Elle accuse depuis 2017 le locataire de la Place Beauvau de viol, de harcèlement sexuel et d’abus de confiance, pour des faits qui se seraient produits à Paris en 2009.
Sophie Patterson-Spatz, la femme qui accuse Gérald Darmanin de viol depuis 2017, a fait appel mercredi 13 juillet de l’ordonnance de non-lieu rendue en faveur du ministre de l’Intérieur, signée vendredi par une juge d’instruction, en accord avec les réquisitions du parquet.
« Loin de tout acharnement ou d’une quelconque vengeance, Mme Patterson veut simplement obtenir enfin justice et conteste fermement le bien-fondé de cette ordonnance », écrit son avocate, Elodie Tuaillon-Hibon, dans un communiqué. « L’ordonnance reconnaît que Mme Patterson est sincère et sans malveillance. Cependant cette procédure a bien sûr souffert des nombreux écueils dont souffrent encore trop de plaintes pour viol en France de nos jours : préjugés sexistes, culture du viol ou emprise de la domination masculine », poursuit Me Tuaillon-Hibon.
« Elle a également souffert d’une instruction totalement à décharge en faveur d’un ministre de l’intérieur en exercice au moment de la procédure », ajoute le conseil, « la parole de madame n’a pas été suffisamment prise au sérieux, la plupart des éléments qu’elle a apportés non plus ». « Courageusement, elle reste debout, non seulement pour elle mais pour toutes les victimes, et elle encourage toutes les plaignant.es qui subissent cette forme particulière de déni de justice à unir leurs efforts pour faire changer les choses », conclut Me Tuaillon-Hibon.
Sentiment de devoir « passer à la casserole »
Sa cliente accuse, depuis 2017, le locataire de la Place Beauvau de viol, de harcèlement sexuel et d’abus de confiance, pour des faits qui se seraient produits à Paris en 2009 et qui auraient débuté au siège de l’UMP, ancêtre du parti Les Républicains. La plaignante s’était adressée à l’élu, alors chargé de mission au service des affaires juridiques du parti, pour obtenir un soutien alors qu’elle voulait faire réviser une condamnation de 2004 pour chantage et appels malveillants à l’égard d’un ex-compagnon.
Selon elle, M. Darmanin lui aurait fait miroiter au cours d’un dîner puis d’une soirée dans un club échangiste parisien son possible appui, via une lettre qu’il s’engageait à rédiger auprès de la chancellerie, en lui demandant en échange une relation sexuelle. Selon son récit devant les enquêteurs, Sophie Patterson-Spatz n’avait aucune envie de cette relation sexuelle, aurait « paniqué », mais se serait sentie contrainte de « passer à la casserole », n’ayant « pas le choix ».
Echange-clé du dossier, dans la nuit du 17 décembre 2009, plusieurs mois après les fais dénoncés, Mme Patterson-Spatz lui écrit ce SMS : « Abuser de sa position. Pour ma part, c’est être un sale con (…). Quand on sait l’effort qu’il m’a fallu pour baiser avec toi. Pour t’occuper de mon dossier. » Moins de deux heures après, celui-ci répond : « Tu as raison, je suis sans doute un sale con. Comment me faire pardonner ? »
Après avoir selon son récit « occulté les faits » pendant plusieurs années, Sophie Patterson-Spatz a « suffoqué » à l’annonce de l’arrivée de M. Darmanin au gouvernement d’Edouard Philippe, en juin 2017. Après avoir réanalysé cet épisode comme un viol, elle dépose alors plainte.
« Vie de jeune homme »
L’enquête est d’abord classée deux fois par le parquet. Une magistrate instructrice refuse d’enquêter, estimant ces investigations suffisantes. Après de longs démêlés procéduraux, une autre juge d’instruction est saisie à l’été 2020. Elle a placé M. Darmanin sous le statut de témoin assisté en décembre 2020 et confronté le ministre et la plaignante pendant neuf heures en mars 2021, avant de prononcer vendredi dernier un non-lieu.
« Pour la quatrième fois en cinq ans, la justice affirme qu’aucun acte répréhensible ne peut être reproché à M. Gérald Darmanin », s’étaient félicités lundi à l’annonce du non-lieu les avocats du ministre, Mathias Chichportich et Pierre-Olivier Sur. Le ministre a, pour sa part, déposé plainte pour dénonciation calomnieuse. Cette plainte « suit son cours », selon ses avocats. « Il faut quand même mesurer ce que c’est que d’être accusé à tort, de devoir expliquer à ses parents ce qu’il s’est passé parce que, c’est vrai, j’ai eu une vie de jeune homme », avait justifié le ministre en juillet 2020 au journal La Voix du Nord.
En février 2018, une autre femme avait porté plainte contre M. Darmanin pour des faits remontant à une époque où il occupait les fonctions de maire de Tourcoing (Nord). A cette occasion, elle avait affirmé s’être « sentie obligée » d’avoir des relations sexuelles avec ce dernier, en échange de facilités pour obtenir un emploi et un logement. L’enquête préliminaire, ouverte pour « abus de faiblesse », avait elle aussi fait l’objet d’un classement sans suite trois mois plus tard.
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