C’est pourquoi je trouve si intéressantes les myriades d’attaques contre un Joe Biden en grande partie désemparé. Y a-t-il un pivot de Davos en vue ou s’agit-il d’un autre signal que les forces souverainistes au sein de la structure du pouvoir américain prennent le dessus ?
Avec cette question à l’esprit, replaçons dans leur contexte les récents événements européens et ce qu’ils révèlent de l’histoire mondiale qui se déroule sous nos yeux.
La BCE a finalement relevé ses taux pour la première fois depuis 2011, portant le taux de référence des « prêts » à -0,1 %, car je suppose qu’il serait contraire aux « valeurs européennes » de contraindre les banques à payer pour emprunter l’argent volé aux épargnants.
Certains seraient choqués (CHOQUÉS, JE DIS !) que la BCE ait augmenté son taux de 50 points de base (0,5 %) aujourd’hui, mais étant donné les événements dramatiques qui se sont produits en Italie hier, comment auraient-ils pu faire autrement sans passer pour les midwits1 déconnectés qu’ils sont en fait ?
Ils viennent de perdre leur principal dirigeant en Italie et il semble que la droite populiste soit prête à prendre le pouvoir dans un pays clé de l’UE dans quelques mois, sans que la législation empoisonnée de Davos ne soit adoptée.
Cela vous rappelle quelque chose ? La même chose s’est produite aux États-Unis l’année dernière et nous risquons maintenant d’assister à une défaite historique des Démocrates lors des élections de mi-mandat en novembre.
C’est une perte réelle et sérieuse pour Davos, comme je l’ai souligné dans mon article de la semaine dernière sur la première tentative de démission de Draghi.
Mais en même temps que la BCE a augmenté les taux d’intérêt, elle a également annoncé un nouveau programme d’assouplissement quantitatif « sans limite » appelé Instrument de protection de la transmission, car, comme le souligne à juste titre Zerohedge, l’appeler « assouplissement quantitatif spécifique à l’Italie semble un peu gauche. » J’ajouterais que cela équivaudrait à dire la vérité, ce qui va également à l’encontre des valeurs européennes fondamentales.
La présidente de la BCE, Christine Lagarde, était en pleine possession de ses moyens lorsqu’elle a tenté d’exposer les grandes lignes de cette nouvelle expérience de politique monétaire, qui relève désormais clairement plus de « l’art que de la science » , pour citer Lagarde.
« Tout est sous contrôle » , tel a été le thème de tous les gros titres en provenance d’Europe cette semaine. Quel que soit le sujet, même de petites choses comme l’effondrement du gouvernement italien de Mario Draghi, soutenu par Davos, peuvent faire dérailler le projet européen.
Tout va bien, il suffit de garder le cap, d’être « guidé par les données » et de ne pas céder sur les valeurs fondamentales de l’Europe, qui, à ce stade, reviennent à faire confiance aux pyromanes pour commander les pompiers.
Pour vous donner une idée de la profondeur de cette idée de contrôle, en début de semaine, voici la déclaration du « ministre des affaires étrangères » de l’UE, Josep Borrell. L’Europe, a-t-il dit, doit maintenir la pression sur la Russie. Elle ne peut pas « se permettre de se lasser des sanctions » . Elle doit continuer à faire pression sur l’économie russe sur le long terme. Nous devons continuer à saturer de bombes le système financier russe, quel que soit le nombre de bombes qui atterrissent à Rome, Athènes ou Berlin plutôt qu’à Moscou.
L’objectif non avoué de ces sanctions est d’empêcher la Russie de disposer de technologies de pointe pour produire elle-même les armes dont elle aura besoin pour combattre l’OTAN, non pas le mois prochain, mais l’année prochaine ou en 2024.
Il s’agit d’un plan à long terme. Dans un épisode de RT’s Crosstalk que j’ai enregistré en début de semaine, l’animateur Peter Lavelle a évoqué les déclarations de l’administration Biden selon lesquelles il s’agit d’une guerre de 20 ans contre la Russie et/ou la Chine.
Le discours de Pompeo sur « Les 3 phares pivots » aboutissait à la même conclusion : une génération d’Américains va devoir mener une guerre sainte contre l’Est pour le contrôle de l’énergie mondiale. Dommage que personne ne veuille s’engager pour y participer, Mike.
Ils n’ont que le plan existant et ils ont été mis en place pour l’exécuter, même si d’autres le contrent efficacement. Biden suit également le même scénario, mais il partira bientôt car il n’est plus un messager crédible. Ensuite, on fera venir Kamala « Nous nous sommes rassemblés ici, parce que c’est ici que nous sommes rassemblés » Harris pour être l’abrutie en chef à la Maison Blanche.
Parce que, ils nous le rappellent constamment, ces Ricains grossiers ne peuvent pas être autorisés à diriger quoi que ce soit.
En gardant cela à l’esprit, regardez ce que l’UE a publié d’autre cette semaine :
A quand remonte la dernière fois que vous avez vu un ensemble d’indicateurs économiques parfaitement compatibles avec les attentes comme ça ? Sérieusement ? Il s’agirait de la première prévision d’une agence européenne qui soit exacte ?
De plus, si cela est vrai, pourquoi cette publication du CPI a-t-elle poussé la BCE à relever ses taux de 50 points de base au lieu de 25 ? Je veux dire qu’ils s’attendaient à cette publication du CPI, non ? Alors, n’aurait-elle pas dû communiquer 50 points de base depuis le début ?
Il y a la logique et puis il y a la BCE.
C’est juste un récit désespéré pour maintenir l’apparence que tout est sous contrôle, qu’ils maîtrisent la situation économique et qu’il n’y a aucune raison pour quiconque de paniquer.
Parce que la panique, ou les changements « non désirés et injustifiés » (selon les mots de Lagarde) dans les spreads de crédit inciteront à utiliser le TPI pour empêcher la banque centrale construite par Davos de faire faillite.
Pour l’UE, cependant, l’heure tourne vite. C’est le tour de la Fed la semaine prochaine et avec cette augmentation de 50 points de base, il faut presque s’attendre à 100 points de base de la part de Powell.
N’oubliez pas que les eurocrates comme Borrell et Lagarde n’ont pas de plan B (mais peut-être un plan R, malheureusement).
Revers de fortune
J’ai invoqué le Dr Strangelove ici pour une raison. Regardez à nouveau la structure du film et notez la myriade de « renversements » qu’il contient. C’est une merveille d’écriture de scénario. Il montre à quel point les humains sont intelligents lorsqu’ils s’acharnent à surmonter les obstacles pour accomplir une tâche, en faisant comme si le faux était vrai.
Il n’y a pas de meilleure métaphore que celle-là pour décrire l’état actuel des marchés financiers et de la guerre politique.
Je parle sans cesse des renversements de tendance dans l’analyse technique des marchés, mais c’est une idée qui est profondément ancrée dans la narration. La première clé pour écrire un bon scénario est de savoir que chaque scène doit avoir un « inversement de valeur » .
Un inversement de valeur peut être aussi simple qu’une personne frigorifiée qui trouve un chapeau, ou qu’une personne pauvre qui trouve une valise pleine d’argent.
La scène, aussi petite soit-elle, a une idée maîtresse. Cette idée maîtresse doit changer une valeur d’une manière ou d’une autre, sinon la scène n’a pas de but.
Les bons éditeurs les gardent. Les studios les remettent pour vendre des « Director’s Cuts » sur Blu-Ray.
L’UE, ce n’est que du Director’s Cuts de « cinéma français » injouable.
Les renversements sont importants, ils créent et relâchent la tension. Une bonne écriture construit constamment de petits renversements pour préparer le terrain pour des renversements plus importants (arcs de scène) qui ont un impact sur des renversements plus importants (actes) et ainsi de suite.
Les eurocrates et Davos ne croient pas aux revirements. Ils croient en l’inévitabilité et s’ils parviennent à « respecter le scénario » , quelle que soit la complication qui a annulé leur plan, ils peuvent encore atteindre la ligne d’arrivée et gagner.
C’est ce qui s’est passé lors de la réunion cruciale de la BCE cette semaine. Elle maintient le cap. L’objectif est une inflation de 2 %. Lagarde a abandonné toutes les prévisions et les discussions sur le caractère « transitoire » de l’inflation. Même si les circonstances se sont retournées contre eux et qu’ils l’ont finalement admis publiquement, ils n’abandonneront pas le discours général selon lequel tout va bien.
Les valeurs de l’Europe ne peuvent s’exprimer qu’à travers l’UE et donc tout ce qui peut sauver l’UE sauve les valeurs européennes. Peut-être que Kamala pourrait s’inspirer de cette histoire.
Remercions les dieux que nous, les grossiers Ricains, ayons laissé ces valeurs européennes derrière nous, uniquement pour qu’ils essaient constamment de nous les imposer à tout bout de champ.
Pour de nombreux investisseurs, la Fed a tenu sa réunion charnière le mois dernier lorsqu’elle a augmenté de 75 points de base, mais ce revirement de la politique de la Fed n’était que dans leur esprit. En fait, comme je le dis depuis plus d’un an maintenant, la réunion charnière de la Fed n’a pas eu lieu en juin dernier, mais en juin 2021, lorsque le « resserrement furtif » par le biais des paiements des reverse repo a commencé.
Cela a déclenché une série de complications pour la BCE et Davos, qui se sont accumulées comme celles jetées devant les personnes essayant d’arrêter l’Armageddon dans Dr Strangelove. La BCE réalise finalement qu’il n’y a rien d’autre à faire maintenant que d’accepter les ruines fumantes et de faire face à la réalité.
Maintenez la cible. Maintenez la CIBLE
Ce que nous voyons sur les marchés cette semaine, après que l’euro a brièvement cassé la parité avec le dollar américain, c’est le rebondissement prévisible qui survient après l’achèvement d’un arc scénique majeur. L’euro a atteint 1,03 dollar et n’est pas allé plus loin.
Mais ce n’est que cela, un rebondissement, un bref intermède comique pour relâcher la tension.
La performance de Lagarde a été l’aveu d’un « écart de crédit » désormais infranchissable. La dette de l’Italie se dirige vers l’oubli et la BCE vient de dire qu’elle dépensera chaque euro de l’épargne allemande pour éviter cela aussi longtemps que possible.
Donc, nous avons cette idée que la BCE est au dessus de tout. Mais, qu’en est-il de la guerre en Ukraine ? Qu’en est-il de l’avenir de l’UE ?
Le titre suivant est tout aussi surprenant, dans le contexte d’une UE qui se fracture et de l’emprise fragile de Mario Draghi sur le pouvoir en Italie : l’UE entame des négociations d’adhésion avec l’Albanie et la Macédoine du Nord.
Traduction : ne vous inquiétez pas, l’UE est en bonne santé et tout le monde veut en faire partie. Nous ne ferons que nous renforcer, pas nous affaiblir. Nous allons absorber toute l’Europe, revendiquer l’OTAN aux Américains, les forcer à combattre la Chine pendant que nous affamerons la Russie.
C’est bien.
Tout cela fait partie du scénario. Mais, de toute évidence, ce n’est pas ce qui se passe.
C’est ce qu’ils veulent que nous, Occidentaux, voyions ; les seules choses que nous ne sommes autorisés à trouver dans les recherches sur Internet. Pendant ce temps, les Russes vous disent ce que l’Europe fait réellement, à savoir lever les sanctions et essayer désespérément d’obtenir l’énergie et la nourriture dont elle a besoin pour garder une longueur d’avance sur les bourreaux à l’extérieur des parlements de tout le « monde civilisé » .
La vérité est que, pour la première fois depuis très longtemps, Davos ne prend pas les décisions pour l’ensemble de l’Occident. Le gouvernement italien est parti parce qu’on a dit aux populistes qu’ils avaient le soutien des États-Unis pour mettre fin au règne de la terreur de Draghi.
Liz Truss, titulaire d’un doctorat en géographie, a toutes les chances de devenir le prochain Premier ministre britannique afin de maintenir le contrôle américain sur la City de Londres et de garder le Royaume-Uni dans le jeu.
Le Canada a relevé ses taux de 1 % l’autre jour, ce qui a suscité des commentaires selon lesquels il devait suivre, voire dépasser, la Fed. Il est clair que les banques canadiennes en ont assez de Justin TrueDOH ! et de sa cinquième colonne ukrainienne, la poulette de Davos Chrystia Freeland.
Et la semaine prochaine, la Fed fera à nouveau monter les enchères pour Lagarde, peu importe ce qu’elle a dit aujourd’hui. Le TPI est un déchet inutilisable pour lequel les traders vont la précipiter dans l’oubli. Si elle veut savoir ce que ça fait, elle devrait peut-être parler avec Kuroda à la Banque du Japon plutôt qu’avec ses experts en données à Bruxelles.
Mon dernier point est celui que beaucoup de gens ne veulent PAS entendre, mais qu’ils devraient considérer très attentivement. Les commentateurs anti-américains ne comprennent pas ce qui se passe.
Ils ne peuvent pas se faire à l’idée qu’il y a des forces au sein de la hiérarchie américaine qui voient le piège impérial pour ce qu’il est et que si cela continue, ce sera la fin des États-Unis. Que la Fed est confrontée à une menace existentielle pour sa survie et qu’elle a beaucoup plus de marge de manœuvre qu’ils ne le pensent.
Peut-être, je dis bien peut-être, que les géants se battent et que nous, les fourmis, avons du mal à distinguer non seulement qui gagne, mais aussi quels sentiers nous devons éviter pour ne pas être piétinés.
À un moment donné, toute l’illusion s’effondrera. L’Europe est la vieille pute qui se prend encore pour une jeune fille sexy. La Fed est le type au bar qui préfère boire seul.
Il suffit de regarder l’image que Lagarde et Ursula Von der Leyen, présidente de la Commission européenne, projettent au monde pour voir exactement de quoi je parle. Remercions les dieux que Merkel ait quitté la scène.
Ces dames resteront fidèles au scénario tout en conduisant la bombe jusqu’à son point d’impact, en pensant qu’elles auront des partenaires de danse pendant tout ce temps.
Tom Luongo
Traduit par Zineb, relu par Wayan, pour le Saker Francophone
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