Les habituelles ligues de vertu n’ont, évidemment, pas condamné ce fait divers. Et si d’aventures elles le faisaient, ce serait sans doute pour le relativiser en rappelant, par exemple, qu’une jeune candidate communiste a été elle-même victime d’une agression en Seine-Saint-Denis, comme vient de le faire le site FranceTvInfo. Bel exemple de désinformation par comparaison, faute de précisions sur les auteurs et les circonstances de ces violences.
Évidemment, quand les plus hauts personnages de l’État revendiquent clairement la stigmatisation d’un parti politique qui, par ailleurs, sert leurs desseins électoraux, il ne faut pas s’étonner qu’on s’en prenne à une personne âgée inoffensive. Quand le Front national est décrit sans cesse comme le parti de la haine, cela justifie tous les débordements. On peut même imaginer que ces deux agresseurs étaient sincèrement convaincus d’avoir affaire à une dangereuse émule d’Adolf Hitler, et qu’ils ont vu dans leur geste un acte de résistance dans la droite ligne de leurs prédécesseurs d’il y a 75 ans. Notre époque a les résistants qu’elle mérite.
Manuel Valls peut se féliciter de ce sursaut d’esprit citoyen, de cette affirmation sans peur et sans reproche des « valeurs de la République », de ces travaux pratiques effectués – non sans panache – sur une ennemie de la même République dont nous savons, depuis les propos du président de l’Assemblée nationale, que sa religion transcende toutes les autres religions. De son côté, François Hollande doit se frotter les mains. Non seulement ses troupes socialistes se mobilisent utilement, mais encore l’indignation qu’un tel acte soulève pourrait bien donner quelques points de plus au parti de Marine Le Pen, et, qui sait, le qualifier pour le second tour face au candidat PS susceptible alors de l’emporter grâce à l’insondable bêtise de l’UMP qui appellera à reporter ses voix sur lui.
La montée du FN est actuellement une nécessité vitale pour le régime. C’est la seule porte de sortie dont il dispose : parfaitement acquis à l’idée d’une violente déculottée aux élections départementales, il ne peut sauver quelques sièges qu’en imposant à ses concurrents UMP-UDI-MoDem ce fameux « front républicain » aux allures de disque rayé. Pour cela, il lui faut manier le paradoxe : diaboliser encore et toujours le FN, et en même temps ne rien faire qui pourrait détourner ses électeurs vers la droite libérale. Cela s’appelle le grand écart, et cela finit par être très douloureux… En revanche, lors de la présidentielle, nous entendrons une autre musique. C’est entre les deux tours que les gardiens du temple dénonceront à l’envi l’hydre fasciste et que, le hasard faisant bien les choses, une agression bien révoltante sera commise par des militants FN que la police identifiera sans aucun délai…
Et tout cela se fait au nom de la démocratie, et d’un régime qui n’en finit pas d’agoniser, en dépit des efforts des parlementaires pour imposer – aux autres – l’euthanasie vendue comme l’expression suprême de l’humanisme. Cette terrible agonie, dans des souffrances insupportables, mériterait sans doute une sédation terminale profonde.
Pour le malheur de la France, le patient n’a pas exprimé de volonté en ce sens.
Source
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire
Remarque : Seul un membre de ce blog est autorisé à enregistrer un commentaire.