19 avril 2011

L'été 1871...

L'été 1871 avait été excessivement sec ; l'humidité semblait avoir disparu de l'air par évaporation ; et le dimanche, les conditions atmosphériques dans tout le Nord-Ouest étaient d'un caractère des plus particulier. L'auteur vivait à cette époque au Minnesota à des centaines de miles du lieu des désastres et il ne pourra jamais oublier l'état des choses. Une sensation desséchée, combustible, inflammable, comme un four dans l'air, était réellement alarmante. On sentait qu'il n'y aurait fallu que d'une allumette, une étincelle pour provoquer une explosion mondiale. C'était étrange et surnaturel. « Je n'ai jamais ressenti quelque chose comme cela avant ou depuis lors. Ceux qui le vécurent corroboreront avec moi ces déclarations ».


À cette heure, 21h30, apparemment au même moment à des endroits éloignés de centaines de miles, près du lac Michigan, une région embrassant 400 miles carrés (1035 km2), s'étendant au nord depuis le comté de Brown et contenant Peshtigo, Manistee, Holland et de nombreux villages sur les rives de Green Bay, fut rasée par un absolu tourbillon de feu. Sept cent cinquante personnes furent tuées sur le coup, sans compter un grand nombre de blessés, mutilés et brûlés qui moururent ultérieurement. Plus de trois millions de dollars de biens furent détruits. (pages 393, 394, etc.)
peshtigo1871
© Unknown
Au coucher du soleil, une accalmie dans le vent et un calme relatif s'installèrent. Durant deux heures aucun signe de danger ne fut perceptible ; mais quelques minutes après neuf heures, et par une singulière coïncidence, les gens du village entendirent un terrible rugissement. C'était celui d'une tornade, écrasant les forêts au passage. Les cieux furent illuminés instantanément par une terrible lueur . Le ciel, qui avait été sombre un moment auparavant, éclata en nuages de feu.

Un spectateur de cette scène apocalyptique déclara que le feu ne vint pas sur eux graduellement d'arbres en feu ou d'autres objets en direction du vent, mais que le premier avertissement qu'ils reçurent fut un tourbillon de feu sous forme de grands nuages au-dessus du sommet des arbres, qui tomba et enveloppa entièrement tout. Les pauvres gens l'inhalèrent, [la toxicité de la nuée], cela ou bien l'air intensément chauffé, et tombèrent raides morts. Cela est vérifié par l'apparence de nombreux corps. Ils furent trouvés morts sur les routes et en plein air, où il n'y avait pas de marque visible de feu à proximité, sans trace de brûlure sur leur corps ou leurs vêtements. À Sugar Bush, qui est une clairière étendue, large de quatre miles (6,5 km) à certains endroits, les corps furent trouvés sur la route, entre des haies seulement légèrement brûlées. Ils ne portaient aucune marque de feu ; ils étaient étendus comme s'ils dormaient. Ce phénomène semble expliquer le fait que tant de personnes furent tuées en masses compactes. Ils semblent s'être serrés les uns contre les autres, dans ce qui était considéré de manière évidente à ce moment-là comme les endroits les plus sûrs, loin des bâtiments, des arbres ou autre matériau inflammable, et moururent là ensemble. (p. 372)

Un autre spectateur déclara :

« On a beaucoup parlé de la chaleur intense des incendies qui détruisirent Peshtigo, Menekaune, Williamsonville, etc., mais tout ce qui a été dit ne peut donner à un étranger qu'une faible conception de la réalité. La chaleur avait été comparée à celle engendrée par une flamme concentrée sur un objet par un chalumeau ; mais même cela ne rend compte que d'une partie du phénomène. Par exemple, nous avons en notre possession un cent en cuivre pris dans la poche d'un mort dans le Sugar Bush de Peshtigo, qui illustrera notre point. Ce cent avait été partiellement fondu, mais il garde encore sa forme ronde, et l'inscription dessus est lisible. D'autres pièces, dans la même poche, furent partiellement fondues, et pourtant les vêtements et le corps de l'homme n'étaient même pas roussis. Nous ne savons pas de quelle manière expliquer ce phénomène, à moins, comme il est affirmé par certains, que la tornade et le feu aient été accompagnés de phénomènes électriques » (373)

« Il est universellement admis que l'idée prédominante parmi les gens était que le dernier jour était arrivé. Accoutumés au feu comme ils l'étaient, rien de tel n'avait jamais été connu. Ils ne pouvaient donner d'autres interprétations à ce rugissement sinistre, cette explosion du ciel en feu, et cette chute de feu des cieux, consumant instantanément tout ce qu'il touchait ».

« Il n'y a pas deux personnes qui donnent la même description de la grande tornade quand elle frappa et dévora le village. C'était comme si 'les démons ardents de l'enfer avaient été libérés,' dit une personne. 'Elle vint en grandes flammes du ciel,' dit une autre. Il y avait une pluie sans pitié de feu et de « sable ».' ' L'atmosphère était totalement en feu.' Certains parlent de 'grandes boules de feu roulant et fonçant en flots.' Le feu bondissait au-dessus des toits et des arbres, et incendia toutes les rues en même temps. Personne ne put tenir devant le souffle. C'était une course contre la mort, au-dessus, derrière, et devant eux. » (Ibid 374).

Un ingénieur en travaux publics, en affaires à Peshtigo, témoigne :

« La chaleur augmenta si rapidement, quand le feu se déchaîna , qu'à environ quatre cents pieds (env. 120 m) du pont et du plus proche bâtiment, je fus obligé de m'allonger derrière un tronc d'arbre échoué dans environ soixante centimètres d'eau, et en allant sous l'eau de temps en temps, tenant ma tête proche de l'eau derrière le tronc, je réussis à respirer. Il y avait une douzaine de personnes derrière le même tronc. Si j'avais réussi à traverser la rivière et à aller dans un des bâtiments de l'autre côté, j'aurais probablement péri, comme beaucoup d'autres. »

Au Michigan, un certain Allison Weaver, près de Port Huron, décida de rester, pour protéger autant que possible un moulin dont il avait la charge. Il savait que le feu arrivait, et plongea dans un puits ou une fosse étroite, fit un couvercle en planche épaisse au-dessus, et se prépara à attendre la conflagration. Je cite :

« Il le remplit d'eau presque complètement, et prit soin de saturer le sol tout autour sur une distance de plusieurs perches7. En allant au moulin, il prit une planche de 10 cm, la scia en deux, et fit en sorte que les morceaux couvrent bien l'embouchure du petit puits. 'Je calculai que ce serait limite,' dit-il, 'mais c'était le mieux que je puisse faire.' A minuit il avait tout arrangé, et le rugissement était alors horrible à entendre. La clairière s'étendait sur dix à douze acres (4 à 5 ha) de surface, et Weaver observa que pendant les deux heures avant que le feu ne l'atteigne, il y eut une fuite permanente sur le sol de petits animaux. Tandis qu'il se reposait un moment après avoir arrosé encore une fois la maison, un cheval s'engouffra dans l'ouverture à pleine vitesse et se dirigea vers la maison. Weaver pouvait le voir trembler d'excitation et de terreur et ressentit de la pitié pour lui. Après un moment, l'animal émit un grognement de désarroi, courut deux ou trois fois autour de la maison et fonça ensuite dans les bois comme une fusée. »

« Peu de temps après, le feu arriva. Weaver se tenait près de son puits, prêt pour l'urgence, encore curieux de voir la ruée des flammes. Le rugissement augmenta de volume, l'air devint oppressant, un nuage de poussière et de cendres arriva en pluie et il pouvait voir la flamme à travers les arbres. Elle ne courait pas le long du sol, ni ne sautait d'arbre en arbre, mais elle venait comme une tornade, une couche de flammes allant de la terre au sommet des arbres. Quand elle frappa la clairière, il sauta dans le puits et le ferma avec les planches. Il ne pouvait plus voir, mais il pouvait entendre. Il dit que les flammes ne s'arrêtèrent pas, ni ne cessèrent leur rugissement un instant, mais il ne put guère maintenir fermée l'ouverture avant que la maison et le moulin ne soient réduits en cendres, et les deux furent rasés jusqu'au sol en cinq minutes. La fumée vint sur lui puissamment, et son repaire devint si chaud qu'il pouvait à peine respirer ».

« Il savait que les planches au-dessus de lui étaient en feu, mais en se souvenant de leur épaisseur, il attendit jusqu'à ce que le rugissement des flammes ait disparu, et alors avec sa tête et ses mains il les retourna et éteignit le feu en jetant de l'eau avec ses mains ; bien que la nuit fut fraîche, et que l'eau l'ait d'abord fait frissonner, la chaleur le réchauffa graduellement jusqu'à ce qu'il se sente tout à fait à l'aise. Il resta dans son repaire jusqu'au jour, retournant fréquemment les planches et éteignant le feu, jusqu'à ce que le pire soit passé. La terre tout autour était en feu par endroits, la maison et le moulin avaient disparu, les feuilles, les buissons et les bûches étaient propres comme si elles avaient été raclées et nettoyées avec un balai, et rien n'était visible, excepté de la suie et des cendres. » (390)

Au Wisconsin, à Williamson's Mills, il y avait un grand puits étroit sur les lieux appartenant à un M. Boorman. Les gens, quand ils furent isolés par les flammes et fous de terreur, pensant qu'ils seraient en sécurité dans l'eau, plongèrent dans ce puits.

« La furie impitoyable des flammes les poussa pèle-mêle dans la fosse, où ils luttèrent les uns contre les autres et moururent - certains par noyade, d'autres par le feu et la suffocation. Aucun n'en réchappa. Trente-trois corps furent retrouvés. Ils se trouvaient dans toutes les positions imaginables, mais les contorsions de leurs membres et les expressions d'agonie sur leur visage racontaient leur terrible histoire. » (386)

James B. Clark de Détroit, qui était à Union Town au Wisconsin, écrit :

« Le feu fonça soudainement, comme le flash d'une traînée de poudre à canon, et balaya en forme de croissant autour de la ferme. Il est presque impossible de concevoir la rapidité effrayante de l'avancée des flammes. Le feu qui fonçait semblait avaler et annihiler les arbres. »

Ils virent une masse noire venir vers eux depuis le mur de flammes :

« C'était une débandade de bétail et de chevaux fonçant vers nous, mugissant, meuglant et hennissant en galopant ; fonçant à une vitesse effrayante, leurs yeux dilatés et terrorisés, chaque mouvement présageant un délire de frayeur. Certains avaient été gravement brûlés, ils avaient dû plonger à travers un grand espace de flammes dans un effort désespéré pour s'échapper .

Suivant considérablement loin derrière, arriva un cheval solitaire, haletant et presque épuisé. Il était sellé et bridé, et comme nous le pensâmes d'abord, avait un sac attaché sur son dos. Quand il arriva nous fûmes étonnés à la vue d'un jeune lad allongé sur le cou de l'animal, la bride enroulée autour de ses mains, et la crinière enserrée dans ses doigts. Il ne fallut que peu d'effort pour arrêter le cheval las, et libérer tout de suite le garçon impuissant. Nous l'emmenâmes dans la maison, et tout ce qui était possible fut tenté ; mais il avait inhalé la fumée, et était visiblement en train de mourir. Au bout d'un moment il se ranima suffisamment pour parler. Il dit son nom - Patrick Byrnes - et raconta : 'Père et mère et les enfants montèrent dans le chariot. Je ne sais pas ce qu'il advint d'eux. Tout est brûlé. Je meurs. Oh ! L'enfer est-il pire que ça ?' » (383)
Quand nous quittâmes le Wisconsin et parcourûmes deux cent cinquante miles (400 km) vers l'est, au-dessus du lac Michigan et à travers tout l'état du Michigan, nous trouvâmes le même état de choses, mais un moindre nombre de morts. Quinze mille personnes se retrouvaient sans logis à cause des incendies ; leur nourriture, leurs récoltes, leurs chevaux et leur bétail étaient détruits. De ceux-ci, cinq à six mille furent brûlés la même nuit où les incendies éclatèrent à Chicago et au Wisconsin. La destruction totale des biens excéda un million de dollars ; non seulement les villages et les villes, mais aussi des municipalités entières furent anéanties.
Mais c'est à Chicago que nous devons nous tourner pour les résultats les plus extraordinaires de cette perturbation atmosphérique. Inutile de raconter l'histoire en détail. Le monde la connaît par cœur. Je n'ai la place que pour citer un ou deux points.

Le feu fut spontané. L'histoire de la vache de Mme O'Leary ayant initié la conflagration en cognant une lanterne s'est avérée être fausse. Ce fut l'excès de gaz de la queue de la comète Biela qui brûla Chicago !

Le chef des pompiers témoigna : « Je ressentis dans mes os que nous allions avoir un incendie. » dit-il, en parlant de la grange de Mme O'Leary :

« Nous prîmes le contrôle du feu, et il ne se serait pas étendu, mais on vint me dire que l'église St Paul, environ deux blocs au nord, était en feu. » (163)

Ils maîtrisèrent le feu de l'église, mais - « on apprit alors que le moulin de Bateham était en feu. »

Un rédacteur du New York Evening Post dit avoir vu dans Chicago « des bâtiments au-delà du front de feu, et sans contact avec le feu, éclater en flammes depuis l'intérieur. »

On ne doit pas oublier que la chute de 1871 fut marquée par d'extraordinaires conflagrations dans des régions éloignées les unes des autres. Le 8 octobre, le même jour où les incendies du Wisconsin, du Michigan et de Chicago éclatèrent, les États de l'Iowa, du Minnesota, de l'Indiana et de l'Illinois furent gravement dévastés par des feux de prairie ; tandis que des incendies faisaient rage dans les Alleghanies, les Sierras de la côte pacifique, les Montagnes Rocheuses et dans la région de la Red River du Nord.

L' Annual Record of Science and Industry de 1876, page 84, cite :

"Quatre semaines avant et après le grand incendie de Chicago en 1872, de grandes zones de forêts et de prairies, à la fois aux États-Unis et dans les provinces britanniques, brûlèrent. »

Les flammes qui consumèrent une grande partie de Chicago étaient d'un caractère inhabituel et produisirent des effets extraordinaires.

Elles fondirent complètement la pierre de construction la plus dure, qui avait été considérée antérieurement ignifuge. Le fer, le verre, le granite, furent fondus et assemblés en conglomérats grotesques, comme s'ils avaient été mis dans un haut fourneau . Aucun type de matériau ne put résister à son souffle ne serait-ce qu'un moment.

Je cite à nouveau l'ouvrage de Sheahan & Upton :

« Les énormes structures en pierres et en briques fondirent devant la férocité des flammes comme les flocons de neige fondent et disparaissent dans l'eau, et presque aussi vite. Des bâtiments de 6 étages prirent feu et disparurent pour toujours de la vue en l'espace de cinq minutes ... Le feu redoubla sur son chemin vers le grand Union Depot et brûla un demi mile (800 m) vers le sud dans les mâchoires même du coup de vent - un coup de vent qui soufflait une tornade parfaite, et dans lequel aucun navire n'aurait pu résister sur le lac...Des feux étranges et fantastiques, bleus, rouges et verts jouèrent le long des corniches des bâtiments. » ["History of the Chicago Fire" 85, 86].

L'Honorable William B. Ogden écrivit à l'époque :

Le feu était accompagné par la plus féroce tornade jamais vue ici. [Ibid 87]

« La particularité la plus frappante du feu était sa chaleur intense. Rien de ce qui était exposé n'y échappa. Parmi les centaines d'acres laissées nues on ne put trouver un morceau de bois quel qu'il soit, et à la différence des autres incendies, il ne laissa rien à moitié brûlé...Le feu balaya les rues de toutes poussières et déchets ordinaires, les consumant instantanément. » [Ibid 119]

Le marbre d'Athènes brûla comme du charbon !

« L'intensité de la chaleur peut être jugée et la combustion complète de tout ce qui est en bois peut être comprise, quand nous affirmons que dans la cour d'une des grandes usines de matériel agricole se trouvaient des centaines de tonnes de saumons de fonte. Cette fonte était à deux cents pieds (60 m) de tout bâtiment. Au sud il y avait la rivière, large de cent cinquante pieds (46 m). L'usine était le seul grand bâtiment à proximité immédiate du feu. Pourtant, la chaleur fut si grande que cette pile de fonte fondit et coula, et constitue maintenant une grande masse presque solide. » [Ibid 121]

La quantité de biens détruits fut estimée par le maire Medill à cent cinquante millions de dollars ; et le nombre de personnes sans abri à cent vingt cinq mille. Il y eut plusieurs centaines de morts.

« Ce que les témoins ont décrit ressemble plus à un holocauste venant des cieux qu'à un feu accidentel initié par une vache nerveuse. Et en fait, selon une théorie avancée par le membre du Congrès Ignatius Donnelly, les feux dévastateurs de 1871 tombèrent d'en haut sous forme d'une queue de comète incontrôlable. Au cours de son passage de 1846, la comète Biela s'était inexplicablement coupée en deux ; elle était supposée revenir en 1866, mais elle n'apparut pas. La tête fragmentée de Biela apparut finalement en 1872 sous forme d'une pluie de météores.

« Donnelly suggéra que la queue séparée apparût en 1871 et fut la principale cause de la tempête de feu étendue qui balaya le Midwest, endommageant ou détruisant un total de vingt-quatre villes et laissant 2 000 morts ou plus dans son sillage. Les conditions de sécheresse qui ne font aucun doute ont contribué à l'étendue de la conflagration.

« L'Histoire se concentre maintenant sur le seul incendie de Chicago et néglige largement l'Horreur de Peshtigo, comme elle était appelée alors. Elle ignore la comète Biela et sa queue inexpliquée. » (Ken Rieli)

D'après Sott.net

1 commentaire:

  1. Je connaissais comme tout le monde l'incendie de Chicago mais je n'avais aucune connaissance de ces autres incendies.

    Je suis contrite d'être aussi ignarde sur le sujet !

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