18 octobre 2022

Le Docteur Edouard Broussalian et l’homéopathie

La réalisation de la présente page provient du besoin de plus en plus pressant de se présenter au public, de sorte qu’à un moment donné Edouard Broussalian a dû surmonter sa répugnance à parler de lui pour nous rédiger ce petit texte.

Quel âge avez vous ? La plupart des gens qui vous rencontrent s’attendent à trouver un homme âgé ?

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Kent, le maître de Eugène Austin, avec qui Pierre Schmidt apprendra l’homéopathie et rapportera le Répertoire en Europe

Ahaha; C’est exact ! Le malentendu provient du fait que j’ai commencé très jeune à étudier l’homéopathie, alors je tiens forcément un langage qui pourrait provenir de la bouche d’une personne très âgée. C’est un problème de décalage temporel.

Je suis né en 1962, et j’ai commencé à apprendre l’homéopathie vers 15 ans en suivant mon père dans les conférences qu’il donnait à l’époque, sous l’égide notamment de la SMB (Société Médicale de Biothérapie) du regretté Docteur Max Tétau.

C’est donc pour cela qu’on dit que vous êtes tombé dans la marmite étant petit ?

Oui. En fait mes premières amours me prédisposaient à la physique quantique, surtout l’astrophysique. J’avais poussé au désespoir mon professeur de physique chimie en troisième car j’avais déjà épuisé le programme de terminale. Mais finalement la médecine m’a semblé plus intéressante, car elle permettait directement de voir le résultat de nos actions et je voyais les personnes soignées par mon père tellement radieuses.

Il est vrai que je proviens d’une famille d’intellectuels et je n’ai pas échappé à mon hérédité. Mon arrière grand-mère avait des dons de guérisseuse, mon grand père se destinait à la carrière de juriste s’il n’y avait eu le génocide de 1915 pour l’en empêcher et se retrouver garagiste, mon père a fait de brillantes études de médecine en tant que boursier national. Très vite placé devant les échecs de la médecine classique, il a eu le courage de demander à l’un de ses confères acupuncteurs comment cela se faisait qu’il parvenait à guérir ses malades. Finalement il a abouti chez Pierre Schmidt pour y apprendre l’homéopathie.

Pierre Schmidt s’était rendu à New York en 1922, soit six ans après la mort de Kent. Là il a tout appris chez Eugene Austin, un immense homéopathe à la carrure de géant Indien (nous publierons bientôt sa photo), et Federika Gladwin, qui sont deux brillants élèves de Kent.

Une fois rentré en Europe, il a apporté avec lui le Répertoire de Kent, et il va initier le mouvement qui changera peu à peu le visage de l’homéopathie.



Le Dr. Pierre Schmidt, qui a enseigné l’homéopathie à mon père, le Dr; Georges Broussalian.

J’ai donc pu puiser l’homéopathie presque en droite ligne depuis Kent, ce qui m’a épargné d’avoir à changer de paradigme comme c’est le cas de la plupart de ceux qui osent se lancer dans l’étude de l’homéopathie.

Là je peux connecter avec mes souvenirs enfant qui sont restés très vifs de la période de Pierre Schmidt, les années 1970. La réalisation de la traduction paternelle du Répertoire de Kent ne m’a pas laissé de traces, j’étais trop petit en 1966. J’ai lu ensuite la correspondance avec Pierre Schmidt qui ne connaissait pas le sens de bon nombre de rubriques difficiles. Mais toutes ces années m’ont marqué comme j’assistais à la réalisation des fameuses fiches perforées, ancêtres de l’informatique. A l’époque, mon père avait des patients amis au Lycée Louise Michel, seul établissement doté d’une machine IBM capable de perforer des tas de fiches en un temps raisonnable. Mon père a ainsi réalisé à partir d’une sélection de rubriques du Répertoire un outil pratique pour l’époque, qui permettait simplement en empilant des cartes de trouver les médicaments en commun sous la forme des trous restants. Boger notamment avait réalisé un tel système, mais c’était la première fois qu’on pouvait industrialiser le procédé. Toute la famille était impliquée dans le projet, et je me souviens des dimanches passés à tourner en rond autour de la grande table du salon pour trier les fiches !

Bref, j’ai baigné dans l’homéopathie toutes ces années, avec un père toujours au travail que ce soit dans une pratique médicale surchargée que dans ses travaux d’homéopathie, et une mère attentionnée et qui se dévouait pour tout le monde, ce qui permettait la réalisation de ce “work-aholisme” comme on dirait de nos jours.

Ma femme me pousse à admettre que je souffre du même syndrome mais que voulez vous faire? Notre temps ici est si court si on le mesure à l’ampleur de la tâche à accomplir. Du moins je pourrais dire que j’ai essayé de faire tout ce que je pouvais avec les moyens limités qui sont les miens…



Georges et Madeleine Broussalian


Racontez-nous vos études de médecine ?

Hé bien c’est très simple. J’ai vécu avec les Conférences de Kent, les livres de la Bibliothèque Verte, et des tas de livres d’astronomie et de physique, ce qui semble complètement dingue avec le recul. A cette époque j’étais encore à des années lumière de me douter de la tragédie que représente la médecine classique. Je me suis décidé à entrer à la faculté de médecine, uniquement parce que c’était un sacrifice nécessaire pour apprendre la médecine et pour pouvoir m’installer comme homéopathe.

Ce n’est que bien plus tard, au contact du défilé permanent de souffrances humaines non seulement insolubles mais aggravées par le système de soins que s’est développée mon indignation, mon écœurement, ma révolte et mon désespoir.

Dans ces années d’insouciance, je me suis fritté en permanence avec mes enseignants et toujours tenté de stimuler l’esprit critique de mes compagnons d’infortune. En seconde année, je pouvais discourir de façon enflammée sur l’Organon, l’homéopathie et l’absurdité de nous faire avaler autant de choses arbitraires. Dès l’externat, je commençais à soigner à peu près toutes les équipes infirmières, puis des membres de leurs familles, etc. Il y avait ainsi une sorte de petite mafia homéopathique obligée de rester discrète et qui rigolait bien des résultats cliniques insoupçonnés des autorités.

J’ai connu heureusement des grands patrons vraiment intéressés par l’homéopathie, comme le Professeur Guidicelli, en chirurgie vasculaire. Je garde un merveilleux souvenir de son service, ainsi que de Jean Luc Magne, devenu maintenant professeur. C’est avec les chirurgiens, toujours pragmatiques et souvent cultivés que je me suis entendu le mieux. Je vous passe l’impact des jolies petites guérisons que je pouvais produire à cette époque, avec le bol du débutant. J’en ai les cheveux qui se dressent sur la tête maintenant que je mesure ma presque absolue ignorance de l’époque. Mais comme le dit Annick de Souzenelle, il faut se lancer avec seulement la volonté et sans attendre d’avoir les forces de le faire. Et elle a tout à fait raison.



Le Dr. Grandgeorge et Edouard Broussalian.

Ces années d’études m’ont permis de continuer d’apprendre l’homéopathie sur un plan purement intellectuel tandis que je m’inculquais la modestie devant la souffrance des gens qu’on ne pouvait apaiser, devant les morts innombrables en médecine infectieuse lors du début de l’épidémie de sida. C’est je pense, le seul intérêt de ces études. Ceux qui en sortent avec des convictions sont probablement des ânes insensibles. Après ma thèse sur l’apport de l’informatique dans l’homéopathie, avec Didier Grandgeorge dans le jury, je me suis installé en 1989 à Annecy. Puis à Genève en 2004.

Pouvez vous nous citer vos travaux?
 


Le Dr. Farokh Master chez Edouard Broussalian en 2006 lors d’un séminaire privé.

Je ne suis pas certain d’avoir une liste exhaustive, on va évoquer le principal. J’ai créé dès 1977 le programme Mélanie, sur les tout premiers Apple II. L’informatique me semblait être le prince charmant capable de réveiller l’homéopathie endormie. J’y dénonçais déjà les excès dont il faut se méfier, à savoir entrer plein de rubriques dans une machine pour lui demander d’être intelligente à votre place. Mes étudiants apprennent à raisonner à partir d’une ou deux rubriques clés et le rôle de l’ordinateur consiste à trouver facilement la rubrique souhaitée tout en évoquant d’autres nuances possibles, c’est ce à quoi excelle le PcKent réalisé par mon vieil ami Nicolas Massonnat.

Toujours dans le domaine de l’informatique, j’ai réalisé très tôt qu’Internet représentait une planche de salut pour la démocratie en général et l’homéopathie en particulier. J’ai démarré Planète Homéo seul en 1996 puis vers 1998 avec le soutien de mes étudiants qui se sont mobilisés pour me permettre de continuer. C’est devenu sans conteste le site de l’homéopathie vivante et militante. On ne compte plus le nombre de praticiens qui ont vu basculer leur pratique en nous lisant. Au rythme où vont les choses, nous serons bientôt considérés comme un foyer séditieux et c’est tant mieux !

Évidemment il faut parler de la traduction complète du Répertoire de Kent, parue en 1991 et qui fait référence. Ici encore, je ne me suis pas inséré dans le mouvement dominant qui a été de faire des ajouts de tout et de n’importe quoi, souvent sans même avoir étudié le répertoire, sa structure et la pensée de son auteur. Même si le fondement théorique de l’homéopathie repose sur la notion de totalité, la pratique repose sur ce qui est rare et caractéristique dans le choix du médicament. C’est pareil pour un livre, prétendre à la complétude est un leurre dangereux qui pousse à ajouter sans discriminer, et amène à la dilution de l’information pertinente. Des livres aujourd’hui se prétendant 10 fois plus gros que celui de Kent n’ont pas permis d’obtenir des résultats 10 fois meilleurs, loin de là. La 5ème édition va paraître sous peu et nous montrera la pertinence d’une nouvelle valorisation, générale celle là, par opposition à la fameuse valorisation relative.



Le Dr Jean-Claude Ravalard et le Dr. Corinne Bendayan. Parmi mes plus chers amis.

Je ne peux pas citer tous les articles parus dans diverses revues, notamment les cahiers de biothérapie. Je mentionne simplement les traductions de plusieurs volumes de l’Encyclopédie de Hering, des Synoptic I et II de Frans Vermeulen avec mon cher complice et ami le Dr. Jean-Claude Ravalard. Sans oublier bien sûr les Niveaux de Santé de George Vithoulkas, qui a été un sacré chantier partagé avec Jean-Claude.

Il me faut parler ici de mon cher ami le Dr. Frédéric Rérolle, président de Homéopathes Sans Frontière France et qui fait un boulot fantastique avec Isabelle Rossi, qui dirige l’APMH et tant d’autres merveilleux projets comme Skoura au Maroc. Nous avons tous deux roulé notre bosse dans pas mal de pays, jusqu’en Haïti. C’est dans ce pays que j’ai rencontré le très regretté Kaviraj avec qui nous avons soigné les gens dans la rue juste après le tremblement de terre. Une grande amitié est née d’avoir partagé tout cela sur le terrain. Son décès l’année passée a été un coup terrible.



Le Dr. Frédéric Rérolle, un autre proche.

En 2011 j’ai pu retourner en Haïti grâce à l’aide extraordinaire des Drs. Jean Marie Caïdor et Thomas Hans-Muller, affectueusement surnommé “Boule”. Leur accueil chaleureux reste toujours présent à ma mémoire. Là bas j’ai pu montrer à tout le monde les résultats de l’homéopathie sur le choléra, avec tous les patients remis sur pieds en une demi journée. C’était absolument fantastique.

Vous voyagez donc beaucoup?

Disons que j’essaye de partager le plus possible de mes connaissances et d’apprendre au contact des autres. Depuis que j’ai lancé mon enseignement par Internet, je ne peux plus voyager autant que je le désirerais. Il ne m’est plus possible d’intervenir comme je le faisais, un peu partout en Europe, une fois ici dans telle école, ou là dans tel pays. Mes amis de Madagascar me manquent beaucoup, ils sont tous devenus d’excellents homéopathes. J’ai gardé une présence active en Turquie où j’anime des séminaires, entouré d’enthousiastes étudiants et amis.

Vous fréquentez du monde dans le milieu homéopathique? Quelles sont vos connections?

Là encore, pas autant que je le voudrais, faute de temps. Je me suis rendu jusqu’aux sources du Gange pour y rencontrer David Little avec qui on a tellement échangé durant 10 ans. C’est probablement le plus grand homéopathe sur terre. Un homme incroyable, que tous regardent avec respect. Je suis allé aussi à Mumbay pour me former avec mon vieil ami le Dr. Farokh Master, qui mérite si bien son nom ! Il est sans doute l’un des plus grands homéopathes indiens. Avec lui j’ai énormément appris et commencé à maîtriser la notion de miasmes chroniques. C’est toujours la fête de nous revoir au moins une fois par an !



George Vithoulkas et Edouard Broussalian

C’est aussi une fois l’an je me rends sur la magnifique île d’Alonissos pour mêler détente et études de cas avec George Vithoulkas. Surnommé avec raison le “King” de l’homéopathie, son Académie a permis la naissance de nombreux talents et il y a toujours beaucoup à apprendre en allant l’écouter. George aime à rappeler que c’est “à cause de moi” que les français commencent à se rendre en nombre là bas. Au contact de gens provenant de tous les pays du monde, on réalise avec horreur la réputation qui est la notre quand on parle de l’homéopathie française…

J’entretiens aussi d’excellents rapports avec Luc de Schepper que j’admire beaucoup et qui est sans le moindre doute un des meilleurs praticiens actuels. Il est l’un de ceux qui a le plus maîtrisé l’Organon, avec à la clé une magnifique réussite clinique et d’enseignant. Une perle !

Il faut compléter ce petit tour d’horizon avec mon ami le Dr. Didier Grandgeorge, que j’ai rencontré la première fois quand j’avais à peine 18 ans en lui faisant visiter mes petites installations astronomiques, et dont l’école de Fréjus porte haut nos couleurs. Dès que je le peux je me rends chez lui pour un bon petit séminaire !

Le moins qu’on puisse dire est que vous avez un style direct qui vous caractérise ? Vos étudiants disent que vous avez une façon unique d’enseigner ?

 Oui, c’est clair. Je garde mes habitudes militantes qui m’ont permis de survivre durant mes années de Faculté. D’un autre côté la vie est tellement courte, l’art si long à maîtriser alors pourquoi faire semblant ? Les mœurs nous inclinent au conformisme, mais le conformisme en soi n’est certainement pas moral, et quand le conformisme s’aligne sur une corruption ambiante, il devient parfaitement immoral. J’adore cette déclaration d’un maître en philosophie qu’est Serge Carfantan, et qui définit clairement ma pensée:

La révolte de l’intelligence ne commence que lorsque l’esprit rompt avec tous les schémas établis, pour examiner par lui-même ce qui est vrai. La réforme,  elle, maintient les schémas et cherche des aménagements.

S’il y a une catégorie de personnes que je ne supporte pas c’est bien ceux qui massacrent l’homéopathie et nous déshonorent tous les jours avec leur pratique abominable. Je garde une dent particulière contre les Scholten et autres Sankaran qui ont fait miroiter à des auditeurs souvent très peu formés à l’homéopathie, des systèmes plus ou moins délirants leur promettant d’atteindre un hypothétique Saint Graal. C’est justement à partir de cette réflexion, sur les proies des “faiseurs de systèmes” que j’ai conclu qu’une formation solide passait obligatoirement par la maîtrise de l’Organon. J’en ai aujourd’hui la gratifiante démonstration, avec des élèves aussi brillants et porte-paroles de l’homéopathie véritable.



Séminaire Edouard Broussalian à Istanbul en 2013

Vous aurez compris que je ne supporte pas l’injustice et je passe finalement beaucoup trop de temps à me battre contre tous les négationnistes. Négationnistes du génocide arménien qui voudraient nous faire croire que mes ancêtres sont tous partis en vacances en 1915 et qu’une nation entière se soit évaporée soudainement. Négationnistes de l’aliénation parentale qui voudraient nous faire croire que les enfants puissent haïr d’eux-mêmes l’un de leurs parents et décider de se séparer définitivement d’une moitié de leur lignée. Négationnistes de l’homéopathie qui voudraient nous faire taire pour le plus grand profit des laboratoires. Et j’en passe bien d’autres !

Je médite actuellement sur la question de savoir si l’industrie chimique peut être accusée de crime contre l’humanité. Il nous manque la volonté manifeste de tuer, mais j’aimerais bien savoir quel sera le jugement des générations futures. Comme le dit si bien Pierre Rabbi, la question n’est même plus “quelle planète laisserons nous à nos enfants” mais bien “quels enfants laisserons nous à notre planète?”

Je me considère en médecine comme un disciple de Samuel Hahnemann et dans la société comme un disciple d’Ivan Illich.

C’est très lourd à porter tout cela alors je m’empresse de le partager avec mes étudiants.

Vous avez quand même des raisons de vous réjouir ?

Bien sûr ! Grâce à l’influence de notre site, de plus en plus de praticiens utilisent la dose liquide, ce qui est déjà un grand progrès. La communauté homéopathique de Planète Homéo se développe exponentiellement, ce qui rend notre discours audible. Les cours attirent un nombre croissant d’auditeurs. Certains sont rebutés par la rigueur et le travail mais l’immense majorité persiste et je suis transporté de joie d’assister à l’éclosion d’autant de talents.

Tout cela n’est qu’un début !

Une petite vidéo exclusive, tournée en Haïti.

A la mémoire de Kaviraj


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