20 décembre 2022

Sur le mythe de l’Holodomor

 

Dans les campagnes, la collectivisation mobilise les paysans pauvres affamés de terre, mais elle se heurte à la résistance farouche des paysans plus aisés. À la crise de la NEP rendue criante par le drame de la collecte des céréales, le pouvoir répond en rallumant la lutte de classes à la campagne. Nom donné à la politique visant à briser la résistance des paysans riches, la « dékoulakisation » est brutale. Imposée de façon quasi militaire pour garantir l’approvisionnement des villes, la collectivisation déstabilise un monde rural traversé de contradictions.

De 1931 à 1933, la situation alimentaire se dégrade. Provoquée par des conditions climatiques désastreuses, la famine dévaste l’Ukraine, le Kazakhstan et le Sud de la Russie. Comme les réquisitions de céréales et les déportations de koulaks en sont partiellement responsables, l’historiographie dominante attribue cette catastrophe à la volonté perverse du régime stalinien. Décidé à punir les paysans récalcitrants, il serait seul responsable de la pénurie de grains.

Mais cette narration entièrement à charge est fortement nuancée par les travaux historiographiques les plus sérieux. Pour l’historien américain Mark Tauger, « le régime porte la responsabilité partielle de la crise et des cinq millions de décès environ qui en ont résulté ».

Mais son action semble « clairement avoir été orientée vers la gestion d’une crise économique involontaire et d’une famine, plutôt que vers la création intentionnelle d’une telle crise afin de punir un groupe particulier ».

Qu’elle n’ait pas seulement frappé l’Ukraine, au demeurant, invalide la thèse selon laquelle Staline voulait punir les Ukrainiens en les faisant mourir de faim. Le mythe de l’Holodomor, du nom de l’holocauste délibéré qu’auraient subi les Ukrainiens de la part du pouvoir soviétique, ne résiste pas une seconde à l’examen des faits.

L’interprétation dominante des événements néglige aussi « le rôle du blocus occidental infligé à l’URSS dans le déclenchement de la famine qui a décimé les paysans ukrainiens », souligne Guy Mettan.

« Ce boycott n’est jamais pris en compte dans la décision de Staline de proclamer le socialisme dans un seul pays et de radicaliser la révolution afin d’en assurer la survie, plutôt que de tenter des accommodements en maintenant la NEP et en pariant sur les échanges avec les pays occidentaux ».

Bruno Guigue, « Communisme », Editions Delga, 2022, p. 236-237.

Source

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Remarque : Seul un membre de ce blog est autorisé à enregistrer un commentaire.