04 avril 2022

Mesures gouvernementales à l'étude afin d'aider les entreprises touchées par les sanctions

Après avoir tenu plusieurs réunions avec les filières et les partenaires sociaux, Matignon cherche à mettre en place un plan ciblé pour amoindrir les effets collatéraux des sanctions.

Après le "quoi qu'il en coûte" suite à l'épidémie du covid, le gouvernement doit aujourd'hui mettre en place un nouveau plan d'action pour soutenir les entreprises françaises touchées directement ou indirectement par les sanctions européennes.

Ce "plan de résilience économique" doit être présenté la semaine prochaine suite à différentes réunions tenues à Matignon ce mardi autour des représentants des filières industrielles et agricoles, et des partenaires sociaux. Il doit viser les ménages (autour du prix de l'essence) et les entreprises.

"Toute notre économie n’est pas en risque d’arrêt brutal. Mais il y aura des dommages collatéraux pour les entreprises et les ménages" a encore répété Matignon qui liste les chocs à subir: flambée des coûts de l'énergie et des matières premières pour tous, réduction des exportations, activité réduite voire stoppée pour les groupes qui disposent d'usines en Ukraine ou en Russie, contre-sanctions de la part du Kremlin...

Tout en martelant que l'exposition de la France en Russie ne représente que 2% de nos échanges commerciaux. Bref, le gouvernement s'attache à expliquer que les futures mesures n'auront pas l'ampleur de ce qui a été déployé en 2020, elles seront ciblées.

"Cette crise n'a rien à voir avec celle de 2020, souligne Bruno Le Maire. La crise de 2020 était un problème de demande. Il fallait que l'État intervienne massivement. Ce n'est pas la bonne solution face à la crise ukrainienne, qui est une crise d'offre, c'est-à-dire une flambée du cours des matières premières, du gaz, du pétrole, et des céréales. Ce serait alimenter l'augmentation des prix et l'inflation".

• Sécuriser les approvisionnements en matières premières

De nombreux secteurs sont concernés par une possible pénurie de matières premières ou de pièces venant d'Ukraine, notamment le secteur automobile et agricole. L'idée de Matignon est de renforcer l'accompagnement des entreprises les plus directement touchées. Une cellule dédiée est d'ores et déjà en place à Bercy.

Dans le secteur agricole particulièrement touché, la flambée des cours du blé et des céréales impacte l'industrie agroalimentaire. Une des pistes est de renforcer la production française notamment en suspendant les jachères. Cette idée, partagée par d'autres pays producteurs, semble avoir trouvé écho auprès du commissaire européen du secteur.

Le ministre de l'agriculture Julien Denormandie appelle ainsi à "produire plus au niveau européen". "Face à cet arrêt probable d'une partie des exportations de blé ukrainien ou russe mais aussi d'autres (céréales) comme le maïs ou le tournesol", il a estimé que l'Europe devait "assumer sa mission nourricière".

"Nous disons: il faut produire sur les hectares européens pour compenser ce qui ne sera pas produit ailleurs, sinon nous allons manquer de céréales" expliquait sur BFM Business Christiane Lambert, la présidente de la FNSEA.

Autre piste évoquée, un possible allongement des prêts garantis par l'État, mais aussi le renforcement des fonds propres de certaines entreprises.

Le secteur automobile risque également de nouvelles pénuries notamment du côté du titane ou de l'aluminium utilisés pour les pots catalytiques. Sur ce point, les marges de manœuvre pour compenser la chute des importations ukrainiennes sont plutôt réduites...

• Compenser la flambée des coûts de l'énergie

Électricité ou gaz, la flambée des cours étrangle de nombreuses entreprises à l'image de la Jurassienne de Céramique qui a décidé de mettre en sommeil son usine du Jura suite à la multiplication par 10 de sa facture de gaz. 54 salariés sont concernés. Rappelons que le bouclier tarifaire mis en place par le gouvernement ne concerne que les ménages.

La France souhaite une action européenne coordonnée à ce sujet, notamment dans le domaine des aides d’État, un sujet toujours sensible à Bruxelles. La Commission, sous l'impulsion de la France, devrait rapidement proposer des évolutions des règles dans ce domaine. Le sujet devrait être abordé lors du prochain Sommet de Versailles ce jeudi.

Lors de la réunion de mardi, les énergéticiens ont également évoqué l’idée de prix plafonds pour éviter que les tarifs de s’envolent. Là encore, un blanc seing de Bruxelles sera nécessaire.

L'objectif est de mettre en place des dispositifs immédiatement après ce sommet et les propositions de la Commission.

Lors de la réunion, Matignon a également évoqué le renforcement des capacités de nos terminaux méthaniers afin d'accueillir plus de gaz liquéfié. L'objectif étant de reconstituer des stocks de gaz avant l'hiver 2022. Tout comme la diversification des sources d'approvisionnement.

• Et de l'essence

Du côté de l'essence, le gouvernement prépare une réponse rapide pour les ménages qui devrait également être annoncée la semaine prochaine. Pour les entreprises fortement consommatrices comme les transporteurs routiers (25% de leurs coûts), les taxis, les ambulanciers, les transporteurs scolaires, il y a également urgence à agir comme le souligne la CPME.

Aucune piste n'a clairement été évoquée pour le moment mais la Confédération des PME propose diverses mesures comme l'augmentation du montant de récupération de la taxe intérieure sur la consommation des produits énergétiques (TICPE) sur le gasoil routier et son élargissement aux véhicules professionnels de moins de 7,5 tonnes, selon des critères à déterminer.

• Le retour du chômage partiel?

Le mot n'a pas été prononcé par le gouvernement qui estime que cette crise n'a rien à voir avec celle liée au covid. Mais le patronat l'a clairement évoqué ce mardi notamment pour les entreprises industrielles fortement consommatrices d'énergies.

"Le recours à une activité partielle renforcée pour des entreprises qui n'ont pas d'autres solutions pourrait être une solution", explique Patrick Martin, président délégué du Medef.

La solution s'appliquerait aussi aux entreprises paralysées par une pénurie. "Au-delà des prix de l'énergie, on entre dans une logique de pénurie et de rationnement qui pourrait justifier l'utilisation du chômage partiel pour les entreprises, notamment les plus importantes", ajoute un représentant du patronat cité par Les Echos. Les constructeurs automobiles subissant une pénurie de titane ou d'aluminium seraient alors concernés.

Le Medef entend néanmoins la volonté de proposer des solutions ciblées et de préserver les finances publiques. Il propose donc un dispositif de chômage partiel très encadré et soumis à des critères d'accès, ce qui limiterait le nombre d'entreprises bénéficiaires. Mais attention à l'usine à gaz.

Une solution médiane pourrait être mise en place. "Des entreprises qui voient leur production arrêtée car un composant leur manque peuvent mobiliser de l'activité partielle de longue durée, c'est un outil qui peut protéger dans la durée les emplois", a ainsi déclaré mardi Elisabeth Borne, la ministre du Travail sur LCI.

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