"San Cristobal est l'épicentre où tout a explosé", explique Liscar Depablos, une étudiante en médecine de 22 ans. "Ca ne va pas s'arrêter", avertit-elle. Barricades de détritus calcinés, barrières métalliques, troncs d'arbres ou machines à laver bloquent plusieurs rues de la ville, dans l'ouest du Venezuela, berceau de la mobilisation étudiante entamée début février. Mais les étudiants ne sont les seuls à prendre part aux blocages: médecins, avocats, commerçants, voire retraités de la fonction publique sont également mobilisés contre le gouvernement du président socialiste Nicolas Maduro sont également mobilisés.
Pourquoi sont-ils mobilisés ?
. Excédés par les interminables files d'attente dans les supermarchés, où persistent les pénuries de produits de base, comme la farine, le sucre, le lait ou le papier-toilette.
. Épuises d'avoir peur des groupes d'hommes armés et non identifiés qui sillonnent la nuit les rues de la ville, menaçant les manifestants.
. Furieux contre les agressions et les arrestations d'étudiants par la Garde nationale bolivarienne (GNB).
. Objectif: être entendus par le président Maduro, élu de justesse en avril 2013 après la mort de son mentor, le charismatique Hugo Chavez, dont il n'a jamais pu endosser l'habit.
Frondes, cailloux et bazookas artisanaux
Au départ, les barricades de San Cristobal étaient destinées à freiner l'avancée des unités anti-émeutes de la police et de leurs véhicules blindés. Mais beaucoup d'habitants de cette ville de 260 000 personnes bloquent désormais les rues pour dissuader des hommes à moto de circuler à la nuit tombée, en tirant des coups de feu et en volant.
Chaque barricade est tenue par six à 20 jeunes masqués, munis de lance-pierres, de cailloux et de petits bazookas pour lancer des feux d'artifice. Liscar Depablos vit dans une impasse, protégée par des bambous et des fils de fer depuis que la GNB a lancé il y a deux semaines des gaz lacrymogènes dans les appartements. "Mon chien s'est évanoui. Nous nous sommes enfermés dans le salle de bain en faisant couler l'eau pour que les gaz nous affectent moins", raconte-t-elle. Elle montre des cartouches de gaz portant l'inscription "fabriqué au Brésil" et des balles en caoutchouc - autre munition utilisée par les forces de l'ordre - marquées "anti-émeute".
"Ils font du mal à la ville"
Conséquence de la mobilisation persistante, la ville vit au ralenti, et les pénuries se sont encore aggravées. Peu de magasins sont ouverts, et certains commerçants manifestent leur exaspération à la vue des camions de marchandises qui évitent l'agglomération en raison des barricades.
"Ils font du mal à la ville", s'exclame ainsi Jesus Robles, gérant d'une boutique d'"arepas" (des pains de farine de maïs typiquement vénézuéliens). "Nous n'avons plus de produits, tout est plus cher."
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