"Ne sous estimez jamais un empire blessé et putrescent, qui s’effondre sous vos yeux."
Les fonctionnaires impériaux, poutant dotés de compétences
diplomatiques, continuent d’affirmer effrontément que leur contrôle
exceptionnaliste sur le monde n'est pas négociable !
Si ce c’était le cas, des compétiteurs pourraient jaillir pour leur voler les feux de la rampe, actuellement monopolisés par l’oligarchie US. L'anathème absolu.
Le modus operandi de l’Empire, contre ses compétiteurs géopolitiques et géo-économiques, demeure toujours le même : pluie de sanctions, embargos, blocus économiques, protectionnisme, dénonciation culturelle, exacerbation militaire chez les nations avoisinantes et bombardement massif de menaces. Mais par dessus tout, une rhétorique belliciste, portée à son paroxysme.
L’hégémon peut se montrer « discret », tout au moins dans son domaine, parce qu’il contrôle encore un réseau massif d’institutions, de corps financiers, les politiciens, les capitaines d’industrie, les agences de propagande et l’industrie de la pop culture. D’où cette insolence assaisonnée d’invulnérabilité supposée.
Panique au « jardin »
La destruction des gazoducs Nord Stream (NS) et Nord Stream 2 (NS2), dont tout le monde sait qui étaient les commanditaires, sans que le suspect ne puisse être désigné, a fait avancer le projet de suppression de l’énergie russe à bas coût et de destruction de l’économie allemande.
Du point de vue impérial, l'objectif idéal serait l’avènement d’un intermarium contrôlé par les US, de la Baltique et de l’Adriatique jusqu’à la Mer Noire, dirigé par la Pologne, qui exercerait son hégémonie sur l’Europe, suite à l’annonce de l’Initiative des Trois Mers.
Mais tel que cela s’annonce, ce but restera un vœux pieu.
Quant à l’investigation foireuse sur ce qui s'est réellement passé avec les NS1 et NS2, la Suède joue le rôle du nettoyeur, comme dans le dernier volet du thriller policier de Quentin Tarantino, Pulp Fiction.
C’est la raison pour laquelle les résultats de cette « enquête » ne seront partagés avec la Russie que quand le Nettoyeur aura effacé toutes les preuves gênantes.
Les Allemands ont accepté ainsi de se faire rouler. Berlin a brièvement crié au sabotage, mais n’a pas osé désigner le coupable.
Tout devient sinistre, car la Suède, le Danemark, l’Allemagne et toute l’Europe savent très bien que s’ils confrontent l’Empire publiquement, l’Empire contre-attaquera en provoquant une guerre sur le sol Européen. Il est question de peur, et visiblement ce n’est pas la peur de la Russie.
L’Empire ne peut tout simplement pas se permettre de perdre son «jardin». Et les élites du «jardin», ayant un QI à peine supérieur à la température de la pièce, savent toutes qu’elles ont affaire à une entité psychotique tueuse, qui ne peut simplement plus être apaisée.
Pendant ce temps, l’arrivée du Général Hiver en Europe augure une descente socio-économique dans un maelstrom de ténèbres, inimaginables il y a quelques mois encore dans le supposé jardin de la démocratie, qui parait encore si éloigné des grondements du tonnerre qui approche.
Bientôt, la barbarie s'invitera dans la maison. Et pour cela, les Européens devront remercier « l’allié » américain pour avoir manipulé les élites de l’UE, terrifiées et vassalisées.
Bien plus dangereux pourtant est un spectre que peu de gens identifient : la syrianisation imminente de l’Europe, provoquée par la débâcle de l’OTAN en Ukraine.
Du point de vue impérial, les perspectives sur le champ de bataille ukrainien sont pour le moins désastreuses. L’Opération Militaire Spéciale (OMS) s’est métamorphosée en une Opération de Contre-terrorisme (OCT) : Moscou qualifie désormais Kiev de régime terroriste. Le cadran de la douleur augmente de façon incrémentielle, par frappes chirurgicales successives contre les infrastructures électriques de Kiev, au point d’en mutiler complètement l’économie et l’armée. Et à partir de Décembre, il faudra compter sur l’arrivée au front et sur les lignes arrières d’une partie d'un contingent russe, entraîné et motivé.
La seule question concerne donc le calendrier. Moscou est désormais en train de décapiter doucement mais sûrement le proxy Kievien, et de fracasser l’unité de l’OTAN.
L’opération de torture méthodique de l’Europe est implacable. Et le monde réel, en dehors de l’Occident Collectif, est avec la Russie, de l’Afrique et de l’Amérique Latine à l’Asie de l’Ouest, et même certaines zones de l’UE.
C’est Moscou et non Pékin, qui déchiquette l’hégémon estampillé « Ordre international fondé sur le droit», soutenu qu’il est par ses immenses ressources naturelles, ses dotations en nourriture et une sécurité solide.
Et en coordination avec la Chine, l’Iran, et tous les participants eurasiens, la Russie travaille finalement à défaire toutes les organisations internationales contrôlées par les US, à mesure que le Sud Global s’immunise contre la propagation des opérations de guerre psychologique de l’OTAN.
La Syrianisation de l’Europe
Sur le champ de bataille ukrainien, la croisade de l’OTAN contre la Russie est vouée à l’échec, même si jusqu’à 80% des forces en présence dans les infrastructures militaires clés sont des personnels de l’OTAN. Les Wunderwaffen, tels que les HIMARS, sont rares. Et selon les résultats de l’élection des mid-terms aux USA, la fourniture d’armes pourrait bien s’assécher en 2023.
L’Ukraine, dès le printemps 2023, sera probablement réduite à un trou noir croupion en phase de paupérisation accélérée. Le plan A de l’Empire reste l’Afghanisation : diriger une armée de mercenaires capable de déstabilisations ciblées et/ou d’incursions terroristes dans la Fédération de Russie.
Parallèlement, l’Europe est truffée de bases militaires américaines. Toutes ces bases pourront jouer un rôle majeur de camp de terreur, exactement comme en Syrie avec le Al-Tanf à l’Est de l’Euphrate. Les US y ont perdu la longue guerre par proxy contre la Syrie, où ils ont instrumentalisé les jihadistes.
Lors du processus de syrianisation de l’Europe, les bases militaires US pourront idéalement devenir des centres pour entraîner des escadrons d’immigrés d’Europe de l’Est, dont la seule opportunité professionnelle, à part le trafic de drogue et d’organes, sera de devenir des mercenaires impériaux, prêts à se battre contre n’importe quel épicentre de désobéissance civile à travers une Europe paupérisée.
Il va sans dire que cette Armée Nouveau Modèle sera officialisée par l’Eurocracie bruxelloise, devenue l’organe de Relations Publiques de l’OTAN.
Une UE désindustrialisée, empêtrée dans plusieurs strates de guerres internes toxiques, où l’OTAN jouera son rôle de Robocop, est un parfait scénario à la Mad Max, juxtaposé à ce qui serait, du moins dans les rêveries des straussiens/néo-cons américains, un archipel de prospérité : l’économie US, devenue la destination idéale du Capital Globalisé, incluant le capital de l’Europe.
L’Empire perdra son jouet, l’Ukraine, mais n’acceptera jamais de perdre son « jardin » européen.
Pepe Escobar
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