Aussi peut-on aisément comprendre que je sois si fortement impressionné par le très court commentaire qu’il fait, après avoir cité un article de Wikipédia sur les émeutes de gangs des bas-fonds à prétention idéologique qui eurent lieu dans la partie byzantine et sauvegardée des restes agonisants de l’Empire du monde, à Constantinople en 585, – les “émeutes de Nika”, qui furent maîtrisées par les hommes (Belisarius, Marses et Mundus) de l’empereur Justinien Ier. Après avoir cité un extrait de l’article, Lang commente, – et ce commentaire de Lang se nourrissant, à mon sens, des contacts qu’il continue d’avoir dans les forces armées :
« Je n’avais jamais envisagé sérieusement jusqu’ici une crise politique qui nécessiterait l’emploi des forces armées US dans notre pays. Mais je l’envisage désormais.
» Les forces armées observent aujourd’hui le chaos aux USA entre les “Progressistes” révolutionnaires et les “Déplorables” contre-révolutionnaires. Nos équivalents des Belisarius, Marses et Mundus sont en train de mesurer les possibilités de maîtriser cette discorde. Ils ne croient certainement pas que ces possibilités soient des meilleures.
» L’affrontement politique peut très facilement conduire à un affrontement réel. »
Je parle souvent et depuis longtemps de “tourbillon crisique” et chaque jour montre son extension, mais pour le coup on voit la confirmation que sa forme et sa dynamique sont particulièrement justifiées. La situation politique aux USA est vraiment comparable à un tourbillon qui ne cesse de semer son propre désordre et de l’amplifier à chaque nouveau mouvement, de générer son propre mouvement et de l’accélérer, de creuser toujours plus profondément le trou d’un désordre sans fin... Bien qu’on s’y croit habitué et qu’on soit tenté de laisser les choses aller sans plus y prêter attention, par instant on est obligé d’y revenir en se disant qu’il faut tout de même faire une rapide revue de détail pour se voir confirmé d’y croire, pour fixer un instant cette vérité-de-situation.
Ici, aujourd’hui, fixons cet instant de vérité-de-situation, pour mieux comprendre la terrible gravité des quelques lignes du colonel Patrick Lang... Qu’il s’agisse de la nomination de Brett Kavanaugh à la Cour Suprême, avec les accusations d’abus sexuels vieux de plus de trente ans et ses divers rebondissements manipulés par les démocrates ; qu’il s’agisse du “coup d’État permanent”contre Trump et de la subversion ouverte de l’adjoint au ministre de la justice (ditto, l’État profond), des pratiques décisionnaires du président Trump via les tweet auxquels plus personne ne comprend plus rien, des souhaits d’élimination physique du même président de la bouche du gouverneur de la Californie, de la folle décision de sanctionner les achats d’armes russes par la Chine et en général des pratiques de gangster international de cette administration Trump, de la tyrannie censureuse des GAFA, de la désormais-possible victoire des démocrates devenus une annexe de la CIA aux prochaines élections – et ainsi de suite, et suite sans fin...
Un lecteur du texte de Lang, sous le pseudo de VietnamVet, fait un commentaire sans trop de longueur mais bien structuré, après l’avoir introduit par le simple mot “True” (“C’est vrai”, ou “Juste”) qui fixe son jugement général. J’en extrais cette courte phrase qui est chargée d’une terrible substance explosive et pourrait ainsi servir de symbole : « The tragedy is that Georgetown Prep and Yale alumni have no fear of lampposts or Hiroshima » ; on pourrait traduire, en adaptant la phrase comme je la comprends : “La tragédie est que nos élites (venues de Georgetown ou de Yale) n’ont plus peur des catastrophes révolutionnaires (les lampadaires [servant de potence]) ni d’une guerre nucléaire (Hiroshima)”.
Je crois volontiers que l’actuelle tragédie prend si souvent des allures de “tragédie-bouffe” pour mieux se dissimuler ce qu’elle ne veut pas voir, et montrant ainsi que l’on a perdu le sens des choses, le sens de l’histoire, c’est-à-dire pour en revenir à l’expression elle-même, – le sens de la tragédie. Il faut observer tous les événements en cours avec ce fait fondamental à l’esprit, pour mesurer leur juste et profonde gravité. Effectivement, notre époque de postmodernité qui a décidé que le passé n’existe plus puisqu’il ne correspond pas aux conceptions du présent (le “Big Now”) est un temps qui refuse la tragédie pour mieux pouvoir affirmer sa vertu et afficher son suprémacisme c’est selon. Par conséquent, elle ne croit plus aux deux extrêmes de la tragédie historique, la guerre civile et la guerre nucléaire ; et pire encore si elle en parle, car elle parle beaucoup, elle ne réalise plus ce que c’est que la guerre civile ni ce que c’est que la guerre nucléaire.
Il est remarquable de voir combien peu parmi les critiques de Poutine dans l’épisode Iblid/Il-20, dans ce cas surtout les hyper-antiSystème et leur affectivisme déplorant avec colère et mépris la prudence sinon ce qu’ils jugent être la couardise du président russe, combien peu ont mis dans leur discours l’expression “guerre nucléaire” et ce que cette expression signifie vraiment (anéantissement probable, pour tous). J’aurais bien du mal à mesurer la stature historique de Poutine mais je sais au moins une chose, c’est qu’il est l’un des très rares dirigeants politiques à réaliser exactement ce qu’est une guerre nucléaire et qu’elle n’est jamais plus possible que lorsque la Russie se trouve, directement ou indirectement, face aux USA.
(Et c’est le seul dirigeant qui soit capable d’émettre une telle réflexion terrible et décisive, lorsqu’il est confronté à une question [en avril 2018] sur la guerre nucléaire et sur la décision de la Russie d'engager ses armes nucléaires stratégiques si elle était attaquée : « Certes, ce serait une catastrophe planétaire, ce serait une catastrophe absolue pour le monde entier et l’humanité. Mais en tant que citoyen russe et dirigeant de l’État russe, je me pose la question : à quoi bon ce monde s’il n’y a plus de Russie ? »)
Quoi qu’il en soit, il n’y a rien d’autre à attendre de “D.C.-la-folle” que les éclats extraordinaires de la démence maquillée en idéologies dont la vertu se mesure à l’extrémisme. C’est pourquoi je suis si frappé par l’extrême gravité et l’inquiétude des propos du commentateur Patrick Lang, dont l’expérience et les contacts qu’il entretient avec des milieux militaires témoignent du crédit qu’il faut leur accorder. Nous ne sommes pas, et nous ne sommes plus depuis un certain temps déjà au cœur d’une bataille où il y aurait un gagnant et un perdant, mais bien au plus profond d’un tourbillon crisique dont les effets dévasteront tous les acteurs et tous les partis.
J’insiste constamment sur cette situation de totale perte de contrôle du facteur humain sur son propre destin en faisant allusion, avec ma “foi du charbonnier”, à ces forces supra-humaines qui sont à l’œuvre aujourd’hui. Je pense que c’est la seule voie possible, pour le travail de l’esprit si l’on veut qu’il travaille encore, pour ne pas verser dans l’emportement de sa propre démence et dans la construction de ses simulacres de convenance.
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