11 décembre 2015

Ploërmel : des migrants logés en mobil-home, les autochtones à la rue...


A Ploërmel, on peut croiser facilement au coin d’une rue des personnes que la vie n’a pas épargnées : des « SDF », des laissés pour compte qui n’intéressent pas grand monde. Ils ne sont apparemment pas une priorité pour les édiles locaux. « Titi », Emerick,… ils sont une dizaine dans la ville à vivre dans la rue. Breizh-info est allé à leur rencontre. Récit.

Pour l’état-civil, c’est T.M – Titi pour les intimes. Veste de treillis camouflée, sac à dos assorti, avec pour seul compagnon son chien Pogo, l’homme, originaire de Campénéac, est à la rue depuis 10 ans. C’est aujourd’hui un homme bien mal en point.

La vie de Titi n’a pas été facile : né d’un père alcoolique et d’une mère ouvrière, il est élevé par ses grands-parents. Il commence sa scolarité à l’école des sœurs de sa commune d’origine. Au cours de celle-ci, il a collectionné plus de coups de règle sur les doigts que de bons points. En 6ème, il rentre au collège du Sacré cœur de Ploërmel qu’il quittera après une classe de 4ème CPPN.

Il débutera sa vie professionnelle comme apprenti mécano moto à Campénéac. Ce fût l’occasion de commencer à sniffer de la drogue avec la colle des rustines. Adolescent révolté, ses grands parents l’envoient chez un oncle qui exploitait un garage auto à Quimper. Mais pour lui, ce n’était pas son « trip ». Il se drogue de plus belle ce qui l’amène dans un foyer d’insertion dans une ambiance délétère, insupportable pour lui. A 16 ans, il fait un séjour de trois mois en prison pour vols et cambriolages.

A 21 ans, il décide de changer d’air. Il part cap au sud, tournant le dos à son passé. Il y restera trois ans avant de se décider à revenir en Bretagne. A Quimper la chance semble lui sourire. Il y rencontre sa compagne, avec qui il restera 17 ans et qui lui donnera deux enfants. Ils vivront à Lorient. Titi était devenu sérieux ou presque. Pourtant son penchant pour les « stupéfiants » le rattrapera. Cela l’écartera de son amie et du monde professionnel. Il avait pourtant un travail dans une entreprise de travaux publics.

Reprenant son sac, il revient à Ploërmel où il couche à droite et à gauche pour finalement se retrouver à la rue. Aujourd’hui, il « squatte les toilettes » du cimetière la nuit, sans même une porte, pour arrêter les courants d’air. Pourtant Thierry a une caravane qu’il ne peut installer à Ploërmel. Elle vieillit stockée sur le terrain d’une âme compatissante, à 15 kilomètres de Ploërmel et Titi n’a ni voiture, ni même de permis de conduire …

Le vendredi, il « fait son marché » à sa façon. Avec sa casquette, vous le trouverez devant la poste. Le reste de la semaine, il « fait la manche » auprès d’une grande surface locale. Parfois seul, parfois en compagnie de quelques camarades de misère. Titi ne se plaint jamais, toujours souriant, la plaisanterie facile.

Voici maintenant Emerick, 21 ans, autre compagnon d’infortune, originaire de Soissons. Moins ancien dans l’errance que Titi, c’est un garçon intelligent, titulaire de deux CAP (menuisier et maçon) qui s’est retrouvé à la rue après un licenciement. A Soissons, il fait froid. Il met le cap sur une région plus agréable qui lui semble plus accueillante : La Bretagne, et une petite ville tranquille : Ploërmel.

Emerick explique avoir un toit qui est en réalité … une toile de tente où il passe ses nuits avec ses deux chiennes qui lui tiennent compagnie. L’hiver dernier il avait squatté une maison inoccupée avec deux compagnons avant d’être expulsé en pleine trêve hivernale. Pour couronner le tout, bien qu’il soit Français, Emerick n’a même pas droit au RSA avant d’avoir fêté ses 21 ans.

A Ploërmel, les œuvres sociales aidées par la municipalité dirigée par Patrick Le Diffon (LR), un colistier de Marc Le Fur, s’emploient pourtant à venir en aide à certaines populations en difficulté. En face de l’ancienne gare auprès de l’école/fabrique de bijoux, on trouve trois mobil-homes tout confort qui viennent d’être installés : eau, électricité, sanitaires fraîchement branchés. Deux au moins sont occupés par des locataires d’une extrême discrétion. Des Syriens, paraît-il.

Voyant notre journaliste tourner et prendre des photos, pas un adulte n’est sorti. Seul un jeune messager de 7/8 ans, qui ne parlait pas le français, lui a donné un post-it. Son recto comportait un horaire de car (ligne 4, qui va à Vannes) et son verso un numéro de téléphone… impossible d’en savoir plus, le téléphone sonne en continu, sans messagerie.

Pendant que les communes de Bretagne s’emploient à accueillir, nourrir et loger des « réfugiés », 121 SDF ont trouvé la mort en 5 ans en Bretagne. A Ploërmel, une manifestation contre le projet d’accueil de Syriens avait été organisée il y a quelques semaines. Le vote Front national a été multiplié par 4,5 dans la commune entre 2010 et 2015, passant de 6% à 20% et de 147 à 679 voix. Cherchez l’erreur.
 
 
Syriens de Ploërmel: Vue des évacuations devant l’ancienne gare




Photos : Breizh-info.com
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