15 avril 2020

La difficile sortie du "camp global de rétention" Covid : les scénarios du déconfinement


4 milliards de personnes confinées dans le monde, cela signifie 4 milliards de personnes privées de liberté, assignées à domicile, depuis plusieurs semaines. Simplement parce que ce sont des êtres humains. Aucun système totalitaire par le passé n'est parvenu à un tel résultat de manière aussi efficace par le passé que notre système "libéral". Sans que des réactions de résistance ne se fassent massivement voir, car "c'est pour leur bien", car nous vivons dans des pays "libres". Donc ça ne se discute pas. Donc l'on ne discute plus, l'on obéit. Puisque c'est pour notre bien et qu'il faut être "responsable". Pour ne pas être coupable. Le danger présenté par le coronavirus doit justifier, à l'échelle de la planète, des méthodes ressortant de la logique des systèmes totalitaires, dans le sens direct du terme, à savoir un contrôle total de l'individu, mental et physique. Mais comme cette situation ne peut durer éternellement sans réellement basculer dans un système totalitaire dur, ce que mythe libéral ne peut se permettre puisqu'il s'est construit justement en opposition à un système étatique fort, il va bien falloir ouvrir les portes du camp de rétention global. Ce que Macron a tenté de faire dans son discours du 13 avril, annoncer une date, la date, le 11 mai, pour l'ouverture des portes et un retour à la normale. Immédiatement, l'incertitude et le relativisme ont été introduits par les ministres et cette étrange valse à trois temps de la peur/espoir/restriction a pu reprendre. Le comment et le pourquoi du déconfinement sont au centre de nos préoccupations. Car, finalement, nous serons libérés parce que le virus sera vaincu dans quelques jours ? L'on peut en douter ... Qu'est-ce qui changera, réellement, en plus du discours ? Autrement dit, qui de notre société ou du Covid sera vaincu? In fine, ça dépendra de nous. De chacun d'entre nous. De notre capacité individuelle et collective à l'obéissance.

Du confinement à la liberté restreinte et provisoire

Des portes commencent à s'ouvrir dans plusieurs pays d'Europe. L'Autriche, très à la pointe sur le déconfinement, rouvre les petits commerces et les coiffeurs, les parcs avec un contrôle. Ainsi, je cite l'article :
"Les Autrichiens retrouvent ce mardi une liberté restreinte et provisoire."
C'est bien un langage appartenant au registre pénal qui est employé. Et qui est appliqué à des personnes n'ayant commis aucune infraction. Qui correspond à la situation d'environ 4 milliards d'êtres humains de par le monde.

En tout cas, l'interrogation sur le déconfinement touche toute l'Europe. L'Espagne commence à alléger le régime, l'activité reprend, mais avec masques et distances de sécurité. Au Danemark, le Gouvernement veut accélérer le déconfinement et rouvrir les écoles cette semaine. La Suède résiste toujours à la tentation totalitaire, malgré des attaques médiatiques assez fortes. La Russie n'en parle pas, en revanche dans le pays certaines grandes industries sont rouvertes, même si les mesures deviennent de plus en plus contraignantes pour la population et les PME (notamment dans la capitale) et que l'enseignement à distance continue, même s'il est inefficace (seulement 25% des élèves ont accès à un enseignement depuis qu'il est à distance, selon le ministre russe de l'Enseignement), ce qui finalement est une bonne chose - pour que l'on rouvre les salles de classe.

Il s'agit bien à chaque fois d'un déconfinement par étapes, comme recommandé par le Think tank américain dont nous avions parlé (relire ici) pour ne surtout pas donner cette bouffée d'oxygène pur aux populations, qui seraient trop rapidement grisées par un excès soudain de liberté et pourraient se réveiller. A chaque fois, en revanche, des mesures liberticides persistantes sont prévues, à chaque fois l'incertitude est posée quant aux délais, à chaque fois les populations sont prises en otages et considérées comme seules responsables des mesures adoptées : toute résistance, c'est-à-dire toute violation du régime d'assignation à domicile étant présentée comme un risque d'allongement des mesures contraignantes. Finalement, pour appeler les choses par leur nom, c'est du chantage à la soumission.

La réaction de la France était très attendue, car avec Macron elle est devenue le leader de l'idéologie néolibérale en Europe. Ce qui ne veut pas dire qu'elle soit le leader de l'Europe. En plus, les mouvements globalistes sont très bien implantés, et dans les structures de pouvoir et dans la société civile. Le discours de Macron, et les réactions qu'il a entraînées, sont en ce sens très intéressants. La France, comme les autres pays européens, se dirige vers une levée des sanctions contre les populations, mais de manière aléatoire, incertaine et dans la durée. La gouvernance par l'incertitude est bien la marque de cette époque, ce qui va à l'encontre de la logique moderne, par exemple du principe de prévoyance en droit, selon lequel chaque personne doit savoir à l'avance ce qui est autorisé et interdit. Ce qui devient objectivement difficile.

Sortie le 11 mai, une nouvelle époque s'offre à vous mes amis. Enfin, on verra, dixit Castaner, ce n'est pas la date du déconfinement, mais du confinement certain. Donc une totale incertitude psychologique.

Condamnation des mesures restrictives de liberté supplémentaires adoptées par les maires dans certaines villes. Mais pour le ministre de l'Intérieur, parfois, ce n'est pas si mal, enfin il faut voir. Même si c'est illégal, c'est parfois justifié ... Donc aucune certitude juridique.

Mais un point est particulièrement révélateur, la question de la réouverture des écoles. En principe, dans tout système idéologique, les écoles jouent un rôle fondamental, elles permettent le conditionnement idéologique de la population dès le plus jeune âge. Si un doute persiste, il suffit de jeter un œil sur l'évolution des programmes d'histoire, sur l'introduction des nouvelles "valeurs", notamment concernant le comportement sexuel, le rôle des hommes et des femmes, etc. Or, l'un des premiers effets du coronavirus, qui touche très peu les jeunes enfants à la différence de la grippe, a été de faire passer l'enseignement scolaire et universitaire à distance. Les pays ont, en ce sens, suivi les recommandations de l'UNESCO, de l'OCDE et de la Banque mondiale. Ainsi, début avril, 188 Etats ont annulé les cours, la distanciation de l'enseignement concernait alors 91,3% des élèves et étudiants dans le monde, soit environ 1,58 milliard de personnes. C'est bien ça le monde global.

Pourtant, cette mesure a un double effet pour le système idéologique dominant : coupés des sources "d'endoctrinement" et remis entre les mains de la famille, ce sont les liens naturels qui se reconstituent. C'est pourquoi, alors que le déconfinement est envisagé, le retour des enfants dans les écoles est une des premières mesures évoquées. Evidemment, l'on parlera d'égalité des chances. Mais la réaction, en France, des syndicats est significative : au secours, restez chez vous. Le processus d'intoxication de la guerre psychologique produit des effets dans le temps (voir notre texte sur les éléments de guerre psychologique dans le cas du coronavirus) et l'illogisme de la situation, sur le plan sanitaire, si danger il y a, apparaît clairement :
“C’est tout sauf sérieux de rouvrir les écoles le 11 mai car on nous dit que tous les lieux publics sont fermés, les cinémas, les salles de spectacle, mais pas les écoles, alors que l’on sait que c’est un lieu de haute transmission, de haute contamination, il y a un manque de précaution, ça paraît être en contradiction totale avec le reste”, a réagi Francette Popineau, secrétaire générale du Snuipp-FSU, premier syndicat du primaire, interrogée par l’AFP.
C'est bien ici une impasse de la crise socio-politique du coronavirus : soit le virus présente un danger d'extinction de l'humanité et les mesures adoptées sont, en fait, trop légères, soit le virus ne présente pas un danger d'extinction de l'humanité et les mesures adoptées sont trop fortes. Dans tous les cas, les mesures sans précédent, qui sont prises aujourd'hui de par le monde, sont ne sont pas proportionnelles. Dans tous les cas, elles provoquent une incompréhension.

Qui du virus ou de notre société aura été vaincu ?

Et la question que pose la mise en route du déconfinement, même partiel, même incertain, même "sous menace" est de savoir qui, du virus ou de notre société, aura in fine été vaincu.

Autrement dit, le déconfinement signifie-t-il que nous ayons, "nous monde global", vaincu le Covid, donc qu'il disparaîtra de nos vies ? Non, personne ne le prétend. Comme personne ne prétend que, désormais, toutes les maladies sont vaincues. Donc, le risque sanitaire existera toujours. Donc, théoriquement (?), si les populations restent bien sages, elles pourront périodiquement, lorsque cela sera nécessaire, être replacées en assignation à domicile. L'expérience, techniquement, a objectivment réussi, les Etats sont extrêmement dociles et finalement aucune résistance systémique n'a eu lieu. 4 milliards de personnes consignées à domicile, c'est une victoire qu'aucun système totalitaire par le passé n'a pu envier au système libéral.

Mais cela signifie-t-il pour autant que notre monde va fondamentalement changé ? Il y a peu de chances. Même si cela aussi va dépendre de nous. Il y a bien des tentatives pour changer la société à différents niveau. Sur le plan individuel, les gens vont-ils réellement prendre l'habitude des masques et des distances sociales ? Dans ce cas, adieu l'apéro et tout un mode de vie. Les utopistes totalitaires ont toujours eu ces envies de couper les relations humaines, pour couper l'humain en l'homme, mais ces tentatives n'ont jamais été fructueuses sur le long terme. Sur le plan étatique, le mythe de l'Etat-numérique, qui est la voie programmée de la disparition de l'Etat, n'est pas une grande réussite. La justice dysfonctionne de manière systématique quand elle ne fonctionne qu'à distance, les administrations sont encore plus déstabilisées, le service public scolaire n'est plus apte à remplir ses fonctions (principale/enseignement et secondaire/endoctrinement), etc. Sur le plan social, il y a bien une tentation de faire entrer dans la vie quotidienne, certains fantasmes. Par exemple, les routes étant vidées de voitures, l'on peut voir ressurgir des tréfonds de l'histoire la politique du "grand bond en avant" ... pour les voitures sans pilotes. Tant qu'il n'y a pas de voitures ... Parce qu'il n'y a pas d'investissement public plus urgent aujourd'hui face à la crise socio-économique grandissante et désormais inévitable (voir notre texte sur la situation sociale). Les fantasmes ont la furieuse tendance à se fracasser sur le mur de la réalité.

Les mythes ont en général beaucoup de difficultés à s'implanter dans la réalité. Par exemple, imaginer qu'un contrôle total des déplacements de la population va permettre de réduire le risque sanitaire est absurde. Tel est le cas à Moscou, où un système de laissez-passer pour les transports est entré en vigueur aujourd'hui. Selon les médias russes, l'on voit des embouteillages monstres sur les grandes artères entrant dans la ville et à l'intérieur, allant jusqu'à 10 km de voitures entassées, et des attroupements compacts à l'entrée des stations de métro, où les gens, coincés les uns sur les autres, attendent jusqu'à 40 minutes. Sur le plan sanitaire, a priori, l'on ne peut faire mieux ... Le maire de la capitale a simplement décidé d'un contrôle total, systématique de toute personne qui se déplace autrement qu'à pied. Ainsi, les fameuses "distances sociales" sont impossibles, les médecins arrivent en retard, etc.

Le plus grand risque dans la situation que nous vivons ... vient de nous. De notre capacité étonnante à nous adapter à tout. De notre capacité étonnante à accepter, relativiser, tant que cela ne nous touche pas de trop prêt. Et encore, l'argument avancé, même s'il est faussé, est imparable : l'on veut votre bien. Actuellement, en tout cas en France, lorsque l'on voit la réaction de l'opposition, hystérique et jusqu'auboutiste, le salue n'est manifestement pas à attendre de ce côté-là. La seule manière dont ce monde global à tendance totalitaire peut gagner, c'est avec notre aide. Lorsque non seulement sous acceptons de jouer un jeu dont l'on ne connaît pas les règles (sans même parler de les maîtriser), mais lorsque, pris dans la tourmente de la peur, l'on demande des mesures de contrôle, des mesures totales, incontournables, soi-disant pour se protéger - éternellement ? Lorsque finalement la peur l'emporte, la peur de sortir, la peur de vivre encore plus forte que la peur de mourir. Donc, lorsque l'on abandonne toute rationalité.

Tout dépend de nous. Personne ne peut nous libérer de notre prison mentale.

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