétences entre les juridictions. Toutefois, n'ayant pas accès à l'argumentation du recours, il est possible que le requérant ait attaqué sur le fond.

Dans tous les cas, la Cour n'aurait pu se reconnaître compétente, sauf à entrer en politique. La décision de recours à un vote populaire consultatif, ce qui est l'objet de l'oukase contesté, est une décision politique. Le judiciaire n'est compétent que pour trancher les conflits juridiques, non politiques.

En France, le Conseil d’État a développé depuis longtemps la théorie des actes de gouvernement, selon laquelle il ne se reconnaît pas compétent pour traiter des questions relevant des rapports entre le législatif et l'exécutif, et des relations internationales. Il y a évidemment des exceptions, tout acte politique n'est pas en dehors de la compétence du judiciaire, mais le juge ne peut intervenir qu'avec parcimonie dans le domaine politique, s'il ne veut pas perdre sa légitimité.

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