28 octobre 2024

"En une nuit, je suis devenue accro" : plongée dans l'enfer du fentanyl à San Francisco


Une partie de la ville est ravagée par le fentanyl tandis que, dans les hauteurs, vit la plus grande concentration de milliardaires des États-Unis.

San Francisco est né avec la Ruée vers l'or, le Far West. Aujourd’hui, une chape de plombs coiffe la capitale de la high-tech, berceau de Twitter, Uber et Airbnb.  Depuis quelques années, derrière les tours, la ville de presque un million d’habitants est méconnaissable par endroits.

Elle s’effondre à cause de la drogue. Ici, on chauffe sa dose de fentanyl au chalumeau. Un opiacé synthétique cinquante fois plus puissant que l’héroïne, pour moins de dix euros la dose.

La drogue ne touche pas seulement un public précaire. Sara, capuche sur la tête, travaillait à Hollywood, très bien payée. À cause d’une dose, elle est tombée dans l'addiction. "J’ai un ami qui m’a mis la pression un jour pour que j’essaye le fentanyl. Je n’étais pas très bien, un peu dépressive et j’avais déjà pensé au suicide. Donc j’en ai pris et au début mes mauvaises pensées se sont effacées. Je me suis dit que j’allais pouvoir en reprendre immédiatement après. En une seule nuit, j’étais devenue accro. Si j’ai un conseil, n’y touchez pas", raconte Sara.  

"Vraiment, éloignez-vous de ce truc"

Les consommations se font à ciel ouvert, partout dans ce quartier grand comme un arrondissement parisien. Ici, pour se payer des doses, on vend des objets volés, parfois quelques heures plus tôt, à des passants ou des touristes. Ici ce sont des pochettes en cuir et des portefeuilles.  

Le couple, que l’on voit dans le reportage, consomme depuis cinq ans. Il vit dans la rue et parle d’une drogue qui ravage le cerveau autant que le corps. "La première fois, je me suis allongée sur le sol. Mon estomac me faisait mal comme jamais. J'avais une crampe comme si on venait de me donner un coup de pied", décrit la femme. "Il faudrait que je me calme, que je me limite à une dose par jour", répond-elle quand le journaliste François-Xavier Ménage lui demande si elle est addict. “J’ai tellement mal au dos que je ne peux même plus marcher. Vraiment, éloignez-vous de ce truc", déclare l’homme assis à côté d’elle.  

La police et des agents de sécurité contre l'insécurité

La mairie a beau déployer des patrouilles, le trafic ne faiblit pas de la main à la main, ou par trottinette dès le lever du soleil. Ce quartier est devenu un mouroir et la police, malgré des efforts conséquents, est toujours débordée. "On bosse très dur et on cible des zones particulières pour essayer d’attraper des dealers. On a même créé une force spéciale pour les arrêter", affirme un policier de San Francisco. Avant d’interrompre l’interview quand François-Xavier Ménage lui dit que les dealers sont partout dans les rues. "Je m’arrête là. Ce serait mieux de parler avec notre responsable de la communication au commissariat mais croyez-moi nos équipes sont dédiées et sont très responsables", conclut-il.  

"On est toujours dans le quartier de Tenderloin et ce qu’il faut comprendre c’est que l’insécurité est quand même très importante et donc à l’entrée de certains parcs, dont celui-ci où il y a des enfants, il y a des agents de sécurité", explique François-Xavier Ménage en passant devant un parc surveillé. À côté, les commerces ferment les uns après les autres et certains hôtels, au bord de la banqueroute, faute de touristes, attaquent en justice la municipalité. 

Des anciens toxicomanes pour aider les nouveaux

De leur côté, les associations font leur maximum sur le terrain : d’anciens toxicomanes embauchés pour aider les nouveaux. "Si vous voyez une personne dans la rue, en train de faire une overdose, il faut administrer ce produit. C’est un spray nasal. On donne aussi des tests de drogue pour savoir avec quels produits et substances ont été fabriqués la drogue", dit l’un d’eux en montrant du Narcan.  

Aux États-Unis, l’an dernier, 75.000 morts sont liés au fentanyl. Les volontaires proposent à l’équipe de TF1 de traverser le centre-ville, jusqu’au siège de l’association. Pendant 30 minutes, elle va croiser des centaines de consommateurs. Certains au pied de la mairie, en pleine démence.  

"Maintenant, c'est le fentanyl et c’est encore bien plus mortel"

À un kilomètre de là, les pompiers sont appelés en urgence pour un feu dans un hôtel miteux. Voilà qui éclaire une autre crise : celle du logement. À San Francisco, la moitié des bureaux sont vides depuis le Covid et le télétravail. Il n’y a pas de brassage des populations, pas d’interactions sociales. Le centre est transformé en ghetto de la drogue. "Quand je suis arrivé ici, c’était l’héroïne, maintenant, c'est le fentanyl et c’est encore bien plus mortel", analyse un pompier.  

Lui aussi connaît par cœur San Francisco, un chauffeur de taxi en veut aux démocrates et à l’ancienne procureure du coin, une certaine Kamala Harris, de ne pas en avoir fait assez. "Ils sont au pouvoir localement depuis des décennies. Je vais vous faire une comparaison. Ils sont comme des dentistes malhonnêtes. Ils ne cherchent pas les caries, ils ne soignent pas. Pour soigner, il faudrait arracher des dents. Et il faut savoir qu’agir ainsi, ça fait mal", affirme le professionnel.  

À mesure que l’on quitte le centre pour les hauteurs, une autre ville surgit. En effet, San Francisco a la plus forte concentration de milliardaires des États-Unis. Et François-Xavier Ménage de conclure devant un parc bordé de maisons avec une vue sur les buildings :  "C’est ainsi que se termine notre périple. Périple américain de 3 500 km de Chicago jusqu’aux hauteurs de San Francisco, et si on devait résumer la situation politique avant l’élection, et bien, ce serait peut-être avec ce paysage : on est plus que jamais dans une terre de contraste." 

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