09 mai 2023

Le premier réacteur AP1000 américain démarre

Georgia Power a annoncé la divergence de l’AP1000 Vogtle 3. C’est le premier réacteur de troisième génération à atteindre la criticité sur le territoire américain. Un événement important alors que les États-Unis ambitionnent d’exporter des réacteurs en Europe.

Le 7 mars 2023, le départ du processus de réactions en chaîne (ou divergence) de Vogtle 3 a marqué le début de la phase de démarrage. Selon les dernières annonces de Georgia Power, les opérations commerciales pourraient débuter en mai/juin 2023. Le réacteur Vogtle-4 doit, quant à lui, entrer en service au premier trimestre 2024. C’est un événement important pour le nucléaire américain. D’une part, si l’on exclut le cas particulier de Watts Bar 2 [1], cela faisait 30 ans qu’un réacteur n’avait pas divergé sur le territoire national. D’autre part, il s’agit du premier réacteur de troisième génération du parc américain à s’approcher de la mise en service. Une aventure qui n’a cependant pas été sans embuches.

Le lancement compliqué des réacteurs de troisième génération

C’est sous le mandat de Barrack Obama, en 2013, que les chantiers nationaux de quatre réacteurs AP1000 ont été lancés. Cela faisait alors 30 ans que l’on n’avait pas vu de nouvelles constructions nucléaires sur le territoire américain. Deux unités étaient construites à Vogtle dans l’État de Géorgie et deux autres à V.C. Summer, en Caroline du Sud. Les deux unités de V.C. Summer furent abandonnées en 2017 en raison de la dérive des coûts du chantier, dans un premier temps tenue secrète par les porteurs du projet. Les tranches 3 & 4 de Vogtle ont aussi accumulé les difficultés avec, pour la centrale, un coût initial passant de 14 à 30 milliards de dollars selon les estimations publiées en mai 2022.

L’analyse de ces chantiers de construction a permis de mettre en lumière des problèmes de contractualisation et de gouvernance de projet. « Les projets AP1000 américains ont souligné l’importance d’avoir une équipe de projet solide et expérimentée », explique l’Agence de l’énergie nucléaire de l’OCDE (NEA). «  En effet, deux contractants majeurs étaient, à l’origine, des compagnies d’ingénierie du secteur pétrolier avec aucune expérience dans le nucléaire. En conséquence, les équipes dirigeantes ont initialement sous-estimé les défis que présentaient de nouvelles constructions nucléaires », détaille-t-elle encore. « À V.C. Summer, cela a mené à une situation où le calendrier n’était plus en phase avec le réel avancement du chantier ».

Pendant ce temps-là, quatre réacteurs AP1000 étaient en construction en Chine. Les chantiers de Sanmen et de Haiyang ont débuté en 2009 pour se conclure par l’entrée en service des quatre unités en 2018.

Un retour en force à l’export

C’est une fin de chemin de croix qui est bienvenue pour la filière nucléaire américaine qui cherche aujourd’hui à vendre de nombreux réacteurs en Europe. Westinghouse prévoit en effet de vendre trois réacteurs en Pologne, en propose cinq à neuf en Ukraine et quatre en Bulgarie. L’AP1000 est aussi proposé en République tchèque dans le cadre d’un appel d’offres l’opposant aux filières française et coréenne. Westinghouse, le concepteur de l’AP1000, placée en 2017 sous protection du chapitre 11 de la loi américaine sur les faillites, semble ainsi tourner une page de son histoire. ■

Gaïc Le Gros (Sfen)

Crédit photo ©Georgia Power

[1] Comme la filière française, l’industrie américaine a vécu une longue période où les chantiers de construction étaient inexistants. Cette histoire s’illustre à travers la construction de la centrale de Watts Bar qui compte les deux dernières unités mises en service aux États-Unis. La première fut connectée au réseau en 1996 et la seconde en 2016. En effet, la Construction de Watts Bar 2 s’est interrompue de 1985 à 2007 séparant alors de vingt ans des unités jumelles.

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