11 mai 2017

1816 : l’année sans été


Dans les annales météorologiques, l’année 1816 est tristement célèbre. Une vague de froid d’une intensité peu commune déferle sur tout l’hémisphère nord, ruinant les récoltes en Europe et en Amérique du Nord.

Plusieurs historiens sont d’avis que c’est l’éruption du volcan Tambora en Indonésie, en avril 1815, qui serait à l’origine de la situation. L’éruption du Tambora est considérée comme la plus importante éruption depuis dix mille ans. Projetés dans la stratosphère, la cendre, la poussière et les gaz diminuent le rayonnement solaire, en provoquant du même coup un refroidissement marqué des températures dans la zone tempérée de la planète pour plusieurs années.

Cependant, vers la fin du XVIIIe siècle déjà, l’on constate de grands changements climatiques sur tout le territoire du Canada.

En effet, la lente dégradation du climat a lieu à compter de la fin du XVIIIe siècle. Ce phénomène se traduit par des étés plus courts et plus pluvieux, ainsi que par des hivers plus rigoureux.

Au début du XIXe siècle, les mauvaises récoltes affectent déjà la population de la Côte-du-Sud du Québec (Bas-Canada) et la charité privée est le principal recours pour soulager la misère qui sévit dans les campagnes de la colonie. Mais les donations ne suffisent pas, alors la Chambre d’Assemblée législative est appelée à intervenir à plusieurs reprises pour soulager les habitants en détresse par le prêt de grains de semence.

Les changements touchent d’une manière particulière les paroisses de l’est du Bas-Canada (le Québec d’aujourd’hui) et c’est ce phénomène climatique qui explique les mauvaises récoltes dans la première moitié du XIXe siècle un peu partout dans l’Amérique du Nord britannique, mais il est vrai que les effets néfastes de l’éruption volcanique du Tambora ont contribué à la disette de 1816.

Les effets de l’éruption se font sentir dès le mois d’août 1815. Les récoltes sont compromises alors par les gelées, mais c’est en 1816, l’année connue comme l’année sans été, que ses effets sont dévastateurs.

Sur tout le territoire du Bas-Canada, l’on constate une chute dramatique des températures. En fait, on rapporte des gelées pendant toute l’année 1816. L’angoisse s’empare de la population.

À Québec, la ville capitale du pays, on signale une très forte tempête de neige au début de juin, qui laisse les calèches embourbées jusqu’aux essieux. Dans la Beauce, les habitants déconcertés remontent les poêles qu’ils avaient remisés pour la belle saison et ressortent les traînes à bois de chauffage. Les habitants de Rivière-Ouelle se plaignent d’avoir perdu leurs moissons par l’inconstance des temps et le renversement des saisons. À Saint-Jean-Port-Joli, les cultivateurs parviennent à obtenir une récolte malgré les aléas de la température, mais ils mesurent l’ampleur du désastre au moment de battre les grains, qui sont de très mauvaise qualité en raison des gelées. Dans la région de l`Îslet, les jardins périssent et la presque totalité des habitants constatent qu’il leur sera impossible de subsister. À Saint-André, dans le Bas-Saint-Laurent, le tiers de la population manque de pain pour survivre.

Les gelées de la fin d’août compromettent définitivement une récolte qui s’annonçait déjà mauvaise. Mais comme le blé de la nouvelle récolte commence à être consommé durant l’hiver, cela laisse du temps aux autorités de la colonie pour organiser les secours.

Les commissaires nommés pour le secours entreprennent la distribution des provisions achetées de divers particuliers ou marchands en novembre 1816. Dans la liste des fournisseurs, on retrouve les noms de François Baby, de Saint-Pierre-de-la-Rivière-du-Sud, les frères David et Robert Harrower, de Saint-Jean-Port-Joli, qui vendent du blé et de la farine, et les sieurs Casgrain, de la Rivière-Ouelle, et Taché, de Kamouraska, qui avancent des patates pour l’un et des harengs pour l’autre. Des marchands fournissent diverses denrées au gouvernement.

Les bénéficiaires des secours du gouvernement sont tenus de rembourser, soit en argent, soit en participant à des corvées de travaux publics (construction de ponts, réparation de chemins) les avances qui leur sont consenties, mais plusieurs habitants ne peuvent honorer leurs obligations.

Heureusement la nouvelle récolte sera meilleure, mais d’autres disettes affectent le Bas-Canada par la suite, dont celle de 1834 qui est vivement ressentie. En 1835, d’ailleurs, la mouche à blé s’attaque aux récoltes, mais aucun de ces fléaux n’aura cependant l’importance de la perte de la récolte de 1816, cette année sans été…

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