Il est philosophiquement entendu que la première des libertés fondamentales, sur lesquelles reposent toutes les autres, est la liberté d’expression. C’était vrai jusqu’à récemment.
En général, on estime qu’à partir du moment où l’on dispose de sa liberté d’expression, les autres libertés en découlent : liberté d’association, liberté de culte, qui permettent d’asseoir les droits civils essentiels depuis la propriété et le droit d’entreprendre jusqu’à la vie privée. L’expression politique ne peut exister que si la liberté d’expression existe et permet notamment de créer des associations politiques afin de faire connaître et diffuser ses idées…
Cependant, ces dernières décennies, un phénomène nouveau a fait son apparition qui impacte directement cette liberté d’expression. Si celle-ci est toujours d’une importance capitale, les changements technologiques actuels ont propulsé une autre liberté en avant : la liberté de transaction.
En effet, et cela n’a jamais été aussi clairement démontré que depuis quelques jours avec ce qui se passe à Ottawa et contre les camionneurs manifestants du Convoi de la Liberté, la liberté d’expression est directement dépendante de la liberté de transaction, et si c’est cette dernière qui a été choisie comme cible des États pour faire taire toute dissidence, ce n’est pas un hasard.
Par liberté de transaction, on entend ici notamment la capacité de chacun d’entre nous de commercer avec d’autres individus autour de nous de façon libre et, de façon incidente, anonyme. Ceci est non seulement indispensable mais fondamental pour garantir que la liberté d’expression pourra être respectée : très basiquement, s’exprimer demande de l’énergie. Ceci se traduit par une consommation de temps et de moyens : disposer d’une information ou d’une idée ne suffit pas, pour la faire connaître il faudra de toute façon engager des frais, même très modestes, qui se traduiront à un moment ou un autre par une transaction financière.
S’il est évident qu’avec la révolution informatique, le coût de transaction et de diffusion de l’information s’est effondré par rapport à ce qu’il fut il y a quelques décennies (et cela a directement participé au développement de médias alternatifs et à l’apparition de nouvelles sources d’information, par exemple), ces transactions ont, parallèlement à la décentralisation de l’information, subies a contrario une forte concentration : à mesure que l’information se décentralisait et devenait plus abordable, les transactions financières se sont elles faites de plus en plus centralisées.
Pire : depuis les attentats du 11 septembre 2001, on assiste à une véritable avalanche de lois destinées à encadrer et surveiller toutes les transactions financières d’un côté, et à supprimer toute possibilité de faire ces transactions commerciales ou financières en dehors des institutions et des canaux qui sont surveillés par les États. Ce n’est pas un hasard : prétextant la nécessité de lutter contre le terrorisme, le blanchiment d’argent, les achats ou ventes d’armes, de drogue ou de tout ce qui sera jugé sulfureux par l’État, les lois se sont accumulées pour forcer le citoyen à se départir de sa monnaie anonyme, physique, et se reporter complètement vers les transactions en ligne, numériques, tracées, étiquetées et nominatives.
Or, c’est un changement fondamental : depuis que la monnaie existe, elle a toujours été anonyme et pouvait être dépensée de façon sinon totalement libre au moins de façon relativement incontrôlée par les autorités. Tout individu pouvait, jusqu’à récemment dans l’Histoire, se passer de tout compte bancaire qui n’a été accessible au plus grand nombre que de façon finalement assez récente. La démocratisation des moyens de paiement dématérialisés est encore plus récente et son extension jusqu’aux plus petits achats (avec et sans contact à présent) ne remonte qu’à quelques années.
Avec la disparition programmée – voire carrément imposée – de l’argent liquide, poussée par la disparition progressive des distributeurs automatiques bancaires d’un côté et celle de l’usage du liquide aux caisses, dans les petits commerces et même dans les automates (boissons, friandises, tickets de métro, etc.), accompagnée de la numérisation complète tant de nos identités que de l’ensemble des données qui nous accompagnent (est-il besoin d’évoquer ici les passeports biométriques et vaccinaux ?), chaque transaction que nous faisons dans le monde moderne est intrinsèquement traçable et tracée.
Il n’y a pas beaucoup d’efforts à faire pour comprendre que, moyennant les bonnes dispositions légales et l’assentiment d’une proportion notoire de citoyens un peu trop faciles à manipuler, l’interruption de toute transaction sur nos comptes bancaires peut être décidé arbitrairement par le pouvoir en place.
C’est du reste exactement ce qui se passe actuellement en Démocratie Populaire du Canada sous l’impulsion du Lider Trudismo : les camionneurs déviants qui ont eu l’outrecuidance d’avoir des opinions dissidentes au sujet des pass vaccinaux actuellement en usage dans l’État fédéral nord-américain se retrouvent sans possibilité de faire la moindre transaction et dépendent donc totalement du troc et de la charité des autres individus. Du reste, il a été clairement envisagé d’étendre les rétorsions (financières) bien au-delà des participants et des soutiens au mouvement des camionneurs et de frapper de la même sanction (sans procès) ceux qui avaient des vues compatibles avec celles de Trump, le précédent président américain.
Ne vous inquiétez pas : les gouvernants et politiciens ont fort bien compris tout l’intérêt personnel qu’ils pouvaient retirer de cette concentration et de cette surveillance des transactions par le modèle numérique actuel et présenteront cette nouvelle prison qu’ils s’efforcent de construire autour de nous comme un petit embarrassement nécessaire afin de bouter les vilains, les méchants hors des sociétés civilisées qu’ils entendent protéger.
Moyennant quoi, il le sera alors facile de pousser aussi fortement que possible la mise en place des « CBDC », ces cryptomonnaies de banques centrales, qui auront le bon goût (magique) d’être pilotables par les politiciens, orientables vers les marchés, industries et commerces que ces politiciens jugeront utiles (pour eux), et ce, sans que vous puissiez vous y opposer de façon formelle et même informelle : la dissidence sera facile à écrabouiller, tout simplement en lui retirant absolument tout moyen d’exister.
En l’espace de quelques années, la liberté d’expression, fondement des sociétés démocratiques occidentales, a brutalement (et habilement) été mise sous tutelle de notre capacité à faire simplement des transactions.
Il devient absolument indispensable et nécessaire que ce lien soit brisé pour que nous retrouvions nos libertés.
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