Quand le haut fonctionnaire égraine les mots de l’horreur, il s’arrête un instant sur ces « enlèvements d’enfants », marqués par l’image des « deux petits qui s’amusaient à côté de nos bureaux provisoires à Niamey, retrouvant une vie de leur âge alors qu’ils venaient d’être rachetés par leurs parents à des ravisseurs »… La semaine dernière, c’est un marché aux esclaves filmé par la chaîne américaine CNN qui a ému l’opinion internationale et été à l’origine d’une manifestation d’un millier de personnes à Paris, samedi 18 novembre.
Alors que l’Europe négocie avec la Libye pour que ce pays retienne les migrants subsahariens et les empêche d’accéder à son territoire, pour que ses gardes-côtes fassent faire demi-tour aux embarcations de fortune parties d’Afrique, un autre travail, plus humanitaire, se dessine au Sahel. La France en est pionnière.
Soixante-douze réfugiés, déjà repérés par le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) pour leur extrême fragilité, ont été entendus entre mercredi 15 et samedi 18 novembre par l’équipe de protection française. Aux quarante-sept Centrafricains, Maliens et Nigérians sélectionnés au Niger pour être envoyés en Europe pour urgence vitale, s’ajoutaient donc les vingt-cinq Soudanais et Erythréens ramenés de Tripoli en Libye. Ils pourront être réinstallés en France s’ils satisfont aux contrôles de sécurité du ministère de l’intérieur. Leur arrivée s’échelonnera à compter de janvier 2018.
Aller vite
Cette première mission de la France à Niamey fait suite à une autre, menée au Tchad en octobre, durant laquelle 240 Centrafricains et Soudanais avaient été entendus. « Ils commenceront à arriver avant Noël », selon le ministère de l’intérieur. Les opérations vont continuer puisque en quittant le Niger, M. Brice a promis qu’il reviendrait « pour que d’autres, qui doivent être protégés au titre du droit d’asile, puissent l’être et réinstallés en France ».
M. Brice aimerait que ses homologues européens le rejoignent. « Je propose aux responsables des offices européens de protection des réfugiés de travailler à nos côtés avec le HCR dans les prochaines missions pour offrir à un plus grand nombre de réfugiés la protection qui convient », explique-t-il. Les prochaines missions de la France devraient se dérouler en début d’année au Tchad et concerner entre 300 et 400 personnes, et à nouveau au Niger dès que le HCR pourra procéder à de nouvelles évacuations de réfugiés depuis la Libye. Il s’agit pour la France d’aller vite car le pari du chef de l’Etat, Emmanuel Macron, est que les Africains, voyant qu’il existe une voie légale d’entrée en Europe, renoncent à traverser la Méditerranée. Ce qui est bien loin d’être gagné.
Le 27 juillet, à Orléans, le président français a annoncé l’ouverture d’un corridor humanitaire avec l’Afrique. Le 28 août, il a scellé le pacte à l’Elysée avec les présidents du Niger, du Tchad et en présence d’un représentant libyen, avant d’annoncer le 9 octobre que la France en fera bénéficier 3 000 migrants avant fin 2019. Pour ce faire, il précise que l’Ofpra assurera des missions au Tchad et au Niger, où elle auditionnera des demandeurs d’asile qui pourront être réinstallés dans l’Hexagone.
La spécificité du Niger, où le HCR tient une liste de « seulement » 10 000 personnes ayant besoin de réinstallation (contre plus de 70 000 au Tchad voisin), est d’avoir accepté de recevoir les exfiltrés de Libye. Samedi 11 novembre, un car a ramené les vingt-cinq premiers. « J’ai rencontré une partie d’entre eux, raconte Roberto Mignone, le responsable du HCR à Tripoli, et je dirais seulement que ces quelques hommes, mais surtout ces femmes et ces enfants ont terriblement souffert dans leur pays d’origine, sur la route et aussi en Libye. »
« Grande vulnérabilité »
Selon le HCR, 390 000 migrants sont bloqués en Libye, dont 7 000 à 9 000 privés de liberté. Les vingt-cinq personnes en question ont d’ailleurs été extraites des centres de détention, puisque le HCR visite régulièrement 90 % des lieux officiels où ils sont enfermés. « Lors de nos visites, nous offrons une assistance, des soins médicaux. Nous repérons aussi les personnes en grande vulnérabilité, éligibles au statut de réfugiés et demandons ensuite aux autorités libyennes de les libérer, une par une », raconte M. Mignone, qui se réjouit d’avoir déjà « pu extraire plus de 1 600 personnes de ces lieux en 2016, 950 cette année », et espère une réponse des autorités libyennes pour en sortir rapidement 2 000 autres.
Pour l’heure, ces personnes libérées sont enregistrées par le HCR, qui leur donne une protection et une assistance humanitaire, « mais pour pouvoir leur offrir des vraies conditions de sécurité, de dignité, nous avons besoin d’un centre de transit », rappelle M. Mignone qui, sur ce point, est en négociation avec le gouvernement libyen. Il espère ouvrir ce lieu sécurisé à Tripoli début 2018. « En attendant, nous aimerions déjà évacuer 400 personnes du pays. Mais pour cela, il faudrait que des pays s’engagent à étudier leur dossier dans le cadre d’une réinstallation », ajoute le responsable HCR, rappelant dans la foulée que ce sera la même chose pour « les quelques milliers de réfugiés vulnérables que nous espérons sortir de Libye en 2018 ».
Les 3 000 Africains que la France s’est engagée à prendre d’ici à 2019 ne suffiront donc pas à vider la Libye et ne constitueront pas à eux seuls une alternative crédible pour dissuader les migrants de prendre la route du Nord. Samedi 11 novembre, au moment où le bus des vingt-cinq premiers évacués entrait sur le sol nigérien, l’émissaire spécial du HCR pour la Méditerranée, Vincent Cochetel, avait réitéré « l’appel urgent du Haut-Commissaire en faveur de la création de 40 000 places de réinstallation pour des réfugiés issus des pays africains ».
Les Etats ne se précipitent pas. Durant sa mission à Niamey, l’office de protection allemand est venu observer les procédures mises en place par la France ; et les ambassades d’Espagne et d’Italie ont regardé elles aussi de près l’opération. Reste que pour l’heure, aucun engagement n’est pris hormis celui de Paris. Une européanisation du dispositif reste la condition sine qua non de sa réussite, car les 1 500 départs légaux annuels de 2018 et 2019 vers la France ne rivaliseront pas avec les 145 000 traversées enregistrées depuis janvier.
C'est la meilleur façon d'entretenir le trafic de migrants que de continuer à leur faire croire à une terre promise qui n'existe même plus pour les locaux. Ces personnes ne trouveront pas d'emplois dans un pays où il y a déjà environ 7.000 000 de chômeurs et d'emplois très précaires et où les SDF se multiplient comme des petits pains.
Les énormes fonds destinés aux migrants seraient infiniment mieux employés, et certainement plus productifs, en créant des structures sur place.
Pourquoi les politiciens imposent-t-ils des solutions couteuses, complexes et déstabilisantes pour le pays ?
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