01 juin 2015

Le secret du château de Maulnes

 
Le petit château de Maulnes a été construit dans la seconde moitié du XVIème siècle, donc dans la foulée de Chambord. Il apporte son importante contribution au mystère architectural de la Renaissance. Cette étrange résidence ne fut pas conçue pour devenir une demeure permanente; elle est plutôt un symbole posé en pleine campagne. Maulnes fut ainsi peu habité et laissé à l'abandon. Il est actuellement en cours de restauration.
 
Voici quelques éléments tirés de mon étude sur le secret de Maulnes…

Le château de Maulnes présente 3 caractéristiques éminemment étranges :

1. Il est le seul château de France a arborer une forme pentagonale.

2. Il est bâti sur des sources.

3. L'escalier principal se trouve au centre du plan.

Ce dernier point est inspiré du château de Chambord où le grand escalier à double révolution est effectivement au centre du donjon.

Les commanditaires de la construction, Antoine de Crussol et Louise de Clermont, sont les descendants de familles de Pouvoir, influentes à la cour de France. Le grand-père d'Antoine de Crussol fut Lieutenant général du Roi et Gouverneur du Dauphiné. Les deux époux sont plus spécifiquement très proches de Catherine de Médicis, Reine de France et régente de François II , régente également pendant la minorité de Charles IX.

Il ne faut pas voir Maulnes comme un château recelant accessoirement un message, mais plutôt comme un message au centre même de la conception. François 1er était le Roi; il a bâti Chambord à la mesure des moyens financiers dont il disposait. Antoine de Crussol n'était « que » Duc, il a édifié Maulnes. A noter que Crussol avait 29 ans à la mort de François 1er : les deux hommes se sont certainement connus. Quant on est passionné par le même Secret, bâtir un château inutile ne pose aucun problème !

 
Voici une coupe nord-sud du bâtiment,par Jan Pieper. Il est édifié sur une pente, ce qui peut sembler curieux. Ainsi, 2 niveaux (ou étages) sont visibles sur la façade sud mais invisibles au nord.

On pénètre dans l'édifice par une petite entrée, au nord, un passage de très petite dimension. Pourtant, la plus belle façade du château est au sud ; « elle bénéficie, dans le traitement des détails, de finesses plus sophistiquées que les autres ». C'est notamment au sud que se présente la porte monumentale : étrangement cet accès est seulement utile… pour l'eau qui sort du château !

 
Le hall d'entrée est en fait un bassin qui a donné lieu à d'intéressants commentaires de la spécialiste Monique Chatenet. Il lui semble que « l'appareil alterné et les bossages rustiques des murs de la voûte » identifient cette partie à « une grotte d'où s'écoule l'eau ». En effet, les nobles de la Renaissance se plaisaient à agrémenter leurs riches demeures de grottes artificiellement créées.

Paul Barnoud, architecte en chef des Monuments Historiques, fait des remarques judicieuses au sujet de la grande « baie » par laquelle s'écoule l'eau. Cette porte est de forme à peu près carrée, ce qui n'est pas conforme au canon de cette époque. On aurait pu s'attendre à ce que l'ouverture soit plus haute de 50 cm , voire 1 mètre. Barnoud remarque une des portes latérales « surmontée de pierres brutes, arrondies, qui évoquent la ruine… Le maître d'œuvre suggère un édifice antique en cours de dégagement ». C'est-à-dire que le château vu du sud évoque discrètement un monument ancien laissé à l'abandon et recouvert par les sables !

Ainsi, des détails spécifiques font apparaître le château de Maulnes à la fois comme une grotte d'où s'écoule une source et comme une bâtisse en partie enfouie dans le sol. Ce contexte est tout à fait ajusté à l'idée d'un grand puzzle architectural posé sur la France : Maulnes en serait une pièce. Ce château virtuellement en sous-sol renforce le thème d'un Trésor monarchique qui serait caché dans une cave secrète.

A Maulnes comme à Chambord, le noyau de l'escalier ressemble à un puits. On a le symbole de l'accès à un souterrain ou à des salles en sous-sol. Cette idée est appuyée à Maulnes puisque le centre de l'escalier surplombe effectivement un puits ! Il est peu profond, certes, mais il suffit à donner une extension au code Chambord.

Le château de Maulnes dérobe sa forme pentagonale aux visiteurs, d'autant plus qu'il était serti au cœur d'une forêt. Imaginons une personne non avertie de l'excentrique plan à 5 côtés. De l'extérieur de l'enceinte, il lui est impossible de voir le château. Elle arrive à pied ou elle descend de cheval, peu importe. Une fois entrée dans le jardin, hé bien, elle ne remarquera pas la forme non carrée du château, d'abord parce que son œil n'a jamais vu de pentagone de pierre. Ensuite, les tourelles en saillie dans chaque angle faussent la perspective. Admettons que le visiteur doive attendre à l'extérieur avant d'être reçu par le maître des lieux, il fait les cent pas en sifflotant. Il ne s'apercevra de la forme pentagonale que d'un seul point de vue, tout au fond du jardin !



Pourquoi donc le concepteur de Maulnes s'amuse-t-il à ce petit jeu de trompe-l'œil ?

Sur le plan pentagonal du château, on dessine une étoile à 5 branches, à l'intérieur des murs. Cela détermine un petit pentagone central qui coïncide comme par hasard avec trois murs de la cage d'escalier.

On trace alors une seconde étoile, à l'intérieur du nouveau pentagone. On voit comment le noyau de l'escalier coïncide avec le petit pentagone central.

(D'après un dessin de l'ouvrage collectif sous la direction de Monique Chatenet et Fabrice Henrion, « Maulnes, archéologie d'un château de la Renaissance ». Editions Picard).

L'architecte (inconnu) était sans doute un grand connaisseur de l'art de la géométrie ; il n'ignorait certainement pas que le pentagone étoilé, c'est-à-dire l'étoile à 5 branches est un symbole très pur du Nombre d'Or. Par ses propriétés exceptionnelles, le Nombre d'Or est considéré comme le symbole de la magie des mathématiques: il est la signature de Dieu. Il incarne la philosophie néopythagoricienne pour laquelle le monde fut créé à partir des Nombres, eux-mêmes directement issus de Dieu. Et le nombre le plus étonnant, c'est Phi, le Nombre d'Or qui est égal à 1,618. Son carré fait 2,618 et son inverse 0,618. Moins d'un siècle avant Maulnes, Léonard de Vinci avait illustré le livre de Luca Pacioli sur la « Divine proportion », le Nombre d'Or.

 

Comment la forme pentagonale, signe de ralliement des disciples de Pythagore, suggère-t-elle Phi ? Voici un pentagone de côté Phi. Les dimensions 1, Phi² et 1/Phi harmonisent la structure !

A Maulnes, le mystère du pentagone casse la baraque !

Site du château de Maulnes.
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