Moi qui vis en pleine cambrousse, je vois bien que le paysan est en passe de devenir l’une des composantes les plus détestées du paysage social.
Détesté des citadins, car il vit encore à la campagne, qui est à l’origine de nous tous, et recèle encore des mystères presqu’oubliés.
Détesté des fonctionnaires qui prolifèrent sur son échine : lui n’a pas trahi, et croit encore qu’on doit vivre de sa valeur, pas de rapine et de discours.
Détesté des écolos, car, poussé par la nécessité (rembourser les banques et payer ses charges), et par l’endoctrinement, il n’a qu’une idée en tête : produire toujours plus.
Détesté des fainéants, car il passe sa vie à bosser.
Détesté des imbéciles et des incapables : il est intelligent et efficace.
Détesté des rêveurs et des doctrinaires : il vit son rêve et éprouve sa doctrine à l’aune du réel.
Détesté de ses frères et sœurs qui sont partis gagner en ville plus d'argent, plus de retraite, plus de cinéma et de plans cul, parce qu'il a parfois fini par se constituer un patrimoine.
Je voudrais donner une idée de ce que je ressens, à son égard :
Le mec dans son tracteur, souvent célibataire, détesté de tous et méprisé des femmes nourrit une foule de parasites directs ou indirects chargés de sa surveillance, de la gestion de son temps.
Ça signifie qu'en raison des 35 heures, des obligations de formation, des cinq semaines de congé OBLIGATOIRES, des absences dues aux incroyables maladies qui fondent sur le pauvre fonctionnaire et sa malheureuse famille décomposée, hâtivement recomposée, comme autrefois la vérole sur le clergé, en raison des maladies, disais-je, qui le maintiennent cloué devant la télé plusieurs semaines par an, des grossesses des madame, des congés paternité, des aléa climatiques, des journées d'information, du temps de pause et de fraternité de classe au self, à la machine à café, de la lecture et de la discussion des niouz, sans même parler des grèves surprise, bref, pour surveiller cet increvable animal préhistorique, il faut environ 4 à 5 fonctionnaires à plein temps.
De pleins bureaux d'inutiles diplômés qui établissent des barèmes, cochent des cases, épluchent des règlements, délivrent des permis, imposent des quota, des normes, aident le malheureux à remplir des formulaires par lesquels il renonce à toute initiative personnelle, le dissèquent, le toisent, le menacent, l'encouragent et le flattent tour à tour, du haut de leur minuscule puissance.
Pour observer sans discontinuer et rogner les ailes de l'effrayant paysan capable de bosser 7 jours par semaine 15 heures par jour, 370 jours par an, et cela sans compter les brigades fiscales ni les contrôles routiers, il faut 4 à 5 personnes toutes pleines de rancune et de mépris envers lui, ce pollueur insoucieux de la survie de la planète et de l’humanité.
Le paysan, lui, sauf dans les ennuyeuses périodes où, étranglé par les banques, les charges sociales et les coups de bourse des agioteurs, et peut-être le poids de cet ostracisme qu'il ressent, il se suicide, ce qui suscite l'émoi temporaire et enfin lucide de ceux qui sans lui mourraient de faim, faute d’avoir le moindre talent, le moindre courage, en dehors de ces crises fatales, le paysan se porte bien.
Il est fier de son talent. Conscient de sa vigueur, de sa valeur. Conscient que les mouches qui lui tournent autour ne lui arrivent pas au genou. Mais ficelé sans recours.
Sa fréquente brutalité n’est que de la franchise, face aux serpents qui l’entourent, aux sangsues qui le sucent.
Cet esclave moderne, haï et méprisé par ceux qui profitent de lui, cette anomalie d'un monde croulant sous le poids des inutiles et des incapables continue à "produire", ce qui est une véritable faute de goût, même le mot fait dégueulasse, dans la brillante société aux pieds d’argile qu’on nous a imposé, où toute la gloire est dévolue aux escrocs.
Avec notre accord, bien sûr. C'est le monde que nous acceptons.
Vieux Jade
Détesté des citadins, car il vit encore à la campagne, qui est à l’origine de nous tous, et recèle encore des mystères presqu’oubliés.
Détesté des fonctionnaires qui prolifèrent sur son échine : lui n’a pas trahi, et croit encore qu’on doit vivre de sa valeur, pas de rapine et de discours.
Détesté des écolos, car, poussé par la nécessité (rembourser les banques et payer ses charges), et par l’endoctrinement, il n’a qu’une idée en tête : produire toujours plus.
Détesté des fainéants, car il passe sa vie à bosser.
Détesté des imbéciles et des incapables : il est intelligent et efficace.
Détesté des rêveurs et des doctrinaires : il vit son rêve et éprouve sa doctrine à l’aune du réel.
Détesté de ses frères et sœurs qui sont partis gagner en ville plus d'argent, plus de retraite, plus de cinéma et de plans cul, parce qu'il a parfois fini par se constituer un patrimoine.
Je voudrais donner une idée de ce que je ressens, à son égard :
Le mec dans son tracteur, souvent célibataire, détesté de tous et méprisé des femmes nourrit une foule de parasites directs ou indirects chargés de sa surveillance, de la gestion de son temps.
Ça signifie qu'en raison des 35 heures, des obligations de formation, des cinq semaines de congé OBLIGATOIRES, des absences dues aux incroyables maladies qui fondent sur le pauvre fonctionnaire et sa malheureuse famille décomposée, hâtivement recomposée, comme autrefois la vérole sur le clergé, en raison des maladies, disais-je, qui le maintiennent cloué devant la télé plusieurs semaines par an, des grossesses des madame, des congés paternité, des aléa climatiques, des journées d'information, du temps de pause et de fraternité de classe au self, à la machine à café, de la lecture et de la discussion des niouz, sans même parler des grèves surprise, bref, pour surveiller cet increvable animal préhistorique, il faut environ 4 à 5 fonctionnaires à plein temps.
De pleins bureaux d'inutiles diplômés qui établissent des barèmes, cochent des cases, épluchent des règlements, délivrent des permis, imposent des quota, des normes, aident le malheureux à remplir des formulaires par lesquels il renonce à toute initiative personnelle, le dissèquent, le toisent, le menacent, l'encouragent et le flattent tour à tour, du haut de leur minuscule puissance.
Pour observer sans discontinuer et rogner les ailes de l'effrayant paysan capable de bosser 7 jours par semaine 15 heures par jour, 370 jours par an, et cela sans compter les brigades fiscales ni les contrôles routiers, il faut 4 à 5 personnes toutes pleines de rancune et de mépris envers lui, ce pollueur insoucieux de la survie de la planète et de l’humanité.
Le paysan, lui, sauf dans les ennuyeuses périodes où, étranglé par les banques, les charges sociales et les coups de bourse des agioteurs, et peut-être le poids de cet ostracisme qu'il ressent, il se suicide, ce qui suscite l'émoi temporaire et enfin lucide de ceux qui sans lui mourraient de faim, faute d’avoir le moindre talent, le moindre courage, en dehors de ces crises fatales, le paysan se porte bien.
Il est fier de son talent. Conscient de sa vigueur, de sa valeur. Conscient que les mouches qui lui tournent autour ne lui arrivent pas au genou. Mais ficelé sans recours.
Sa fréquente brutalité n’est que de la franchise, face aux serpents qui l’entourent, aux sangsues qui le sucent.
Cet esclave moderne, haï et méprisé par ceux qui profitent de lui, cette anomalie d'un monde croulant sous le poids des inutiles et des incapables continue à "produire", ce qui est une véritable faute de goût, même le mot fait dégueulasse, dans la brillante société aux pieds d’argile qu’on nous a imposé, où toute la gloire est dévolue aux escrocs.
Avec notre accord, bien sûr. C'est le monde que nous acceptons.
Vieux Jade
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