30 juin 2017

Viols et pédocriminalité chez les psys : des femmes en lutte contre l’omerta


Si on entend rarement parler des psys condamnés pour les viols de leurs patients, c'est peut-être parce que le milieu se tient les coudes. Quelques fois, on voit un titre passer un titre, "Un psy jugé pour avoir violé un patient", "un an de prison ferme pour un psychologue pédophile" (celui-là traitait aussi des enfants autistes), "Un pédopsychiatre Belge arrêté pour Pédophilie" (celui-là avait déjà été condamné en 1995 pour ces viols et agressions sexuelles sur cinq enfants de sa famille), "Un psychiatre condamné à 12 ans pour le viol de quatre patientes" mineures, "Un psychiatre condamné à 8 ans de prison pour viol", là aussi sur des patientes mineures, un autre radié pour détention d’images pornos d’un mineur, un autre a pris 13 ans pour 6 années de viols sur un patient mineur, un troisième a été condamné pour tourisme sexuel avec des mineurs et détention de pédoporno…

Les cas ne sont donc pas rares, et le taux d’affaires dénoncées par des plaintes et qui aboutissent à une condamnation est le même que dans la population en général, on peut estimer que le nombre des viols commis par des psychiatres et pédopsychiatres est cent fois plus important que ce que ne laissent entrevoir les gros titres.

On peut également redouter une impunité plus importante que pour le clampin moyen, mais il est vrai que ces gens sont généralement plus intelligents que la moyenne, et ils savent parfaitement mentir.

Justement, si j’en crois certains témoignages récents, ces médecins, dont une bonne partie est ou a été expert auprès des tribunaux, bénéficient de la volonté de notre institution judiciaire de fermer les yeux. Et quand la justice réagit, les peines sont souvent dérisoires.

 
 
Ainsi, récemment, un pédiatre angevin de 84 ans a été condamné en première instance en 2015 à la peine dérisoire de 4 ans de prison dont 3 avec sursis pour « des actes pédophiles dans le cadre de son activité ». Un an de prison signifie qu’en réalité il est certain de voir sa peine aménagée, c’est-à-dire d’éviter la prison. Les femmes qui ont porté la procédure contre lui avaient alors entre 35 et 65 ans, ce qui veut dire que ces actes ont été commis sur une longue période. Une de ses victimes explique même que les agressions sexuelles ont duré de ses 5 ans à ses 11 ans.

Bien que ses victimes n’avaient aucun lien familial avec lui, le nom de ce pédiatre pédophile n’était pas cité dans les médias. Si une femme d’une trentaine d’années dont la première plainte a été classée sans suite n’avait pas trouvé elle-même d’autres victimes, le procès n’aurait même jamais eu lieu.

Et puis, grâce à la prescription, l’impunité est la règle dans ces dossiers. Car il en faut, du courage, pour mener une telle procédure contre ces types qui présentent si bien, qu’on pourrait même croire au-dessus de tout soupçon.

Le mur du silence, le système de l'impunité

Récemment, une femme qui a tenté de dénoncer le psychiatre qui l’avait violée étant adolescente a raconté son chemin de croix pour faire condamner le médecin, qui exerce toujours au Mans. Hélas, quand elle a porté plainte, les faits étaient prescrits. On appellera ce médecin le Dr P.

"Mon psychiatre a usé de son ascendant sur moi pour me manipuler, il m’a agressée à de nombreuses reprises (baisers, attouchements et un viol par pénétration digitale). Il disait que je souhaitais ce genre de relation avec lui sans en avoir conscience, il s’est qualifié de « grand frère un peu incestueux », propos qui m’ont blessée extrêmement profondément", écrit-elle. Elle signale donc les faits aux conseil de l’ordre, qui lui explique que le type a été radié. Mais, cela s’avère faux.


Par ailleurs, la version retenue par ces médecins est que c'est la victime qui s'est jetée sur le psychiatre, et qu'une "relation" existait entre eux. " Il y a un an, j’ai été recontactée par les services de police. Une troisième personne avait à son tour dénoncé des violences sexuelles commises par mon ancien psychiatre. En dépit de ces nouveaux éléments, certes eux aussi prescrits, aucune investigation supplémentaire n’a, à ce jour, été menée", constate-t-elle.

Après moult démarches auprès des institutions, qui n’ont mené à rien, elle finit par apprendre qu’une victime du Dr P est parvenue à le faire condamner en appel, des attouchements. Ce qui aurait entraîné un simple blâme de la part du conseil de l’ordre.

Le Dr P a en effet été condamné en 1998 pour une agression sexuelle. Dans le jugement, on lit que la victime "reprochait à ce médecin d'avoir, ffin septembre 1992, au cours d'une consultation, eu à son égard des "gestes déplacés" et de l'avoir ensuite fait hospitaliser abusivement pour une cure de sommeil". Pour se défendre, le Dr P a accusé cette femme d'être "érotomane".

Par ailleurs, ce médecin, qui a été expert auprès du tribunal local, est connu dans le milieu judiciaire et son nom est revenu régulièrement dans des conversations avec des membres de l’institution judiciaire, de la gendarmerie ou avec d’autres « patients » de psys du coin. D’autres noms reviennent aussi, « tout le monde sait », explique cette femme. Il y a eu des signalements contre l’un de ces éminents spécialistes, une condamnation restée dissimulée un autre…

 

En 2011, elle démarre une grève de la faim en espérant se faire entendre, et faire bouger les choses. Par le biais d’une association, elle apprend que trois autres victimes de ce même psychiatre, "le Dr P", ont porté plainte l’année dernière, et il est même question d’un dossier pénal ouvert à l’encore de ce psychiatre. Une membre de cette association souligne dans une lettre au conseil de l'ordre des médecins du département ledit ordre aux femmes qui ont dénoncé des agressions sexuelles et des viols commis par divers psys du secteur,

Une pétition a recuilli 1.700 signatures pour faire condamner ces psychiatre, ce qui n’est pas rien pour une pétition qui concerne un problème local.

Au sujet du Dr P, on trouve aussi cet article, sur un blog. Il parle d’une femme qui a porté plainte contre son psychiatre pour des attouchements, et réussit à le faire condamner à six mois de sursis en 1998, à la cour d’appel d’Angers. Cette personne a également porté plainte auprès de l’ordre des médecins, afin d’empêcher le psy d’exercer à nouveau, mais il ne ramasse qu’un simple blâme, la sanction la moins forte alors qu’il a été condamné pour avoir agressé une patiente.

Une autre femme, toujours victime du Dr P, décide de signaler, par une plainte auprès de l’ordre local, une série de viols commis entre 1973 et 1977, des faits prescrits. Elle ajoute cependant à son dossier la condamnation obtenue en 1998 par la victime qui est parvenue à le faire condamner. Et voilà l’ordre des médecins qui porte plainte contre cette femme pour procédure abusive et la sanctionne, d’après un document judiciaire publié dans cet article, à 10.000 € de dommages et intérêts et 3.000€ pour les frais de procédure. Et la condamnation de 1998 a mystérieusement disparu de la liste des pièces du dossier.

Ces affaires pourraient sembler anodines, mais elles sont révélatrices d’un système. Ces psys sont souvent experts auprès des tribunaux, ils sont parfois même considérés comme des sommités dans leur domaine. L’un des psys du coin, cité par plusieurs victimes, a siégé dans une instance disciplinaire des médecins. D’autres, qui ont les mêmes casseroles, suivent les procédures concernant les enfants placés.

Ces gens sont un maillon de cette mafia judiciaire, si bien établie, qui fait de la france une république bananière, un Etat de non droit.

 

Convocation devant la chambre disciplinaire

Ces experts sont installés, réputés, si bien qu'ils peuvent intervenir dans des dossiers chauds et les planter en chargeant les victimes au lieu des coupables. Qu’ils peuvent assurer l’impunité aux criminels, à leurs collègues.

Que la vérité judiciaire peut être aux antipodes de la vérité dans les dossiers sensibles, comme j’ai souvent été amenée à le constater. N’oublions pas que le réseau pédophile d’Angers, par exemple, est une affaire qui n’a jamais livré tous ses secrets, et qui s’est déroulée dans ce secteur. Et ce n'est pas le dossier le plus glauque du coin.

Le combat de cette femme qui a été jusqu'à mener une grève de la faim devant l'ordre des médecins n’est pas anodin lui non plus. Il semble même inquiéter les autorités puisque les RG se renseignent sur ses intentions, notamment autour de sa convocation devant le conseil de l’Ordre. Une réunion qui doit se tenir à huis clos alors qu’il s’agit en principe d’une audience publique, mais on n’est plus à cela près dans ce dossier.

Ce n’est probablement pas pour rien que cette femme a été menacée d’être internée, en psychiatrie justement, ce système carcéral qui n’en a pas le nom, trop souvent confondue avec les oubliettes de la société. Ce n'est pas non plus étonnant qu'elle ait été condamnée pour plainte abusive, ou a subi moult tentatives destinées à la décrédibiliser, et autres joyeusetés…

L'affaire est donc à suivre. En tout cas, il semble qu'il y a un sacré ménage à faire du côté des psys en général et du côté des psys de cette région en particulier.

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L'affaire "Hamilton", ce photographe dénoncé par plusieurs femmes qui racontent le même scénario, fait couler de l'encre, soulevant la question de la prescription. Cette femme qui cherche à faire reconnaitre les agressions et viols commis par ce Dr P, et d'autres parmi celles qui le dénoncent, expliquent qu'elles étaient incapables de porter plainte dans le délai avant la prescription des faits. Le traumatisme est parfois énorme, et souvent il faut du temps avant d'avoir le courage d'entreprendre une procédure judiciaire.

La prescription arrange seulement les agresseurs, qui sont nombreux à se sentir impunis quand ils constatent qu'ils n'ont pas été poursuivis, et la justice qui fait des économies en écartant d'office des procédures qui, pourtant, permettraient d'épargner quelques autres victimes, qu'elles soient majeures ou mineures.
 

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