Les catastrophes naturelles sont, nous le savons, de véritables aubaines pour le monde médiatique, toujours en mal de sensationnel. Le cyclone Irma (la première lettre indiquant son intensité sur une échelle utilisé par les spécialistes) qui a touché les Antilles et dévasté Saint-Martin et Saint-Barthélemy n’a pas échappé à la règle.
Un déluge de commentaires, tous plus ou moins mal documentés, a envahi l’ensemble des médias. Comme un seul homme, les journalistes ont désigné le coupable idéal : le réchauffement climatique d’origine anthropique (RCOA) et son complice le président américain Donald Trump, élu il y a à peine moins d’un an !
En réalité, Irma, Maria et les autres cyclones ne doivent rien aux RCOA, une thèse de toute façon bien trop fragile sur le plan strictement scientifique. Dans mon ouvrage Mythes et réalités de la science, la thèse de l’imputation des phénomènes extrêmes à l’activité humaine est sévèrement battue en brèche à l’aune de l’analyse des phénomènes passés. Un simple coup d’œil sur des catastrophes datant d’environ quelques siècles, bien avant donc la révolution industrielle, démontre l’inanité des commentaires journalistes et d’experts scientifiques autoproclamée sur la question. Les cyclones sont de plus des phénomènes météorologiques, donc brefs à l’échelle géologique, qui diffèrent des phénomènes climatiques, qui eux agissent sur des temps longs.
Pour autant, l’idée est prégnante dans les populations que les catastrophes naturelles (rebaptisées « catastrophes climatiques » pour mieux culpabiliser l’homme) sont de plus en plus fréquentes. L’historien du climat Emmanuel Garnier impute ce phénomène à l’amnésie contemporaine. Les catastrophes du passé furent aussi souvent bien plus meurtrières que celles d’aujourd’hui. Donnons quelques dates tirées de l’ouvrage Impact du climat sur la mortalité en France, de 1680 à l’époque actuelle d’Emmanuel Le Roy Ladurie et Daniel Rousseau.
Le 27 février 1658, la crue de la Seine à Paris est si violente qu’elle emporte deux arches du pont Marie (60 morts). En France, les épisodes caniculaires de 1636 et de 1718-1719 arrachent à la vie respectivement 500 000 et 700 000 sujets. Les phénomènes climatiques extrêmes n’ont donc rien de spécifiquement nouveau. Outre-Atlantique, en 1780, un grand ouragan s’abat sur les îles Caraïbes tuant plus de 20.000 personnes. C’est l’une des tempêtes les plus mortelles jamais enregistrées. Seul l’ouragan Mitch en 1998, avec 11.000 morts en Amérique centrale, s’en rapproche en intensité (pour approfondir ce sujet, voir Mythes et réalités de la science).
Le GIEC lui-même, dans un rapport spécialement dédié [1] reconnaît la grande difficulté, voire l’impossibilité d’attribuer à un quelconque événement extrême une relation de cause à effet bien précise et d’origine anthropique (comme celle susceptible de modifier le climat comme le clament les alarmistes). Cependant l’ampleur de la catastrophe ne justifie en rien la légèreté avec laquelle le sujet est traité. C’est l’objet de cet article de rectifier un grand nombre de contre-vérités émaillées ici et là dans les médias français avec hélas, mille fois hélas, BFM TV et Le Monde en tête.
Le 6 septembre Le Monde annonçait à ses lecteurs que le méga-cyclone Irma est l’ouragan [2] le plus puissant jamais enregistré dans l’Atlantique Nord. Faux, et de surcroît l’article est littéralement jalonné d’approximation en tous genres [3]. Qu’entend-on par puissance quand il s’agit d’un cyclone ? L’indicateur couramment utilisé est l’ACE pour Accumulated Cyclone Energy, qui est une mesure de l’énergie cinétique emmagasinée dans les immenses masses tourbillonnantes. C’est l’ACE puis la vitesse déduite qui servent d’indicateurs pour classer la dangerosité d’un cyclone sur l’échelle dite de Saffir-Simpson, qui va de 1 (qui correspond au maximum de l’échelle de Beaufort du nom de l’amiral britannique ; force 12 = vent de 119 km/h) à 5. Pour le citoyen peu rompu à la terminologie scientifique même la plus élémentaire, l’ACE est déjà une notion bien trop éloignée de ses schémas mentaux du quotidien.
Dans l’esprit de l’homme de la rue, la puissance d’un cyclone se trouve dans la vitesse des vents qu’il charrie, voire, pour les férus de bulletins météos, dans la mesure des pressions atmosphériques. Rappelons qu’un cyclone n’est rien d’autre qu’une zone de dépression (pression inférieure à la pression atmosphérique normale) que de subtils mécanismes thermodynamiques (science des échanges de chaleur) et mécaniques (force de Coriolis due à la rotation de la Terre) met en rotation. Donc en plus d’un classement à partir de l’ACE, il est possible de classer les cyclones à partir de mesures de pressions ou à partir de mesures de vitesses de vent dit soutenu (la convention étant de choisir une durée de 1 minute, ce qui est long pour des vents forts), qui diffère donc des rafales ou des bourrasques (vent saccadé et impétueux de courte durée). Pour le cyclone Irma, Méteo France et la NOAA (National Oceanic and Atmospheric Administration, la météo US) enregistre [4] des mesure de pression de 915 mbar (millibar, sachant que la pression normale est de 1000 mbar = 1 bar) et des vitesses de vent soutenu de l’ordre de 290 km/h (prononcé « kilomètre par heure » et non « kilomètre heure », mais ce n’est qu’un détail qui n’agace que le scientifique). Comparons ces deux chiffres. En considérant l’indicateur de pression, Irma n’apparaît même pas dans la liste des 10 premières dépressions cycloniques mesurées dans l’Atlantique Nord (Irma apparaît en fait en treizième position). Attention : ici la pression est en hectopascals (1 hPa vaut exactement 1 mbar).
En termes de vitesses de vents soutenus, des vitesses de 290 km/h sont relativement communes pour des ouragans (5 cyclones ont enregistré de tels niveau de vitesse [5]). Donc non, Irma n’est pas le cyclone le plus puissant jamais observé dans l’Atlantique Nord.
Dans un article récent datant de 2015 [6], des auteurs français spécialistes de l’histoire du climat et des experts en assurance ont analysé sur une longue période allant de 1635 à aujourd’hui la variabilité du climat aux Antilles françaises. Leur conclusion est limpide :
« Pour la période considérée s’étalant sur quatre siècles et pour la zone des Antilles Françaises, notre série révèle une forte variabilité de l’activité cyclonique, avec un accroissement des occurrences entre 1750 et 1850 suivi d’une tendance décroissante jusqu’au XXe siècle. Pour ce dernier siècle toutefois, un tournant est observable à partir de 1956, avec un net accroissement des cyclones suivi à son tour d’un fort ralentissement après 1979. Depuis cette date, rien dans l’observation des cyclones ne soutient l’idée d’un changement climatique. »
Un déluge de commentaires, tous plus ou moins mal documentés, a envahi l’ensemble des médias. Comme un seul homme, les journalistes ont désigné le coupable idéal : le réchauffement climatique d’origine anthropique (RCOA) et son complice le président américain Donald Trump, élu il y a à peine moins d’un an !
En réalité, Irma, Maria et les autres cyclones ne doivent rien aux RCOA, une thèse de toute façon bien trop fragile sur le plan strictement scientifique. Dans mon ouvrage Mythes et réalités de la science, la thèse de l’imputation des phénomènes extrêmes à l’activité humaine est sévèrement battue en brèche à l’aune de l’analyse des phénomènes passés. Un simple coup d’œil sur des catastrophes datant d’environ quelques siècles, bien avant donc la révolution industrielle, démontre l’inanité des commentaires journalistes et d’experts scientifiques autoproclamée sur la question. Les cyclones sont de plus des phénomènes météorologiques, donc brefs à l’échelle géologique, qui diffèrent des phénomènes climatiques, qui eux agissent sur des temps longs.
Pour autant, l’idée est prégnante dans les populations que les catastrophes naturelles (rebaptisées « catastrophes climatiques » pour mieux culpabiliser l’homme) sont de plus en plus fréquentes. L’historien du climat Emmanuel Garnier impute ce phénomène à l’amnésie contemporaine. Les catastrophes du passé furent aussi souvent bien plus meurtrières que celles d’aujourd’hui. Donnons quelques dates tirées de l’ouvrage Impact du climat sur la mortalité en France, de 1680 à l’époque actuelle d’Emmanuel Le Roy Ladurie et Daniel Rousseau.
Le 27 février 1658, la crue de la Seine à Paris est si violente qu’elle emporte deux arches du pont Marie (60 morts). En France, les épisodes caniculaires de 1636 et de 1718-1719 arrachent à la vie respectivement 500 000 et 700 000 sujets. Les phénomènes climatiques extrêmes n’ont donc rien de spécifiquement nouveau. Outre-Atlantique, en 1780, un grand ouragan s’abat sur les îles Caraïbes tuant plus de 20.000 personnes. C’est l’une des tempêtes les plus mortelles jamais enregistrées. Seul l’ouragan Mitch en 1998, avec 11.000 morts en Amérique centrale, s’en rapproche en intensité (pour approfondir ce sujet, voir Mythes et réalités de la science).
Le GIEC lui-même, dans un rapport spécialement dédié [1] reconnaît la grande difficulté, voire l’impossibilité d’attribuer à un quelconque événement extrême une relation de cause à effet bien précise et d’origine anthropique (comme celle susceptible de modifier le climat comme le clament les alarmistes). Cependant l’ampleur de la catastrophe ne justifie en rien la légèreté avec laquelle le sujet est traité. C’est l’objet de cet article de rectifier un grand nombre de contre-vérités émaillées ici et là dans les médias français avec hélas, mille fois hélas, BFM TV et Le Monde en tête.
Le 6 septembre Le Monde annonçait à ses lecteurs que le méga-cyclone Irma est l’ouragan [2] le plus puissant jamais enregistré dans l’Atlantique Nord. Faux, et de surcroît l’article est littéralement jalonné d’approximation en tous genres [3]. Qu’entend-on par puissance quand il s’agit d’un cyclone ? L’indicateur couramment utilisé est l’ACE pour Accumulated Cyclone Energy, qui est une mesure de l’énergie cinétique emmagasinée dans les immenses masses tourbillonnantes. C’est l’ACE puis la vitesse déduite qui servent d’indicateurs pour classer la dangerosité d’un cyclone sur l’échelle dite de Saffir-Simpson, qui va de 1 (qui correspond au maximum de l’échelle de Beaufort du nom de l’amiral britannique ; force 12 = vent de 119 km/h) à 5. Pour le citoyen peu rompu à la terminologie scientifique même la plus élémentaire, l’ACE est déjà une notion bien trop éloignée de ses schémas mentaux du quotidien.
Dans l’esprit de l’homme de la rue, la puissance d’un cyclone se trouve dans la vitesse des vents qu’il charrie, voire, pour les férus de bulletins météos, dans la mesure des pressions atmosphériques. Rappelons qu’un cyclone n’est rien d’autre qu’une zone de dépression (pression inférieure à la pression atmosphérique normale) que de subtils mécanismes thermodynamiques (science des échanges de chaleur) et mécaniques (force de Coriolis due à la rotation de la Terre) met en rotation. Donc en plus d’un classement à partir de l’ACE, il est possible de classer les cyclones à partir de mesures de pressions ou à partir de mesures de vitesses de vent dit soutenu (la convention étant de choisir une durée de 1 minute, ce qui est long pour des vents forts), qui diffère donc des rafales ou des bourrasques (vent saccadé et impétueux de courte durée). Pour le cyclone Irma, Méteo France et la NOAA (National Oceanic and Atmospheric Administration, la météo US) enregistre [4] des mesure de pression de 915 mbar (millibar, sachant que la pression normale est de 1000 mbar = 1 bar) et des vitesses de vent soutenu de l’ordre de 290 km/h (prononcé « kilomètre par heure » et non « kilomètre heure », mais ce n’est qu’un détail qui n’agace que le scientifique). Comparons ces deux chiffres. En considérant l’indicateur de pression, Irma n’apparaît même pas dans la liste des 10 premières dépressions cycloniques mesurées dans l’Atlantique Nord (Irma apparaît en fait en treizième position). Attention : ici la pression est en hectopascals (1 hPa vaut exactement 1 mbar).
Dans un article récent datant de 2015 [6], des auteurs français spécialistes de l’histoire du climat et des experts en assurance ont analysé sur une longue période allant de 1635 à aujourd’hui la variabilité du climat aux Antilles françaises. Leur conclusion est limpide :
« Pour la période considérée s’étalant sur quatre siècles et pour la zone des Antilles Françaises, notre série révèle une forte variabilité de l’activité cyclonique, avec un accroissement des occurrences entre 1750 et 1850 suivi d’une tendance décroissante jusqu’au XXe siècle. Pour ce dernier siècle toutefois, un tournant est observable à partir de 1956, avec un net accroissement des cyclones suivi à son tour d’un fort ralentissement après 1979. Depuis cette date, rien dans l’observation des cyclones ne soutient l’idée d’un changement climatique. »
Chronologie et intensité des cyclones entre 1635 et 2007 aux Antilles françaises
Avec Irma et Maria, il faudra rajouter deux événements de classe 5 en 2017. Clairement, rien n’indique une éventuelle influence de l’activité humaine sur l’occurrence des cyclones.
Pour finir, voici un graphe publié par la NOAA qui représente l’évolution du nombre de hurricanes (cyclone américain) par classe de 1897 à 2017. Là non plus rien n’indique des tendances lourdes à l’œuvre. De plus, le petit nombre d’événements intenses (quelques très gros tous les 10 ans) rend illusoire toute spéculation reposant sur des outils statistiques, inutilisables ici.
Les commentaires sur les catastrophes naturelles (car il faut rappeler la normalité du phénomène propre à la zone caraïbe) Irma, Maria ou autres des politiques et journalistes français sont à sens unique. En pointe dans la lutte contre le controversé réchauffement climatique, les dirigeants français semblent trouver la France trop petite pour leurs ambitions. Pour la classe politique française, avec Anne Hidalgo, Ségolène Royal et Nicolas Hulot, il s’agit désormais de sauver la planète et de pointer du doigt la responsabilité (accusation manifestement absurde) du président de la première puissance mondiale. Les cyclones arrivent à point nommé et sont leurs alliés objectifs. C’est cocasse de la part d’individus dont on pourrait parier qu’ils ne sauraient faire la différence entre un joule (unité d’énergie) et un watt (unité de puissance). Cela pourrait faire rire aussi si nous n’étions pas dans le pays de Descartes, où la logique fut jadis portée au Panthéon.
Notes
[1] SREX : rapport spécial sur les événements climatiques extrêmes de 2012 pp 6-7 Cf. http:// www.ipcc-wg2.gov/SREX/images/uploads/SREX-All_FINAL.pdf 166 167
[2] http://www.lemonde.fr/planete/article/2017/09/06/irma-l-ouragan-le-plus-puissant-jamais-enregistre-dans-l-atlantique_5181793_3244.html
[3] Les termes « typhon », « ouragan » et « cyclone tropical » recouvrent tous les trois la même réalité : ils désignent un phénomène tourbillonnaire des régions tropicales (entre 30°N et 30°S) accompagnés de vents dont la vitesse est supérieure ou égale à 64 nœuds c’est-à-dire 118 km/h (soit une force 12 sur l’échelle de Beaufort). La désignation adoptée dépend simplement de l’endroit du globe où se produit le phénomène. Le terme cyclone ou cyclone tropical est réservé à l’océan Indien et au Pacifique Sud. On parle en revanche d’ouragan en Atlantique Nord et dans le Pacifique Nord-Est et enfin de typhon dans le Pacifique Nord-Ouest.
[4] Chiffres disponibles sur le site du National Huricane Center (http://www.nhc.noaa.gov) et de météo France : http://www.meteofrance.fr/actualites/53850124-ouragans-irma-et-jose-1er-bilan
[5] https://en.wikipedia.org/wiki/List_of_Atlantic_hurricane_records
[6] The historic reality of the cyclonic variability in French Antilles, 1635–2007 E. Garnier, J. Desarthe, and D. Moncoulon https://www.clim-past-discuss.net/cp-2015-2/
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