Il y a 3 ans, Rouen brulait.
L’usine Lubrizol était en feu.
La pollution terrible et les effets secondaires bien vite enterrés.
Nous sommes passés en réalité à côté d’un véritable massacre et de milliers de morts.
Comme souvent dans l’histoire, c’est l’action déterminée et courageuse d’une poignée d’hommes qui a permis d’éviter le pire.
Ils étaient 12.
« Les vrais héros, ce sont les salariés de Lubrizol qui ont sauvé la moitié de Rouen. » La phrase, d’une source ayant travaillé sur le dossier, est forte et en dit long sur le rôle crucial de cette douzaine d’hommes.
L’incendie sur le site de Lubrizol, il y a trois ans jour pour jour, a évidemment été une catastrophe. Mais elle aurait pu être bien pire et provoquer instantanément des milliers de morts. Voici comment les salariés de l’entreprise ont été, eux aussi, les héros de cette terrible nuit du 26 septembre 2019.
« Cette nuit-là, une douzaine d’hommes sont sur le site de Lubrizol et aptes à intervenir en cas d’incident. Alors que tous vaquent à leurs occupations, aucun ne se doute que la nuit va virer au cauchemar.
Vers 2h40, une alarme retentit, concernant le bâtiment A5, un entrepôt de stockage. Une équipe se trouve alors avec le chef de quart. Aussitôt, le chef prend les opérations en main. Les hommes s’équipent et se rendent directement sur le site A5.
Le feu est déjà très étendu alors que les pompiers et l’entreprise voisine, Triadis, appellent pour en avoir confirmation. Il faut réagir vite, ces salariés, premiers arrivés, mettent en place une lance à mousse. Dans le même temps, ils préviennent leurs collègues de l’ampleur du sinistre.
Les autres se trouvent en salle de contrôle. Aussitôt prévenus, ils s’équipent pour le feu et rejoignent le bâtiment A5. Les flammes sont déjà immenses, ont attaqué un stock de palettes en bois, des conteneurs IBC (en plastique, entourés d’une protection métallique) ont déjà fondu, occasionnant un déversement de produits ».
« L’un d’eux s’occupe d’essayer d’activer le rideau d’eau du A4 pour le protéger des flammes qui ravagent le bâtiment voisin, sans même savoir si la manœuvre fonctionne.
Avec ses acolytes, il tente aussi de protéger des bouteilles de gaz le long du bâtiment A5, puis ils mettent en place une lance pour protéger un bac contenant de l’alcool. Il faut aussi stopper la chaufferie d’un autre secteur.
Alors que les flammes sont de plus en plus monstrueuses et que le nuage de fumée prend de l’ampleur, il reste à mettre à l’abri un produit hautement dangereux : le pentasulfure de phosphore.
« Pire que l’explosion, c’est le gaz créé par la combustion du pentasulfure de phosphore, plus lourd que l’air, qui aurait stagné à près d’un mètre » qui aurait pu créer une catastrophe bien pire encore, explique notre source bien informée.
Des milliers de personnes seraient mortes. C’est avéré. Ça aurait généré un gaz mortel. Si les salariés n’étaient pas intervenus, c’était un petit World Trade Center.
Une cinquantaine de fûts de ce produit ultra dangereux, soit une centaine de tonnes, sont déplacés par les salariés. Une opération qui prend une heure, une éternité dans l’urgence du moment. C’est sûrement cette opération qui sauve alors le plus de vies.
« Sans l’expertise et le courage de certains employés, on n’aurait pas pu sortir les cuves de pentasulfure de phosphore », assure Alexandre Cros, commandant des sapeurs-pompiers qui était présent dès le début du sinistre, avant d’épauler le préfet en salle de crise. « Sous protection incendie des sapeurs-pompiers, les salariés ont déplacé les fûts et on était là pour leur venir en aide en cas de souci. »
Des salariés récompensés pour leur courage
« Toute la nuit, les salariés se portent volontaires pour aider comme ils le peuvent. Notamment lorsqu’il faut vérifier le niveau du bac d’eau d’incendie, alimentée par l’eau de ville et qui s’épuise rapidement tant les réserves sont sollicitées pour lutter contre le feu.
Attachés les uns aux autres et à leur entreprise, ces salariés ont agi en professionnels méthodiques. Le préfet les a récompensés au nom de l’État en juillet 2021, ainsi que deux salariés de l’entreprise voisine de Boréalis.
« Ces salariés ont eu un comportement héroïque cette nuit-là, assure le préfet, Pierre-André Durand. Ceux qui ont déplacé certains produits dangereux ont pris de vrais risques. »
Discrets, modestes ou soucieux de l’enquête toujours en cours sur l’incendie ? Aucun de ces salariés que nous avons sollicités n’ont souhaité témoigner directement de leur action ».
Loin des ministères, loin des plateaux télé, loin des salons huppés ou l’on se congratule dans un entre-soi insupportable, 12 gus anonymes ont fait bien plus pour notre pays et sa population que bien des ministres.
Les nations sont toujours vendues par les riches et sauvées par les gueux.
Rien ne changera jamais.
Qu’ils soient remerciés pour leur courage, leur engagement, leur sens des responsabilités et leur humilité.
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