Depuis quelques temps déjà, nous observons avec intérêt le naufrage de l’Allemagne à la suite des nombreux trous que son équipage s’acharne à percer dans la coque sous la direction de sa direction politique. Ces derniers jours, on s’est beaucoup agité du côté, justement l’occasion est bonne, de cette direction, – avec hauts et bas, comme des hoquets à la façon Macron, – mais lui, cela n’importe pas, on sait depuis longtemps qu’il fait n’importe quoi pour qu’on s’intéresse à lui et qu’il y trouve sa pitance.
Par exemple, successivement, Scholz nous annonce qu’il est toujours prêt, – on dirait “plus que jamais”, – à aller négocier à Moscou, certainement pour parvenir à une paix tout à fait honorable dont on dira à l’ami-Zelenski qu’il lui faut s’en contenter. Quelques jours plus tard, il prend à nouveau la parole pour accuser la Russie d’être la responsable de la crise économique que traverse l’Allemagne à cause principalement de l’interruption de livraison du gaz et du pétrole. La démarche est toujours la même, comme l’offre de parler de la paix : on insulte la Russie, on la sanctionne de toutes les façons, on la menace, on la conchie, et l’on est stupéfait qu’elle réponde finalement en coupant les livraisons d’énergie. Heureusement qu’en même temps que Scholz se plaignait de Moscou après avoir offert d’aller à Moscou, le leader de la CDU-CSU, adversaire actuel et futur partenaire de Scholz dans une Grande Coalition qui sortira des prochaines élections, Monsieur Friedrich Merz donc alignait Moscou dans son viseur et donnait à la Fédération de Russie un ultimatum de 24 heures, disons pour se rendre, sans quoi l ‘Allemagne livrerait des ‘Taurus’ à l’Ukraine pour que ce pays déclenche le pire orage de fer et de flammes qu’il ait subi depuis l’opération ‘Barbarossa’.
A ce point, je veux parvenir à me faire l’écho d’un excellent, vraiment très bon duo Christoforou-Mercouris sur l’Allemagne, hier, sous le titre :
« L’Allemagne accuse la Russie d’être la cause de ses déboires économiques. »
Ils furent excellents de bout en bout, comme ils sont d’habitude mais encore plus que d’habitude, l’un des meilleurs d’eux que j’ai pu regarder. Il y a certes l’exposé de la situation méga-catastrophique de l’Allemagne aujourd’hui, mais surtout , une partie (le dernière qui fait un tiers de la vidéo, à partir de 10’00”). Je vous laisse voir et entendre au court dialogue introduisant la chose :
Christoforou : «... Mais pourquoi, à votre avis, les dirigeants allemands de ces dernières années, Merkel, Scholz, pourquoi est-ce qu’ils poussent à la désintégration de l’Allemagne ? »
Mercouris : « C’est... C’est une question massive, énorme ! »
Bien... L’on nous rappelle, ce que tout le monde entendra, que les dirigeants allemands jusqu’à Merkel furent tous d’une remarquable qualité. Quelques noms, bien sûr : Adenauer, Brandt, Schmidt, Kohl, jusqu’à Schroeder enfin. Le dernier sonne ferme : avec son compère Chirac, et même à trois avec Poutine, Schroeder a participé à une fronde contre la guerre US en Irak de 2003, et conduit les premières négociations sur le nucléaire avec l’Iran, dans une atmosphère si cordiale, tout à fait différente de ce qui est apparu à partir de 2006-2007... Puis Schroeder s’en est allé, le CDU-CSU de Merkel a remplacé le SPD de Schroeder...
« Maintenant que s'est-il passé ? Et bien je pense qu'à un certain niveau nous avons vu un changement majeur avec Merkel en ce sens que Merkel ressemble de plus en plus à une sorte de figure de transition. On a le sentiment qu'à un moment donné au début des années 2000, lorsque Schroeder son prédécesseur a pris position contre la guerre en Irak, une sorte de réaction a eu lieu en Allemagne, vraisemblablement de la part des forces atlantistes très très puissantes qui existent en Allemagne, réaction selon laquelle cela ne doit plus jamais se reproduire, nous ne devons jamais plus avoir un dirigeant en Allemagne qui prend position contre les Etats-Unis... »
Ainsi commence l’ère Merkel, marquée par de sinuosités, des changements de rythme, des orientations qui changent peu à peu, tout cela réalisé subtilement et même cyniquement sans que personne ne le mesure vraiment. Merkel fut-elle dans sa première vie un agent de la Stasi en Allemagne de l’Est ?
A suivre cette ligne brisée et trompeuse, on le croirait bien... L’on y croise bien des vilaines affaires où les tendances de Merkel à servir les intérêts américanistes en propriété sont le thème principal des soupçons des commentateurs indépendants. Et lorsqu’elle fait tout un plat de confidences venues de l’affaire Snowden sur des écoutes directes de son téléphone par la NSA/CIA, on s’aperçoit bien vite que c’est pour la galerie et que, bonne fille, Merkel accepte cette surveillance bienveillante. C’est alors qu’on se dit que c’est une preuve remarquable de son appartenance à la Stasi, dont nombre de ses agents savaient qu’ils étaient eux-mêmes espionnés par le centre pour qu’on sache s’ils espionnaient bien.
Dans tous les cas, quand elle arrive, le terrain est bien préparé à Berlin après l’assassinat de la personnalité de Schroeder par les neocons et leurs relais atlantistes allemands qui firent de lui un agent stipendié de Poutine...
« Schroeder n'a pas seulement été progressivement évincé du pouvoir par des élections, il faut le dire. Il a aussi été discrédité, lui qui fut un chancelier très capable avec un bilan très impressionnant... Mais toute sa réputation a été complètement détruite en Allemagne... »
C’est à partir de cette évolution éclairée et qui ne nous a guère été perceptible que Merkel s’installe pour longtemps à la chancellerie et commence à manœuvre. Elle est une maîtresse en manœuvres politiques, cette sorte de choses qu’ion appellerait trahison sur trahison, sans honneur ni principes, qui va nous donner les fraudes-bouffes des accords-Minsk, la saga des NordStream et de l’énergie russe, les danses à contretemps autour et au-delà de l’Ukraine.
Mercouris, que j’entends pour la première fois aussi net dans ses jugements sur une personnalité politique depuis que je l’écoute, tranche avec cette explication centrale qui irait comme un gant à une maîtresse-espionne : l’incroyable cynisme de Merkel, qui va contribuer comme personne d’autre à plonger l’Allemagne et l’Europe dans la situation catastrophique que nous avons aujourd’hui tandis qu’elle s’est retirée, couverte d’honneurs et de compliments pour l’éternité. Ainsi avons-nous la recette de notre situation présente : le cynisme de Merkel ajouté puissamment et comme un entraînement irrésistible à l’inévitable folie de l’hubris américaniste... Et l’on écoute Mercouris :
« C’est à ce moment [chute de Schroeder] que Merkel arrive. Elle est dure, intelligente, profondément cynique à mon avis et totalement sans principe. D’une part, elle va dans le sens de tout ce qui s’est passé et elle ne veut pas que la même chose lui arrive. En même temps elle comprend parce qu'elle est intelligente et qu'elle vient d'Allemagne de l'Est à quel point la relation avec les puissances se fait toujours dans une sorte d'équilibre.
» Elle se rend à Moscou en 2014 et elle parle à Poutine pendant les premiers combats en Ukraine. Ils s’accordent sur les idées de Minsk et ils négocient Minsk. Cela semble résoudre les choses pour l’Allemagne. Elle conclut ensuite l'accord NordStream II et, comme nous l’avons toujours souligné, ce sont les Allemands qui l'ont recherché, pas les Russes. Les Russes, à cette époque, étaient profondément sceptique à ce sujet...
» En même temps, elle mesure qu’il y a un retour de bâton atlantiste, que les Américains et les Britanniques ne sont pas contents, alors elle change de position de manière très cynique mais très typique de son comportement. Au départ elle a incliné vers les Russes et elle a NordStream 2 ; ensuite elle a commencé à faire traîner les choses avec les Russes, c’est très typique de Merkel et elle continue en mettant en cause les Russes, et elle provoque par conséquent la montée d’un sentiment antirusse en Allemagne. Elle ne va jamais risquer sa position en Allemagne en affrontant [les atlantistes] ; en même temps elle développe un processus de purge dans le système politique compétent pour éviter qu’un concurrent se révèle contre elle.
» Le résultat est que nous nous retrouvons avec des dirigeants politiques faibles, des personnes qui suivent la direction du centre atlantiste dont bien sûr s’était installée comme le leader. Nous ne devons jamais l’oublier, elle a joué un grand rôle pour nous donner des dirigeants allemands faibles et très réticents à affronter les atlantistes... »
Voilà une version intéressante, ou comment les Allemands marchent au pas, – ce n’est pas le pas de l’oie, – vers l’effondrement de l’Allemagne avec les conséquences pour l’Europe-UE envoyé dans une mascarade-bouffe du simulacre de la puissance, version-Ursula. Dans la lutte feutrée pour l’état de l’esprit de la réunification entre la République populaire (Allemagne de l’Est-RDA) et la République fédérale (Allemagne de l’Ouest-RFA) de l’ancien temps, c’est la Stasi qui, d’outre-tombe, l’a emporté. Maîtresse dans la surveillance de ses subordonnés, elle l’est aussi dans la soumission à la puissance dominante.
Je ne sais pas s’il faut vivre cela comme une calamité. Après tout, ces trahisons et ce cynisme sont intervenus contre un rangement efficace des projets globalistes (voir l’UE), avec la mise en évidence de la puissance russe et la transmutation de ces affrontements divers et honteux en une vraie et rude bataille entre le globalisme-moderniste et la réaction désormais bien identifiée d’une branche traditionaliste de la Résistance.
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