À l'époque où les spécialistes en pédagogie n'étaient pas encore parvenus à réduire en lambeaux l'école publique, les instituteurs s'efforçaient, par des moyens simples, d'éveiller chez leurs élèves le goût de l'histoire. Ils affichaient souvent sur les murs des classes primaires une série d'affiches colorées. Celles-ci illustraient les grands épisodes de l'histoire de France : Vercingétorix vaincu jetant ses armes au pied de Jules César triomphant, Charlemagne visitant une école, Saint Louis rendant la justice sous son chêne, Louis XIV à Versailles, Napoléon chevauchant dans les plaines de Russie, etc. Ces images - et quelques dates symboles - demeuraient gravées dans la tête des futurs lycéens et servaient de socle émotionnel à l'enseignement ultérieur. Celui-ci s'élaborait lentement, de l'Antiquité en 6e, jusqu'à l'époque contemporaine en terminale.
Puis, sous l'influence d'une approche marxiste mal digérée, et pas encore revisitée par Althusser et ses disciples, on décréta que l'histoire n'était nullement forgée par la volonté humaine mais modelée par les forces de production, la lutte des classes, la sociologie. Exit les grands hommes, Clemenceau visitant les tranchées de 14 ou de Gaulle appelant à la résistance. Fini le roman de l'énergie nationale. Place au matérialisme historique, aux thèmes transversaux genre "la condition ouvrière au XIXe siècle", et à l'histoire universelle. Avec, plus récemment, une appétence particulière pour une démarche compassionnelle et culpabilisatrice sur les régimes totalitaires ou la colonisation devenue "colonialisme".
Une évolution sémantique révélatrice...
La construction européenne disparaît
Ultime étape de cette entreprise de démolition : le projet de réduire dès l'an prochain l'enseignement de l'histoire-géographie en 3e et terminale en attendant une refonte promise pour 2017. Que les programmes actuels soient aberrants, tout le monde en convient : cinq syndicats d'enseignants, toutes tendances confondues, avaient ensemble tiré la sonnette d'alarme. Mais que l'on en profite pour rogner encore un peu plus une discipline fondamentale pour la formation des futurs citoyens est scandaleux. Le projet tel qu'il a été révélé par notre confrère Le Monde n'a rien de rassurant : ce sont 30 à 36 heures d'enseignement qui seraient supprimées annuellement en 3e. Resteraient des thèmes nimbés d'idéologie. Par exemple "le rapport des sociétés avec leur passé". Le chapitre sur la construction européenne disparaîtrait, noyé dans un intitulé vague : "géopolitique du monde actuel".
L'histoire n'est pas un gadget. Elle participe de la construction identitaire et fournit une grille d'analyse aux évènements contemporains. Comment comprendre la crise actuelle en Syrie si l'on fait l'impasse sur le démembrement de l'empire ottoman après la guerre de 14-18 ? Si l'on ne sait pas que les accords franco-britanniques Sikes-Picot ont, en 1916, divisé le Proche-Orient en deux zones d'influence ? Si l'on fait l'impasse sur l'entrée des troupes françaises à Damas et la proclamation par la France du Grand Liban en 1920 ?
L'histoire coupée de la chronologie, du cadre géographique et des hommes qui l'ont façonnée devient un canard sans tête. C'est en apprenant d'abord l'histoire de France que l'on accède à l'histoire des autres.
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Oui d'accord, mais comme notre histoire est truffée de mensonges, on se demande si cela vaut le coup de l'enseigner...
RépondreSupprimerGuerric
j'ai récupéré dans une école où la mairie "faisait le ménage" une vingtaine de ces fameuses affiches peintes,magnifiques,sinon elles étaient vouées au feu...
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