Le journal suisse Neue Zürcher Zeitung a publié aujourd’hui un article (en allemand) qui affirme que le patron de la CIA, William Burns, a offert 20 % de l’Ukraine à la Russie en échange de la paix en Ukraine.
Comme le résume Newsweek :
La NZZ a rapporté jeudi, citant des politiciens allemands de haut rang, qu’à la mi-janvier, Burns a présenté à Kiev et à Moscou un plan de paix qui mettrait fin à cette guerre qui a commencé lorsque Poutine a envahi l’Ukraine le 24 février 2022.
Selon le journal, la proposition offrait « environ 20 % du territoire de l’Ukraine« , soit à peu près la taille de la région orientale du Donbass.
Le porte-parole du Kremlin, Dimitry Peskov, la Maison-Blanche et la CIA ont nié cette histoire :
Un responsable de la CIA a déclaré à Newsweek que les affirmations du rapport de la NZZ selon lesquelles Burns aurait effectué un voyage secret à Moscou en janvier et qu’une proposition de paix aurait été présentée par le directeur au nom de la Maison Blanche étaient « complètement fausses« .
Le mois dernier, Burns a fait un voyage secret à Kiev pour rencontrer et informer le président ukrainien Volodymyr Zelensky, selon le Washington Post.
Le Neue Züricher affirme qu’aussi bien Kiev que Moscou ont rejeté le plan américain.
Le fait que tout le monde nie que cela se soit produit signifie que les affirmations du Züricher sont probablement vraies.
Nous savons que des discussions entre Washington et Kiev sont en cours.
Le 30 janvier, le secrétaire d’État Anthony Blinken était en Égypte et a rencontré son ministre des Affaires étrangères Sameh Shoukry. Le lendemain, Shourky s’envolait pour la Russie et rencontrait son ministre des Affaires étrangères, Sergei Lavrov. Les médias égyptiens ont rapporté que Shoukry était porteur d’une lettre de Blinken :
Le média d’État égyptien Al-Ahram a rapporté que Shoukry a remis à Lavrov un message de Blinken. Le message semble faire référence à un appel à l’arrêt de l’offensive russe en Ukraine.
« La Russie devrait arrêter ces actions afin que les négociations aboutissent« , tel était le message, selon Al-Ahram.
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Un porte-parole du département d’État a déclaré à Al-Monitor que M. Blinken avait un message cohérent disant que la Russie devrait arrêter la guerre en Ukraine et retirer ses forces du pays pour le bien de la paix. Le message qu’il a transmis à Shoukry n’en diffère pas, selon le porte-parole.
Lavrov a qualifié la proposition d' »incomplète« . Lavrov a également salué l’approche « équilibrée » de l’Égypte concernant la guerre en Ukraine. Lavrov a en outre déclaré que la Russie continuerait à s’engager avec l’Égypte sur la question de l’Ukraine, a rapporté Al-Ahram, citant la conférence de presse.
« Nous resterons en contact. Et je suis convaincu que cela sera dans l’intérêt de l’amitié entre les deux pays« , a déclaré M. Lavrov.
En résumé : La Russie a accepté le rôle d’intermédiaire de Shourkry dans les négociations mais souhaite une meilleure offre de la part de Washington.
Nous verrons ce qu’il en ressortira.
Les États-Unis savent que l’armée ukrainienne n’est pas en mesure de tenir la ligne de défense actuelle à l’est du pays. Ils craignent que cette dernière ne s’enfuie lorsque la ligne sera percée.
L’Ukraine a déjà retiré plusieurs brigades de la ligne Bakhmut/Artyomovsk pour boucher les trous dans d’autres lignes de défense (Ugledar, Kremmina). Le 17 janvier, en utilisant la carte de déploiement de Military Land, j’avais compté 27 équivalents de brigades ukrainiennes dans cette zone. La carte ne montre plus que 18 équivalents-brigades ukrainiennes sur la ligne Soledar-Bakhmut.
17 janvier – 27 équivalents-brigades ukrainiennes
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3 février – 18 équivalents-brigades ukrainiennes
L’Ukraine va bientôt abandonner la ville.
Le nombre de morts ukrainiens dans la ville doit être extrêmement élevé :
[Mykola] Bielieskov, [chargé de recherche à l’Institut national ukrainien d’études stratégiques,] Bielieskov a déclaré que l’Ukraine compense son manque d’équipement lourd par des personnes prêtes à tenir jusqu’au bout.
« Légèrement armés, sans soutien d’artillerie suffisant, qu’on ne peut pas toujours leur fournir, ils se tiennent debout et repoussent les attaques aussi longtemps que possible« , a-t-il déclaré.
Le résultat est que la bataille aurait entraîné d’horribles pertes de troupes tant pour l’Ukraine que pour la Russie. On ne sait pas exactement à quel point : Aucune des deux parties ne le dit.
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Le long de la ligne de front du côté ukrainien, des unités médicales d’urgence fournissent des soins urgents aux blessés du champ de bataille. De 50 à 170 soldats ukrainiens blessés passent chaque jour par un seul des nombreux points de stabilisation le long de la ligne de front de Donetsk, selon Tetiana Ivanchenko, qui s’est portée volontaire dans l’est de l’Ukraine depuis qu’un conflit séparatiste soutenu par la Russie y a débuté en 2014.
La Russie a augmenté l’intensité des combats :
Les barrages d’artillerie russes sont passés d’une moyenne d’environ 60 par jour il y a quatre semaines à plus de 90 par jour la semaine dernière. En une seule journée, 111 sites ukrainiens ont été visés.
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Mardi, les forces russes ont frappé 197 fois les positions ukrainiennes à Bakhmut avec de l’artillerie à courte portée, et les deux parties se sont affrontées quelque 42 fois, a déclaré l’armée ukrainienne, soit beaucoup plus qu’il y a un mois. Les forces ukrainiennes ont repoussé les soldats russes, attaquant leurs lignes à maintes reprises, selon l’armée.
Ce qui précède confirme les chiffres d’engagement d’artillerie donnés dans les rapports quotidiens du ministère russe de la Défense. Il confirme également que la Russie ne manque pas de munitions d’artillerie.
Mais malgré cela, le New York Times avance à nouveau des affirmations peu crédibles sur le nombre élevé de victimes russes :
Le nombre de soldats russes tués et blessés en Ukraine approche les 200.000, un symbole frappant de l’échec de l’invasion du président Vladimir V. Poutine, selon des responsables américains et occidentaux.
Bien que les responsables avertissent que les pertes sont notoirement difficiles à estimer, en particulier parce que Moscou sous-estime régulièrement le nombre de ses morts et blessés de guerre, ils affirment que le massacre des combats dans et autour de la ville de Bakhmut et de la ville de Soledar, dans l’est de l’Ukraine, a fait grimper un bilan déjà lourd.
Moscou cherchant désespérément à remporter une victoire majeure sur le champ de bataille et considérant Bakhmut comme la clé pour s’emparer de toute la région orientale du Donbass, l’armée russe a envoyé des recrues mal entraînées et d’anciens détenus sur les lignes de front, directement sur le trajet des bombardements et des mitrailleuses ukrainiennes. Le résultat, selon les responsables américains, est que des centaines de soldats sont tués ou blessés chaque jour.
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Les chiffres des pertes de l’Ukraine sont également difficiles à établir, étant donné la réticence de Kiev à divulguer ses propres pertes en temps de guerre. Mais à Bakhmut, des centaines de troupes ukrainiennes sont également blessées et tuées, tous les jours, selon des responsables. Les formations d’infanterie mieux entraînées sont gardées en réserve pour les protéger, tandis que les troupes moins préparées, comme celles des unités de défense territoriale, sont maintenues en première ligne et supportent le poids des bombardements.
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Le 22 janvier, à la télévision norvégienne, le général Eirik Kristoffersen, chef de la défense norvégienne, a déclaré que, selon les estimations, la Russie avait subi 180.000 morts et blessés, tandis que l’Ukraine comptait 100.000 morts ou blessés au combat, ainsi que 30.000 morts civils.
Je trouve ces allégations de pertes russes élevées risibles, car nous savons que l’artillerie russe tire plusieurs fois plus d’obus par jour que l’armée ukrainienne ne peut en fournir. L’artillerie est le grand tueur dans cette guerre.
Des « experts » amateurs affirment souvent que le défenseur a l’avantage dans la guerre urbaine et qu’il a moins de pertes que l’attaquant. Ces deux affirmations sont tout simplement fausses :
L’idée que le terrain urbain favorise le défenseur, une affirmation courante chez les exceptionnalistes urbains d’aujourd’hui, est incorrecte. Dans les années 1980, la Defence Evaluation and Research Agency (DERA) du Royaume-Uni a montré que le terrain urbain n’est pas le paradis des défenseurs. Le contraire est plutôt vrai. Les attaquants gagnent presque toujours et, dans presque tous les cas pour lesquels des données détaillées sont disponibles, les défenseurs subissent des pertes élevées.
Notamment, le facteur décisif dans les opérations urbaines est un bon entraînement et des feux d’appui de véhicules blindés. En comparant l’analyse historique avec les essais de la Brigade de Berlin, d’autres recherches ont confirmé que les opérations urbaines se terminaient généralement, mais pas toujours, mal pour le défenseur, pour des raisons très faciles à comprendre. Les défenses urbaines habiles sont rares et nécessitent des contre-attaques planifiées à l’avance et soutenues par des blindés. Les travaux de Christopher Lawrence, qui a confirmé les conclusions de la DERA, ont apporté d’autres preuves.
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Même une analyse superficielle des données communément disponibles tend à confirmer ce qui précède. Par exemple, la bataille de Marawi a donné lieu à 150 jours de combats au cours desquels les défenseurs ont subi des pertes catastrophiques, avec un taux de pertes en vies humaines de 6,52 par jour, contre 1,12 pour l’attaquant. Fallujah 2004 a été combattu pendant 50 jours et a vu l’attaquant américain subir 112 KIA à un taux de 2,24 par jour tandis que le défenseur a subi un taux de perte estimé à 40 KIA par jour. L’opération Bordure protectrice en 2014 a connu 49 jours de combat, et les FDI ont perdu 67 KIA, donc un taux de pertes supérieur à celui de Marawi à 1,3 KIA par jour, mais seulement très marginalement.
La lutte pour Bakhmut est beaucoup plus intense que les batailles mentionnées ci-dessus.
Les forces russes attaquent des conglomérats urbains tout en ayant une supériorité absolue en matière d’artillerie et beaucoup de munitions et de blindages. L’armée ukrainienne défend les villes principalement avec des brigades territoriales pédestres, peu entraînées, tout en gardant ses unités régulières mieux entraînées et équipées en renfort. Il y a également un manque cruel de soutien blindé du côté ukrainien.
Mais l’histoire et la science militaires nous apprennent que le défenseur subit généralement plusieurs fois plus de pertes que l’attaquant. Nous savons également qu’un bon entraînement et un soutien blindé sont essentiels pour la défense. Les forces ukrainiennes à Bakhmut n’ont ni l’un ni l’autre.
Il y a dix jours, le très bien informé colonel (retraité) Doug Macgregor a chiffré (vidéo) le nombre de morts du côté ukrainien à 122.000, plus 35.000 manquant au combat (présumés morts). Le nombre de Russes morts (y compris les forces Wagner et la milice du Donbass) est de 16.000 à 25.000, avec 20 à 40.000 blessés supplémentaires. Les chiffres ont depuis augmenté, les Ukrainiens étant plusieurs fois plus nombreux que les Russes.
Malgré cela, nous devrions croire que la Russie perd beaucoup plus d’hommes que l’Ukraine ? Pourquoi être aussi stupide ?
Moon of Alabama
Traduit par Wayan, relu par Hervé, pour le Saker Francophone.
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