19 septembre 2018

Langue vernaculaire


L’Algérie c’est très compliqué. Des siècles et des siècles de voisinage par Méditerranée interposée, mais aucune entente réelle, rien qui permette d’affirmer qu’un jour ou l’autre nous pourrons nous entendre avec ces voisins-là. Mes lointains ancêtres établis sur les rivages de la mer en question, nourrissaient à leur égard une trouille effroyable, au point, durant tout le Moyen-Age, de construire leurs villages au sommet d’éperons rocheux offrant une vue imprenable sur les embarcations approchant de la côte et constituant des positions défensives quasi-inexpugnable. Plus tard, aux XVI ème, XVII ème et XVIII ème. siècles, le danger se limitant à de brèves incursions plus ou moins nocturnes, ces braves-gens redescendirent en bord de mer, histoire de mieux profiter des avantages de la civilisation. De temps en temps toutefois, quelques filles ou quelques jeunes gens imprudents, se laissaient attraper par les « Barbaresques » lesquels les emmenaient de l’autre côté sur les marchés aux esclaves et, la plupart du temps on n’en entendait plus jamais parler. Du coup, aux XIX ème. siècle, les Français, joignant l’utile à l’agréable, décidèrent carrément d’annexer l’Algérie par la force, faisant ainsi disparaître les petits emmerdements sus-évoqués, tout en récupérant une colonie de première bourre. Un gros siècle plus tard, en 1962, sous la pression d’une communauté internationale américano-bien-pensante, la France renonçait et rapatriait les infortunés, coloniaux et autres Juifs et Harkis, dont le tort avait été de croire à la pérennité de ladite combine. Cela s’opéra toutefois au prix d’une espèce de guerre, fort malsaine au demeurant, dont les séquelles atroces demeurent encore dans les esprits de ceux qui la vécurent.

Parmi ces derniers figure en bon rang notre ami Maurice, le vieux Maurice, le pilier à demis-pression du bistrot de cette brave Thérèse. Et il ne décolère pas, le cher homme, la rogne et la grogne à fleur de peau, dites donc!
– » Non mais des fois, vous réalisez, bordel de merde de putain de dieu, cet espèce de petite fiotte à deux balles qui présente ses excuses pour une ordure de sale traitre qui combattait contre nous, du côté des Fellouzes! Alors c’est ça Macrouille, l’intelligence avec l’ennemi, désormais, ça devient un titre de gloire, un truc à vous citer à l’ordre de l’Armée, pas vrai? L’acte héroïque par excellence! Non mais on part en couilles les pieds en avant, complètement, définitivement, sans rémission ni recours, la mort de mes os! Il aurait pu au moins attendre qu’on soit tous cannés, nous autres, les pauvres connards envoyés par la Répupu se faire crever les yeux et couper les baloches, juste pour obéir aux socialos à la con, genre le pépère Guy Mollet et l’illustre Mitterrand, qui drivaient le truc à ce moment-là.
« Bien sûr, les Cocos étaient contre. Forcément. Une habitude bien ancrée chez ces endoffés de mes couilles qui n’obéissaient qu’à Moscou. Vieille habitude, vous savez, sans la disparition de l’Union-Soviétique ils en seraient encore là, c’était leur patrie l’URSS, leur raison de vivre et leur seul amour sincère. La France, elle, ils attendaient simplement qu’elle entre au bercail, qu’elle rejoigne la merveilleuse Internationale, celle dont ils rêvaient tous au point de se la fantasmer à bloc; la réalité virtuelle, ils avaient inventé, ces andouilles de Rouges! Ils voyaient, sentaient, dégustaient un machin qui n’a jamais existé que dans leur imagination à faucille et marteau, ils vivaient leur rêve, quoi, jusqu’au bout, jusqu’à la trahison, jusqu’à vouloir la mort des copains, parfois des frères…père et mère ils auraient liquidés, pour peu que l’ordre leur en arrive du Comintern, je vous jure!
« Sans compter qu’ils auraient eu bien tort de se gêner, les bougres, souvenez vous de Thorez, tiens…ah oui, comme tu dis Jeannot, c’est qui ça Thorez? Ben Thorez c’était un communard de haut vol dans les années trente à cinquante, un fumier qui préféra s’éviter le crève-cœur de combattre les Allemand en 39/40, vu qu’à l’époque ces derniers avaient signé le « Pacte Germano-Soviétique », en gros, Hitler et Staline, même combat! Alors pas question de guerroyer contre les Chleus…il foutu le camp au Kremlin, le Thorez en question, et il y a passé toute la guerre…Mais non, Jeannot, enfin t’es vraiment con pire qu’un électeur socialiste, toi! Pas au Kremlin-Bicêtre, sacrebleu, à Moscou, merde! Bois ton pastis et ferme là, patate, on cause sérieusement, là! Je cause, merde! Oui, c’est ça, un déserteur, exact, un type qui est passé à l’ennemi, en somme…sauf que lui, il a eu la main heureuse, l’ennemi c’est devenu tout à coup le sauveur de la France, le « Petit Père des Peuples », comme ils disaient. Par contrecoup, les Communistes restés en France…ben oui, seuls les pontes triés sur le volet s’étaient vus invités en Russie, forcément… se sont mis à résister aux Fridolins. Au bout du compte, le camarade Thorez, au lieu de le refiler au peloton d’exécution ils en ont fait un ministre, à la Libération…Libération mon cul! Douze ans après on nous envoyait dans les collines de merde du Sud-Algérien pour défendre une illusion dont les ordures qui nous gouvernaient n’étaient même pas dupes. Une République de charognes, la Quatrième, un conglomérat informe de Communards et de Socialos avec une bande de centristes-ventre-mou, le MRP, qui venaient compléter le tableau. Et nous autres, on crevait pour ça, pour rien, mais souvent dans la douleur, vous savez, les libérateurs de l’Algérie se faisaient un plaisir, quand ils chopaient l’un des nôtres, de se venger avec la cruauté la plus recherchée, de tous les profiteurs du burnous qui sue.
« Alors, évidemment, quand l’armée en chopait un, elle le faisait parler. Rien de glorieux, je reconnais… Seulement elle a sauvé beaucoup de copains, la gégène, faut savoir ce qu’on veut, quand vous lui brûlez le bigoudi-valseur au deux-cent-vingt volts, le type a tendance à s’exprimer, voyez vous, il n’apprécie que lorsque ça s’arrête, alors il fait tout pour… Mais le communiste de Présipède, là, le traitre bien aimé à qui il demande pardon au nom de la Répupu Franchouille, on n’a pas dû avoir besoin de le mettre au courant avec les électrodes, le mec, en général ceux-là parlaient avant…L’électrification c’était pour les plus durs, les combattants du Bled profond. Mais ils l’ont zigouillé, au couteau, le Coco, c’est ce con d’Ausaresse qui est allé raconter ça avant de claquer… le gâtisme, faut croire, on ne sait même pas si c’est vrai. En revanche, la certitude c’est que le défunt combattait contre nous, ses compatriotes, ses copains, ses amis, ses frères si ça se trouve, et il dégoulinait de leur sang, la salope! Et maintenant, l’autre petit trou du cul qui va présenter les excuses! Ce faisant ce faisan nous crache à la gueule, l’enfoiré…mais c’est vrai aussi qu’on est des vieux…et des morts, souvent…alors qu’est-ce qu’il en a à foutre, hein, je vous le demande? Les vieux votent mal et les morts, plus du tout…les descendants de Fellaghas venus chez nous pour toucher les presta, oui par contre, ils peuvent, en tout cas ils ont le droit, putain d’adèle! Comme les derniers Communistes, les Antifas, les Mélanchonicoles, les Gauchiards de tout poil….Vous voyez, y a pas photo… »
Et d’engloutir son demi, d’un trait, sans pose ni répit! Que voulez vous, pris pour un con à ce point là, et sans presque plus personne qui comprenne par dessus le marché, ça doit donner soif, à tout le moins. Pourtant quand on a passé les quatre-vingts, normalement, l’injustice et l’ingratitude on y est bien habitué…allez comprendre, certains possèdent encore un cœur de midinette…il n’a pas la tronche à ça, le Maurice, mais ça reste un gros sensible!

Nous autres, les plus jeunes, enfin les septuagénaires, tout de même…comme quoi la relativité mène le monde, nous gardons à l’esprit les souvenirs cuisants de l’Algérie mortelle. Ma mère, paix à son âme pure et délicieuse, vivait avec la terreur de me voir partir un jour avec le sac sur le dos et finir, un autre, enterré avec la tête qui dépasse et la bite dans la bouche. Quand de Gaulle a lâché l’affaire, je ne vous raconte pas le soulagement. Une délivrance, carrément! Eh oui, elle en connaissait plein, des mères de troufions, appelés pour l’autre côté de la mer, l’autre côté de la vie, le moche, l’affreux, celui de la peur et du temps qui semble passer à l’envers jusqu’au jour de la sale nouvelle… Pourtant en 62 je cognais à peine les quatorze piges, c’est dire si on n’en voyait pas la fin de cette horreur…
Alors bon, nous autres, nous savons encore un peu de quoi il veut parler, le vieux Maurice. En revanche, un type comme Foupallour, avec sa poignée d’années en moins, il a déjà du mal à capter… Par conséquent, vous pensez, le Président de la République!

Et puis, Macrounette c’est l’Empire des Bobos, le règne des fils à papas, papas « progressistes » comme on dit maintenant, souvent soixante-huitards. Bande de tordus irrécupérables, ignorants de la vie, aveugles de naissance, tout juste bons à coller des Ferrand au Perchoir de la Représentation Nationale. Le règne des couillons bisounoursiques et des petits escrocs minables qui tirent les marrons du feu. A vomir! Et puis vous savez, il n’y en a vraiment pas un pour relever l’autre, tous vérolés jusqu’au fond de la cervelle… Regardez donc Blanquette, au hasard, celui de l’éducation bordello-nationale, un mec bien, celui-là, qui promettait de revenir aux vieux principes pédagogiques, ceux qui avaient fait leurs preuves, avec en prime de l’ordre et de la discipline… de toute façon tant qu’on prononce juste des mots, on peut y aller carrément, sans compter, ça ne coûte pas bien cher, juste d’ouvrir sa grande gueule… Mais quand il s’agit de passer aux actes, il fait quoi, le sauté de veau? Ben oui, il nous leur met l’arabe en première langue, à nos chères têtes blondes un peu crépues dans les tons foncés… Comme ça au moins c’est clair, ils savent où ils sont, les bambins: en terre d’Islam! La Répupu leur apprend la langue vernaculaire, celle du Prophète, c’est y pas le bonheur, ça?

Allez, bon Dimanche à tous, faites bien attention en traversant, aujourd’hui y a pas de bagnoles et les vélos c’est silencieux!

Et merde pour qui ne me lira pas.

NOURATIN

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