La police face aux quartiers
Ce n’est pas un sujet nouveau: la répartition des effectifs de police en France est ubuesque, et l’absurdité non seulement n’a jamais été corrigée, mais elle s’est même aggravée. Dans la pratique, les effectifs policiers sont, de longue date, distribués sur une logique qui est sans lien avec le taux de criminalité des zones concernées.
Les suppressions de postes pratiquées depuis la RGPP ont frappé, en toute opacité, des zones fortement criminogènes. Tout ceci concourt à dégrader les conditions de travail des policiers en zone sensible. Cette dégradation est directement imputable aux politiques publiques et à l’incapacité du management à allouer ses moyens de façon optimale.
Un management au service de ses ambitions
Face à cette politique suicidaire dont la hiérarchie policière (corps préfectoral et administration centrale de l’Intérieur en premier lieu) est directement responsable et coupable, la terrible politisation de la haute fonction publique a fait son oeuvre. Pour être bien vu, il ne faut pas sécuriser la voie publique, mais rendre de bonnes statistiques au ministère. Et surtout ne pas faire de vagues. Donc, il faut demander aux agents de terrain de s’occuper des gens honnêtes et sans problème, et leur ordonner de ne pas prendre de risque inconsidéré dans les « quartiers ». Une bavure est si vite arrivée.
Et voici comment une évaluation purement politique des commissaires, déconnectée du service à rendre au citoyen contribuable, déstabilise toute une société: les racailles sont impunies parce qu’elles font peur, les gens honnêtes sont mis sous surveillance parce qu’ils ne constituent pas une menace.
Les langues commencent à se délier dans la police
Cette logique de répression des gens honnêtes et d’impunité pour les voyous est très bien décrite par un policier sur les antennes de RMC:
« On nous demande d’aller dans les cités avec parcimonie, de ne pas effectuer trop de contrôles et de ne pas bousculer l’économie souterraine des cités, alors que par contre on nous demande d’aller au carrefour pour verbaliser monsieur tout-le-monde qui va au travail pour gonfler les chiffres et faire en sorte que les carrières de nos chers patrons montent en flèche »
Tout est dit, et ce policier met enfin des mots sur une vérité que tous les Français du tiers-état vivent au jour le jour: il est plus facile de verbaliser un passant ordinaire qu’un voyou qui défie la loi. Donc, il existe, en France, une prime à la malhonnêteté, sauf dans les beaux quartiers qui sont quadrillés par des sureffectifs policiers.
Le prix à payer pour le Vivre Ensemble
On ne remerciera jamais assez ce policier d’avoir décrit, en ombre chinoise, ce qu’est la réalité du Vivre Ensemble pour la grande majorité des Français, exposés à ses conséquences quotidiennes. Dans les quartiers difficiles, il existe des zones de non-droit où la police n’agit plus, n’intervient plus, où elle laisse les voyous prendre possession du territoire. Ce sont eux qui y font la loi. La hiérarchie policière y craint les bavures.
Alors ce sont les honnêtes gens qui trinquent. Non seulement ils sont placés sous la coupe de petites bandes mafieuses qui y rendent la vie impossible, mais ils subissent en plus le harcèlement administratif officiel auquel tous les citoyens ordinaires sont soumis. Telle est la réalité du Vivre Ensemble pour la société française: une prime au banditisme, et une sanction constante pour l’honnêteté.
Il existe donc bien des zones de non-droit
Contrairement à ce que disaient les hiérarques des Républicains qui préparent la primaire de leur parti, Frédéric Péchenard en tête, tous les problèmes ne se concentrent donc pas sur la justice. La police française pose problème. Ou plutôt sa hiérarchie, obnubilée par sa carrière et indifférente à sa mission de service public.
Cela va mieux en le disant. Les manifestations spontanées qui se propagent montrent qu’une réforme en profondeur de la police (et probablement du statut des hauts fonctionnaires) est aujourd’hui de salubrité publique.
L’élite administrative bloque la réforme de l’Etat
Il est saisissant de voir, une fois de plus, que ceux qui bloquent la réforme de l’Etat et son adaptation à l’intérêt général, ce ne sont pas les fonctionnaires de terrain, mais les décideurs, les managers, les hauts fonctionnaires. Contrairement à l’idée répandue, ce ne sont pas les petites gens qui refusent les réformes, ce sont les puissants.
Démonstration est faite que la réforme, en France, est possible, à condition de balayer la bureaucratie qui la bloque.
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