30 août 2024

Une revue australienne liée aux “Five Eyes” explique les raisons profondes de l’arrestation de Dourov


L’ASPI, le groupe de réflexion australien lié aux “Five Eyes” (les services de renseignement de l’Australie, du Canada, de la Nouvelle-Zélande, du Royaume-Uni et des USA) tiendra bientôt son sommet annuel consacré aux cybertechnologies, aux menaces hybrides, à la désinformation, à l’ingérence électorale, à l’intelligence artificielle, etc. connu sous le nom de « Sidney Dialogue ». Or l’un des articles publiés dans la perspective du sommet est consacré à Telegram. Il éclaire singulièrement les raisons profondes de l’arrestation de Pavel Dourov. Il se concentre sur les risques posés par Telegram en tant qu’« outil pour les menaces hybrides » et appelle à une réglementation plus stricte. L’ASPI révèle le motif de l’arrestation de Pavel Dourov que la police de Macron a camouflé sous de faux prétextes. Nous en donnons quelques extraits. 
 


L’article consacré à Telegram par un chercheur du think tank ASPI qui se dissimule derrière un pseudonyme (Fitriani) relativise les raisons officielles données par la police française pour faire arrêter Pavel Dourov:

Derrière les raisons alléguées par la police de Macron

Autrefois célébré comme l’outil ultime de communication libre grâce à son cryptage et à ses pratiques de modération laxistes, Telegram est aujourd’hui accusé par les autorités françaises de faciliter les activités criminelles et d’être éventuellement exploité pour des menaces hybrides, en particulier par des acteurs étatiques russes. Les menaces hybrides associent la force militaire à des tactiques non militaires, notamment les cyberattaques et la désinformation.
Pour contrer ces menaces, les décideurs politiques du monde entier doivent donner la priorité à la réglementation, à la responsabilisation des plateformes et à la promotion de plateformes alternatives moins susceptibles d’être utilisées à mauvais escient, tout en protégeant la liberté d’expression. Il s’agit d’un exercice d’équilibre délicat.

Telegram instrument du soft power russe

Au moins, l’obsession russe est clairement avouée:

Le rôle de Telegram dans de telles opérations hybrides, en particulier dans le contexte des activités soutenues par l’État russe, est devenu de plus en plus évident. La plateforme a été utilisée non seulement pour des communications privées légitimes, mais aussi comme outil de diffusion de désinformation, de propagande et de contenus extrémistes. Cette situation est particulièrement préoccupante dans les zones de conflit telles que l’Ukraine, où Telegram compte 7 millions d’utilisateurs, dont des représentants du gouvernement et des leaders d’opinion.
Bien que M. Durov affirme que sa plateforme n’est pas soutenue par le Kremlin, les liens financiers de Telegram avec des oligarques russes et des entités contrôlées par l’État suggèrent le contraire. Les investissements de personnalités telles que Roman Abramovich et Sergey Solonin, tous deux liés au gouvernement russe, suscitent de vives inquiétudes quant à la susceptibilité de la plateforme à l’influence de l’État.
Cet enchevêtrement financier est alarmant compte tenu de la portée étendue de Telegram en Europe de l’Est, en Asie centrale et au Moyen-Orient, régions qui font l’objet d’opérations hybrides de la part de la Russie.

Un échantillon de pur complotisme occidental

L’auteur donne à fond dans la paranoïa antirusse :

La tentative du gouvernement russe de bloquer Telegram en 2018 et la prétendue délocalisation de l’application à Dubaï pourraient avoir été une façade stratégique, donnant une couverture aux chaînes Telegram qui promeuvent des récits pro-russes, notamment en glorifiant les séparatistes, en justifiant l’invasion de l’Ukraine et en diffusant de la propagande extrémiste – dont certaines auraient alimenté les récentes émeutesanti-immigration au Royaume-Uni.
Cette manœuvre a permis de préserver l’illusion de l’indépendance de Telegram tout en le rendant accessible au Kremlin, ce qui s’inscrit dans la stratégie hybride de la Russie. Il s’agit d’une tactique tout à fait compréhensible : utiliser la désinformation pour affaiblir des adversaires, soit comme alternative, soit comme complément à une confrontation militaire, est une approche rentable.
 
Macron n’est qu’un pion dans la “guerre hybride” que la sphère anglophone mène contre la Russie

Si vous aviez encore un doute quant à l’autonomie de Macron, cet article vous dégrisera. On comprend que l’arrestation de Paris prend sa place dans un programme piloté par la communauté anglo-saxonne mondiale et qui relève de la guerre hybride:

Alors que les plateformes de messagerie jouent un rôle de plus en plus central dans les communications et les conflits, les leçons tirées de l’essor de Telegram et de ses liens avec les intérêts russes soulignent l’importance de la transparence, de la réglementation et de la promotion de plateformes sûres et responsables.
Des réglementations plus strictes peuvent être mises en œuvre pour les plateformes numériques afin de garantir la transparence de leur politique de régulation du contenu, de leur propriété, de leur régime juridique et du stockage de leurs données. Le monde peut s’inspirer, entre autres, de la loi allemande sur l’application des réseaux (NetzDG), qui oblige les plateformes de médias sociaux à retirer rapidement les contenus illégaux sous peine d’amendes importantes.
La loi sur les services numériques (DSA) de l’Union européenne oblige les grandes plateformes en ligne à évaluer et à atténuer les risques liés à la diffusion de contenus illégaux, à la désinformation et à d’autres activités préjudiciables. De même, la section 230 de la loi américaine sur la décence des communications (Communications Decency Act) a été établie pour tenir les plateformes responsables du contenu qu’elles hébergent tout en préservant la liberté d’expression. En Australie, la réglementation comprend la loi sur la sécurité en ligne de 2021 et le forum des régulateurs des plateformes numériques.
Alors que la communauté internationale a sans doute été trop lente à responsabiliser les plateformes de messagerie et de médias sociaux, ces mesures prises par les gouvernements reflètent une évolution positive vers une meilleure surveillance. L’épisode Telegram rappelle l’importance pour les démocraties de se prémunir contre les multiples menaces hybrides et de mettre en œuvre des mesures adaptées à leurs préoccupations particulières en matière de sécurité.

On se croirait dans l’ancien monde communiste: ne parlez plus d’arrestation de Pavel Dourov mais “d’évolution positive vers une meilleure surveillance” de l’opinion publique!

Source : https://lecourrierdesstrateges.fr/2024/08/29/une-revue-australienne-liee-aux-five-eyes-explique-les-raisons-profondes-de-larrestation-de-dourov/

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Remarque : Seul un membre de ce blog est autorisé à enregistrer un commentaire.